Le célèbre traditionaliste commençait toujours son récit par décliner ce qu’on appelle son pedigree. Ceci est une parenthèse indispensable avant de situer chaque fait historique dans le temps .Nous sommes au 13eme siècle, un siècle Mandéka au premier chef, car Soundiata de retour de Mema transforme le petit royaume de la vallée du Niger en un véritable empire. Ce fondateur de l’empire du Mali en donnant l’investiture à ses principaux lieutenants et à certains de ses enfants jette les bases d’une vraie « colonisation » des terres situées entre le Niger et le Sénégal. Ainsi nait le Kita Mandéka dont le site est reconnu pour la première fois semble –t-il par le premier fils de Soundiata Nyamagan qui y est rejoint peu après par son jeune frère .D’autres immigrants arrivent dont Setigui kasuma autre frère de Nyamagan. Ce n’est pas un immigrant comme les autres, car de lignée royale, il parvient à donner l’indépendance à Kita entre-temps tributaire des Trawelé du Bafing, descendant de Tiramagan . Quoi qu’il en soit Sétigui kasuma porte un coup dur à la puissance des Trawelé du Bafin .Kita une fois de plus retrouve ses moyens d’expansion et une seconde ère de colonisation Mandéka commence dont les descendants de Sétigui sont les artisans.
Cette autre épopée Mandéka à partir de Kita est entrecoupée d’observations relatives à l’agriculture, aux rites agraires et aux divinités protectrices de Kita, chaque période historique semble ajouter à la grandeur de kita qui reçoit les bambara-massassis du Kaarta. les Cissé famille maraboutique avant d’ouvrir ensuite ses portes à Alifa Maki. L’hégémonie Massassi puis Toucouleur s’exerce semble –t-il sans grand dommage pour Kita .Nous y voilà au 19eme siècle et Kele Monzon en guise de conclusion à cette partie de son récit fait l’éloge de l’agriculture, du travail qui libère l’homme.
Mais en réalité ce passage a plutôt trait à une légende fortement ancrée chez les griots et autres historiens du cru .Sènè le Wusaman (rien ne vaut le travail des champs), les trois simbo (maitres chasseurs) Kanu Simbo, Kanunyongon Simbo et lavali Simbo tous trois petits –fils de Jon Bilal esclave du prophète sont venus au Mandé chacun portant une malle, don du prophète .Ils devaient travailler trois ans avant de prendre connaissance du contenu de leur malle .Ainsi le voulait le prophète. Le délai de trois ans passé ils ouvrirent leurs malles .L’ainé Kanu simbo ( simbo de l’amour) vit la sienne pleine d’or. Le second Kanunyongon simbo ( simbo qui aime son prochain) vit des écorces d’arbres dans la sienne .Celle d lavali simbo( simbo du travail ) ne contenait que la terre .Ils se querellèrent à propos de l’or et demandèrent à Kabaku ( le roi du pays de l’étrange )qui rendit le jugement suivant. La terre vaut de l’or et l’écorce des arbres la terre .Mais le travail est supérieur aux trois réunis .Et c’est Lavali simbo qui devait être roi du mandé parce qu’il avait colporté la terre de la Mecque. Ainsi le Mandé a commencé par le travail des champs , car son premier roi s’appelait travail , de même que le premier village Ki( travail) fondé par les trois simbo .Et c’est à Kita que les traditionalistes situent ce premier village .Kita serait donc ( Ki= travail) et ( Ta= prendre)autrement dit prendre le travail au sérieux .Voilà donc pour le mythe né avec le triomphe de l’idéologie musulmane .Au mandé chaque généalogiste s’emploie désormais à rattacher son ancêtre à Mahomet ou à l’un de ses compagnons .L’épopée Mandéka à partir de Kita parait alors terminée .Mais non ! Elle reprend tous ses droits avec les Trawelé de Bafin qui essaiment hors des limites de la région de Kita pour fonder en pays Senoufo autour de Sikasso la célèbre dynastie des Tiéba et Babemba.
Et de la cité des Balanzans aussi ……
Notre confrère Youssouf Doumbia du quotidien national « l’Essor » racontait dans un merveilleux article, que le balanzan a toujours été le symbole de la ville de Ségou. Appelé en botanique « Accacia Albida », cet arbre verdit au cours de la saison sèche et perd ses feuilles pendant l’hivernage. Dans la symbolique bambara le Balanzan qui laisse les autres arbres profiter des pluies est à l’image du chef qui se soucie de son peuple.
Ségou est la ville des 4444balanzans plus un plus rabougri « le Balanzan bossu » comme l’appelle Dr Mamadou Fanta Simaga, auteur du livre « Les chants du kandio » consacré aux trois versions contradictoires circulant encore sur l’histoire de sa fondation .Dans cet ouvrage qui fait pourtant grise mine à coté d’autres ouvrages de moindre qualité , ce féru de culture africaine explique qu’à l’époque du royaume bambara , tous les hommes de 20 à 50ans étaient tenus de faire la guerre .le royaume pouvait aligner une armée de 4000hommes. C’étaient les 4000 balanzans .Les troupes réserves étaient encadrées par des soldats de métier au nombre de 400 balanzans .Le royaume de Ségou formait avec son allié de Saro 40 provinces, d’où les 40 balanzans .Quant aux 4balanzans qui font l’appoint, ils représentaient le roi, sa famille, ses courtisans et sa garde. Enfin à Ségou, il y’avait au service du roi un conseil occulte, dont la composition dépendait de son bon vouloir .Ce conseil secret était appelé « Balanzan kokourounin kelen » ( l’unique balanzan bossu ». Il était le vrai socle du pouvoir à Ségou. Celui qui recevait une invitation pour participer à la réunion du conseil occulte en était fier .Mais il devait s’inquiéter s’il n’était pas invité.
Fakoly Doumbia
Merci Fakoly Doumbouya.Moi j’ai lu quelque part que Kita découlerait d’une incompréhension linguistique entre les conquérents blancs et leur l’interprète qui n’arrêtait pas de dire aux indigènes “o lu kita lé”(ces hommes sont en commission).Mais j’avoue que votre version parait plus cohérente.Encore grand merci à vous Doumbouya. 😉
Faites revivre les passées pour nous autres nouvelles générations, aiguissez nos appétits de redcherches afin nous puissions contribuer à vraiment réecrire notre histoire.Sinon les histoires qui nous sont racontés à l’école des blancs nous concernat sont truffées de mensonges même si celles qui nous sont contées soient un peu légendaires. Merci feu Kèlèmonzon, merci monsieur Fakoly Doumbia.
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