Elue Miss Centrafrique en 2010, lors de la deuxième édition de cette manifestation, Fortunée Habiba Keita, âgée de 19 ans, rêve de devenir mannequin malgré sur l’état encore embryonnaire de ce métier dans son pays.
Revenant sur l’élection de Miss Centrafrique 2010, elle pense devoir son succès à sa témérité : «j’ai osé et j’ai réussi», déclare-t-elle non sans regretter de n’avoir bénéficié d’aucun soutien de la part des autorités de son pays.
Elle a capitalisé ce succès pour préparer une brillante participation à l’Election « Miss Cinquantenaires des Indépendances africaines » qui aura lieu le 24 mai 2011 à Bamako, à la veille de l’anniversaire de la Journée mondiale de l’Afrique célébrant l’anniversaire de la signature, le 25 mai 1963, des accords instaurant l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA, ancêtre de l’UA).
APA-Mlle Keita, vous avez été élue Miss Centrafique 2010. Comment avez-vous accueilli ce succès dans un pays qui découvre à peine ce genre de manifestation ?
FHK-Ce couronnement, je l’ai accueilli avec une grande émotion, je dois avouer. L’engouement était très fort autour de moi. J’étais envahie de compliments venant de tout le pays. Dans la rue, je ne passais plus inaperçue. « C’est elle, la voilà », murmurait-on partout où je passais. Mais voyez-vous le succès a été hélas, éphémère. Presque passé aux oubliettes.
APA-Pouvez-vous revenir sur les raisons qui vous ont poussée à vous présenter ?
FHK-Je suis passionnée par le mannequinat. J’ai toujours rêvé devenir mannequin, même si en Centrafrique les choses sont encore à l’état embryonnaire. Pour me présenter à l’élection Miss, j’avais le soutien et l’accord de mes parents. Cela m’avait motivée. Certes, je n’étais pas la plus intelligente et la plus belle des filles de Centrafrique au soir de mon élection pourront dire certains. Mais je dis encore j’ai osé et j’ai réussi, c’est ce qui me rend encore plus fière car la plupart de mes compatriotes ont une idée négative de ce genre d’activités culturelles.
APA-Après votre élection, on imagine que vous avez reçu beaucoup de cadeaux. Je pense notamment à ce qu’on dû faire pour vous les promoteurs du spectacle et les autorités de votre pays. Qu’en a-t-il été vraiment ?
FHK- L’opérateur de téléphonie MOOV nous a offert, mes dauphines et moi, chacune un téléphone cellulaire avec un important montant de crédit. L’établissement scolaire et de formation professionnelle NEW TECH INSTITUT m’a remis un ordinateur portable qui ne m’a jamais servi car il était défectueux.
APA- Et le billet d’avion offert par Air France?
FHK- Ce billet d’avion offert par AIR FRANCE ne m’a pas non plus permis de voyager faute de sponsors et de chronogrammes d’activités à l’étranger. En février dernier, j’ai été obligée de le brader à 450 000 F CFA car il arrivait à expiration.
APA- Les autorités centrafricaines ont-elles fait un geste ?
FHK-Je n’ai reçu aucun soutien de la part de ces autorités, malgré les promesses de la première Dame et du Ministre de la Culture. J’ai tapé en vain à leurs portes.
Je dois aussi signaler que le réseau du grossiste de produits pharmaceutiques SHALINA nous a soutenu toute l’année scolaire 2010 durant, par l’octroi de bourses d’études.
APA-Avez-vous pu décrocher des contacts hors de Centrafrique ?
FHK– Depuis mon élection, je n’ai été contactée par aucune structure ni au niveau ou sous régional, régional ni au plan international. Je comptais sur la Présidence de la République pour faire ma promotion. Mais les portes me sont fermées. Pourtant, j’aimerai voyager, rencontrer des gens, mais les moyens me font défaut.
APA-Autrement dit, depuis votre élection vous n’avez réalisé aucune action sociale ou humanitaire comme c’est de tradition avec les Miss ?
FHK- Aucune action sociale ou humanitaire n’a été réalisée. Notre projet de création, entre autres, de centre formation en informatique pour les jeunes non qualifiés est resté sur le papier faute de bailleur. Et pourtant, nous voulions par ce biais, aider à leur insertion dans la vie active.
APA –Ces rendez-vous manqués avec les autorités de votre pays sont-ils de nature à vous dissuader de participer à la grande manifestation de Miss Cinquantenaires qui aura lieu au Mali ?
FHK Pas du tout. Vous savez que j’aime bien affronter les défis, lorsqu’il s’agit de représenter mon pays, surtout lorsqu’il est question de symboliser l’intégration africaine. Alors si tout va bien, rendez-vous à Bamako. Avec le soutien et la complicité du Comité Miss Centrafrique, je me sens forte pour ce challenge.
APA-Votre nom est Keita. Ce qui pousse beaucoup à vous prendre pour une Malienne. Racontez-nous cette histoire de votre famille.
FHK-Mon papa, Keita Ahmat Keita, m’a raconté que mon arrière-grand père paternel était un ancien Tirailleur. Il est d’origine Malinké du Mandé, dans le département de Kita, région de Kayes au Mali. Mon arrière-grand père qui s’appelait Faraba Keita, était arrivé à Bangui au début du siècle dernier et s’était marié avec une Centrafricaine. Son fils, mon grand père, se nommait Moussa Keita. Il était conducteur de Travaux publics. Ma grand-mère paternelle est de père sénégalais et de mère centrafricaine.
APA-Avez-vous jamais visité le Mali ?
FHK- Non ! Je connais le Mali seulement sur la carte de l’Afrique. C’est vrai. J’ai soif du Mali et du Sénégal mais aussi de la Guinée. Je me suis toujours intéressée à tout ce qui touche à l’Afrique de l’Ouest, même si la Centrafrique reste mon premier et plus cher pays.
APA- Si vous deviez inviter le touriste le plus sceptique à venir visiter votre pays, dites-nous en quelques mots ce qui constituerait vos arguments pour le convaincre de la destination Centrafrique, dont les immenses potentialités semblent encore méconnues.
FHK –Je dirais à ce touriste et à tous ceux qui veulent visiter notre continent, que pour toucher le cœur de l’Afrique, la destination première c’est la Centrafrique. Le dialogue politique y est lancé et la réconciliation devenue réalité est annonciatrice d’un climat totalement apaisé.
Edouard Touré