Cela fait bientôt cinq ans, jour pour jour, que le jeune rappeur, Yeli Mady Konaté anime des émissions sur Radio Klédu. La première ”Zone de vérité” passe tous les dimanches de 13 heures à 14 heures, alors ” qu’Allo kledu ” passe entre 16H20 et 17H du lundi au vendredi). Cette émission a connu un grand succès auprès des auditeurs de Klédu. L’audience de l’émission est le fruit de 5 ans de labeur, que Yeli met au service de Klédu, mais avec le coup d’état et la situation au nord, ” Allo Klédu ” a connu une autre dimension. C’est pourquoi nous nous sommes entretenus avec Yeli Mady Konaté, pour qu’il nous parle de cette émission, les risques liés à l’animation d’une telle émission sur Radio Klédu. Qui est aussi une radio de référence à Bamako.
Bamako Hebdo : Pourquoi une émission interactive sur Klédu ?
Yeli Mady : Je me suis en fait inspiré des ” Talk Show “ que j’écoutais souvent quand je faisais mes études aux Etats Unis. J’étais passionné et très surpris de la liberté des animateurs qui avaient le droit d’exprimer leurs opinions sur les antennes et les confrontaient à celles des auditeurs. Quand je suis retourné au Mali, j’ai ressenti ce vide. J’ai remarqué que l’animateur donnait un thème et l’auditeur se contentait juste de donner son avis, fondé ou pas puisqu’il n’avait pas à défendre son opinion. Les gens ne comprennent pas trop le sens de débat dans notre pays. Quand il y’a un désaccord, on confond débat et querelle personnelle. J’adore les débats, j’adore les confrontations d’idées, car c’est toujours autour de débats sincères que jaillit la vérité.
Quel rôle joue cette émission selon toi, est ce que ça t’apporte quelque chose ?
Cette émission, sans prétention aucune, d’après moi, ne représente réellement le pouls de la capitale. Le fait que je n’impose aucun thème et que je laisse les auditeurs choisir leurs propres sujets était mal compris au départ. Et le fait que j’exprimais mon opinion n’arrangeait pas les choses. J’ai reçu beaucoup de critiques au début. Mais au fur et à mesure, grâce à des auditeurs qui ont accepté de jouer le jeu, les gens ont commencé à comprendre.
Le rôle de l’émission est de montrer sans tabou l’état d’esprit des auditeurs et d’au moins une partie de la population. Elle m’a apporté une meilleure compréhension de ce qui se passe dans mon pays. Quand on cause chaque jour avec différentes personnes, on en ressort toujours avec plus de connaissance.
Qu’est ce que cette émission a changé dans l’éducation et la mentalité des Maliens ?
L’autocritique je pense. Quand on n’a pas d’argument à donner, il est facile de mettre la faute sur les autres. Je m’efforce toujours de pousser les auditeurs à défendre leurs idées. Parfois ils s’aperçoivent de leurs erreurs, parfois c’est moi qui suis dans l’erreur. Dans tout les cas nous apprenons tous à débattre dans le respect. Je m’efforce de faire comprendre chaque jour que nous sommes tous frères et que nous ne sommes pas obligés d’être toujours d’accord surtout pour s’entendre. Il suffit de confronter les idées, et accepter quand l’autre a sorti les meilleurs arguments
Est-ce que tu as des réactions, disons des échos favorables ou défavorables de l’émission ?
Au départ, les échos étaient très défavorables. Les gens n’arrêtaient pas de me dire que je n’ai pas le droit de donner mon avis ou questionner l’auditeur. Pour moi, si on ne pouvait pas mettre des propos en question, le débat resterait stérile. J’ai persisté malgré les critiques même quand j’avais à peine 2 ou 3 appels par émission. Il faut vraiment saluer, ceux qui ont cru, en moi et au concept de l’émission car grâce à eux, elle a survécu. Aujourd’hui je suis agréablement surpris du renversement de situation. Nous recevons des messages de tous les côtés nous félicitant pour notre engagement.
Les lignes téléphoniques sont toujours bloquées et les auditeurs en demandent une 2ème. Preuve de l’engouement qu’ils portent pour cette émission. Je suppose que c’est notre récompense pour avoir tenu bon.
Avec la crise, comment vous parvenez à canaliser tes auditeurs ?
Avec la crise, j’ai compris très vite qu’il était dangereux de diriger l’émission comme avant. Certains ont commencé à profiter de la popularité de ” Allo Kledu ” pour essayer d’influencer l’opinion. La situation était très tendue, alors j’ai essayé d’être le plus objectif possible sans donner mon avis sur la situation. Je ne voulais vraiment pas faire partie de ceux qui se servent de la radio pour des intérêts personnels. Le seul message que j’encourageais c’était : “ la paix au nord, et l’apaisement au sud “.
Est-ce que tu as eu des problèmes avec le coup d’Etat à cause de l’émission ?
Je ne peux pas dire que j’ai eu des ” problèmes “ comparés à certains confrères qui ont même été interpellés. Mai j’avoue que j’avais une pression constante et pas mal de menaces. Mais je remercie infiniment la Radio Kledu à travers mon chef de programme qui m’a toujours soutenu dans mon émission.
Quels sont vos projets ou ambitions au delà de cette émission ?
Mes proches sont toujours surpris du nombre d’activités que je mène. J’ai encore beaucoup de projets en cours Inch Allah. J’ai toujours pensé que quand on a un minimum d’éducation dans un pays où la majorité de la population n’y a pas accès, on n’a pas le droit de se contenter de ce qu’on a. Il faut entreprendre, expérimenter et apprendre. Ce n’est pas un luxe mais un devoir.
Avez-vous un message pour les jeunes ?
Éduquons-nous. Que nos ainés nous excusent mais ils ont échoué dans ce sens. Education, éducation, éducation. Comprenons que nous ne savons rien. Nous avons besoin de tout revoir à la base et de nous remettre en question. Les derniers évènements prouvent à quel point l’ignorance peut devenir un danger dans un pays.
Avez-vous une recette pour la sortie de crise, partant de ce que disent vos auditeurs ?
Vu tout ce qui s’est passé dans notre pays, je crois vraiment qu’on en a assez fait. Jamais je ne crois dans l’histoire du Mali, notre pays a été aussi ridiculisé par les récents évènements. Il est temps de revenir à la retenue. Nous avons un gouvernement en place, laissons les travailler. Si ce n’est pas pour parler de la paix au nord ou de l’unité nationale, le silence doit être de rigueur. C’est de cela dont on a besoin aujourd’hui
Un mot de la fin, ou un message aux populations ?
Remettons nous en question. Informons-nous. Si j’ai bien appris quelque chose à la radio, c’est qu’il ne faut jamais assimiler une information sans faire ses propres recherches pour se former une opinion personnelle et fiable. Et surtout à ceux qui disent que la vie politique de leur pays ne les intéresse pas, comprenez que quand on ne participe pas à la vie politique de ce pays, on à pas droit à la parole. Ce pays ne pourra se construire qu’avec l’apport de tout un chacun. Et enfin un grand merci à Bamako hebdo, ainsi qu’a ceux qui écoutent et participent chaque jour à l’émission ” Allo Kledu “. Sans vous l’émission n’existe pas.
Kassim TRAORE
c’est ma première fois d’entendre parler de l’émission car je réside plus à bko depuis longtemps mais vu l’interview-là c’est comme cela que les choses vont changer sinon jamais par un coup de baguette magique!!! Je te contacterai, travaillons pour la culture de la responsabilité, l’éveil patriotique, civique et citoyen dans notre pays. Merci
Merci YELI pour tout ce que tu fais pour ce pays à travers ton emmission “ALLO KLEDU”, tu es le meilleur animateur du MALI.
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