Editorial – Miss SAHEL pour quoi faire ?

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Le Mali est un pays religieux avec une population composée à 80% de ruraux, dont une majorité de femmes rurales qui se passeraient des contorsions exhibitionnistes des misses. Chaque pays a son génie, forgé par une histoire et un environnement physique spécifique. Et s’il est vrai que les civilisations meurent, c’est après des siècles. Une miss, au Mali comme ailleurs, provient souvent (du côté paternel ou du côté maternel), d’une seule ethnie à laquelle Dieu a accordé la supériorité sur les autres dans le domaine de la beauté physique, puisque tel est l’enjeu de ce concours. Il paraît que la deuxième édition de Miss Sahel, c’est en novembre prochain.
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Cette activité a-t-elle un impact sur la lutte contre la pauvreté ? Ne pousse-t-elle pas les filles à se lancer à corps perdu (dans tous les sens de l’expression) à la recherche de l’argent pour s’acheter les cosmétiques jugés indispensables à leur préparation ? Il y a quelques années, le problème de l’ethnie de la miss s’était posé en Côte d’Ivoire. Une très belle métisse avait recueilli les faveurs du jury, devenant Miss Carnaval de Bouaké. Mais des jeunes de la ville avaient contesté ce choix en disant qu’elle n’était pas noire, ce qui avait provoqué les pleurs de sa mère, une Blanche.

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L’émotion (et peut-être la honte) fut grande, et c’est à Bouaké que naquit à la même époque le concept de Miss Awoulaba, considéré comme plus approprié à l’Afrique, et en tout cas reconnaissant ouvertement le facteur racial : Miss Awoulaba désignait en effet la jeune femme la plus callipyge (ayant l’arrière-train le plus beau ou le plus attirant), la femme européenne ayant, depuis des décennies, adopté le profil filiforme. Ce canon excluait également, à vrai dire, les jeunes filles, ou, du moins, celles-ci étaient battues à plate couture dans cette discipline par la femme de trente ans, « la petite maman », pour traduire du bambara une expression venant de la typologie des coureurs de jupon, qui sont, autant que les annonceurs, intéressés par l’élection miss.

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C’est le lieu de reconnaître qu’il y a bien quelque indécence, voire de l’impudeur, à demander à une vierge d’exposer sa beauté contre de l’argent, et il faut avoir un cœur et un cerveau d’homme d’affaires pour être promoteur d’un concours de ce genre. Mme Fatoumata Siré Diakité, une féministe bien connue dans notre pays, actuellement ambassadrice, y voyait, non un prétendu hommage à la beauté, mais la preuve qu’on traitait la femme comme un objet, une marchandise. En Islam, ce n’est pas par l’appât de l’argent qu’on obtient d’une fille qu’elle ôte son voile ; cette faveur n’est accordée qu’à celui qui, en présence du père et avec sa permission, lors d’une visite effectuée à la maison à cet effet, se présente comme prétendant à la main de la demoiselle.

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Mais aujourd’hui il y a un autre concours en Côte d’Ivoire : celui de la meilleure lycéenne en math. La maturité est passée par là. Ce pays ne cessera pas d’étonner, ayant su allier la modernité la plus brillante à un sens profond de la tradition. En effet, les gratte-ciel du Plateau d’Abidjan n’empêchent pas les nombreux rois (de l’Agnéby, de l’Indénié, des Abrons, des Abbè…) de régner en toute plénitude, ni le professeur d’université de faire sa session de bois sacré. Que ce robuste bon sens, cette « connaissance de soi » (autre expression bien malienne) soient d’un apport essentiel au retour de la paix en Côte d’Ivoire, il ne faudrait pas s’en étonner.

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Les organisateurs de spectacles et les promoteurs de bars doivent craindre que notre pays ne devienne comme cet autre pays africain, que l’on reconnaîtra facilement, où l’on chante et danse bien, mais qui a été envahi et battu par un voisin minuscule. C’est à un tel résultat qu’on aboutit, lorsque des chefs de famille entraînent la jeunesse sur la voie des plaisirs et de la perversion. Pourquoi ne pas organiser un concours annuel de la meilleure jeune travailleuse du Sahel ? Dieu merci,  de cette catégorie valeureuse, il y en a beaucoup au Mali. Encore faut-il qu’on veuille la considérer et lui rendre hommage ! Bonne fête du 31 juillet à toutes les Africaines !

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Ibrahima KOÏTA

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