Yali Film School Fellowship : Djélika Mama gagne son pari !

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Le court métrage “Ma Passion”  de Djélika Mama Traoré a été projeté le jeudi 24 juillet dans la salle de projection du Conservatoire des arts et des métiers multimédias Balla Fasséké. C’était dans le cadre du projet Reel Change : la bourse de cinéma Yali pour le leadership responsable des femmes au Mali et au Niger, financée par le département d’Etat américain à travers l’ambassade des Etats-Unis au Mali. Une conférence-débat sur l’intégration des femmes dans le milieu artistique a suivi la projection. Elle a été animée par l’écrivaine et comédienne Fatoumata Coulibaly dite FC et le réalisateur Salif Traoré.

La projection de ce film documentaire a suscité beaucoup d’intérêt et d’interactions, nous avons été impressionnés par la qualité des interventions et l’implication des jeunes lors des discussions qui ont suivi la projection”. Tels sont les propos de Zeinabou Wallet Mohamed Ali, chargée du projet Yali Film School Fellowship à Accountability Lab Mali.

Malgré les mutations que connaît le monde, certaines professions sont toujours perçues comme réservées à une couche sociale bien déterminée. Cette perception des choses reste une préoccupation inquiétante dans un monde globalisé. Alors, s’affirmer artiste devient un choix dur.

Parmi dix parents interrogés, seul un se dit prêt à accompagner son enfant si ce dernier choisit d’être artiste. Amer constat ! Cette réalité couvre le cri silencieux des femmes qui veulent faire parler leur savoir-faire sur le plan artistique. Etre femme dans le monde des artistes, c’est avoir l’épée Damoclès sur la tête.

Pour extérioriser ces peines inexprimées, Djélika Mama met en scène le calvaire des femmes artistes majoritairement jeunes à travers Fatima Maïga, une jeune musicienne. “Au Mali, les femmes artistes rencontrent beaucoup de difficultés dans leur carrière. Ces obstacles poussent nombre d’entre elles à jeter l’éponge. Vivre sa vie d’artistes en tant que femme est un combat quotidien”, a publié la jeune réalisatrice sur sa page Facebook.

A 23 ans, posture imposante, sourire attrayant, la jeune dame de confiance et de conviction justifie son choix parmi les dix bénéficiaires reparties entre les régions et la capitale. “Parce que je suis une femme et artiste. Parce que j’ai dû lutter et me battre pour enfin être libre de mes choix de vie. Egalement, je suis une assoiffée de justice donc j’estime que chaque être doit libre dans ses choix et être accepté et toléré en ce sens”, révèle-t-elle.

La bourse a donné la chance à ces femmes d’exposer leurs talents imaginaires tout en mettant en lumière le quotidien sombre et les souffrances actes non reconnues de bien des femmes.

L’objectif du projet en global est “de former les femmes bénéficiaires du projet sur les techniques de productions et réalisation d’un court métrage, ensuite les accompagner dans la réalisation de leurs courts-métrages sur des thématiques qu’elles ont, elles-mêmes choisies, mais qui doivent refléter les réalités auxquelles sont confrontés les communautés maliennes. Donc l’objectif est de contribuer à l’amélioration des politiques et des pratiques à travers les courts métrages utilisés comme outils de sensibilisation et de plaidoyer”, dévoile Mme Wallet. Le film est pour nous “l’outil parfait pour la sensibilisation, l’engagement et la défense des droits, car les histoires peuvent être convaincantes”, poursuit-elle.

Cependant, le conférencier a insisté que la réticence au métier d’art est liée à la religion, aux us et la situation financière des professionnels. Certains religieux prêchent que les artistes, des mécréants, leur place est le feu ardent de l’enfer. Pour certains conservateurs, l’art est l’apanage des castes, qu’aucun noble ne devrait exercer. Ces perceptions anachroniques règnent encore.

En revanche, M. Gakou, le président de l’Association des cinéastes du Mali, fait part de ses inquiétudes face à certains préjugés vis-à-vis de la religion, l’en occurrence musulmane. Selon lui l’islam n’est pas contre l’art. “Je suis imam mais cela ne m’empêche pas d’être cinéaste”, se glorifie-t-il.

En bonne mère, Fatoumata Coulibaly a pris la parole. “Battez-vous pour le choix que vous faites … Assumez-vous !”, ainsi s’adresse la doyenne à la jeunesse. Selon elle, il faut privilégier la bonne formation des artistes. Le public, composé de professeurs, d’amis, de parents, de camarades, de comédiens a bien apprécié le travail tout en formulant des recommandations pour améliorer le travail. Les intervenants ont surtout invité les artistes, surtout femmes, à s’adapter à la réalité tout en exerçant leur métier dans la loyauté.  Dans l’avenir, la jeune réalisatrice, détentrice d’une licence en droit public à l’Université des sciences juridiques et politiques de Bamako (USJPB) et en phase terminale au Conservatoire Balla Fasséké Kouyaté, filière multimédia, souhaite développer ce sujet afin d’exposer mieux la situation. “Ce thème est tellement sensible qu’il mérite d’être approfondi et étudier au sens propre du terme”, lâche-t-elle.

Les initiateurs, eux, se si disent contents du contenu des productions. Ils affirment avoir recueilli des recommandations formulées par les intervenants ainsi que les participants lors de chaque projection. Ces recommandations serviront à la pérennisation du projet et de guide pour travailler en synergie avec les autorités et acteurs des différentes localités sur d’autres actions qui viseront à trouver des solutions adéquates à la thématique exposée dans les courts métrages.

Aujourd’hui, l’artiste malien a deux fers au feu : le succès social et financier auxquels sa survie est liée.  S’accrocher ou renoncer, il n’a qu’un ultime choix. Ne dit-on pas qu’il n’y a pas de sot métier ?

                                   Chaka Kéita

 

 

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