Blonba et Jean-Claude Fall, dans une collaboration artistique exemplaire, viennent de présenter une nouvelle pièce théâtrale intitulée «Tête d’or». Paul Claudel en est l’auteur, tandis qu’elle est mise en scène par Jean-Claude Fall.
Cette pièce de théâtre est l’histoire d’un desperado dont l’orgueil fou le conduit à prendre le pouvoir par la violence et à s’affranchir de toutes les lois humaines. C’est aussi un combat entre l’espérance et le désespoir, entre la tentation du pouvoir absolu et la foi dans la fraternité humaine. Il s’agit en fait d’un spectacle itinérant, en extérieur, où chaque scène est jouée dans un espace différent. «Tête d’or» a déjà été présentée du 6 au 8 février 2014, pour la première fois, au peuple malien. C’était au palais de la Culture Amadou Hampâté Bah de Bamako. Elle sera bientôt à Paris pour des présentations publiques.
Dans cette pièce théâtrale, le rôle de «Tête d’or» est joué par Sidy Soumaoro alias Ramsès. Plusieurs autres têtes d’affiche et espoirs de la scène malienne y jouent également, en l’occurrence Adama Bakayoko, Nouhoum Cissé “Banyengo”, Hamadoun Kassogué “Kerfa”, Abdoulaye Mangané, Ismaël N’Diaye, Maïmouna Samaké, Djibril Sangaré, Diarrah Sanogo “Bougouniéré”, Gaoussou Touré, Aïssata Traoré, N’Dji Traoré, Tiéblé Traoré, Mohamed Yanogué et Cheick Diallo. Il faut aussi signaler la collaboration dramaturgique de Jean-Louis Sagot-Duvauroux et celle chorégraphique de Naomi Fall et Mohamed Coulibaly. Sans oublier qu’il s’agit d’une production de la Compagnie La Manufacture Cie de Jean-Claude Fall, en partenariat avec BlonBa.
Le metteur en scène de ce spectacle, comme indiqué plus haut, est Jean-Claude Fall. Il est l’un des meilleurs metteurs en scène en France. Il a par ailleurs dirigé plusieurs centres dramatiques nationaux en France. C’est lui qui a créé le théâtre de la Bastille. Il a une longue carrière derrière lui, et espère en avoir encore devant lui. Jean-Claude Fall a longuement travaillé sur «Tête d’or» qu’il voulait présenter en Afrique ou en Amérique, ou encore dans des pays de l’Est. Il pensait en l’occurrence à des pays comme la Mongolie ou la Sibérie. Des endroits qui ont, d’après lui, des archétypes différents de la culture européenne. Surtout qu’il est convaincu que cette pièce ne peut avoir de prise en Europe. «Mais ça parle plus dans des pays avec des traditions despotiques, avec des fonctionnements très familiaux, où la famille, j’allais dire les règles ancestrales sont encore là. La particularité majeure de Tête d’or est le fait qu’elle est mise en scène sur trois sites ; chose rare dans les mises en scène théâtrales modernes», explique le metteur en scène.
De fait, Jean-Claude Fall, qui n’a jamais travaillé dans les décors naturels, avait envie de tenter cette expérience pour réaliser quelque chose qui ressemble à presque du cinéma. Selon lui, eu égard à l’histoire récente du Mali, cette pièce semble avoir été écrite pour décrire la situation malienne. De ce point de vue, elle raconte un royaume dévasté et qui est en proie à des ennemis très puissants. Un royaume dans lequel s’élève une figure emblématique, une «Tête d’or» (un homme du peuple) qui refuse la défaite et se bat pour reconquérir le royaume. Et une fois qu’il a réussi, il revient pour revendiquer lui-même le pouvoir. Il devient alors un tyran qui veut imposer des lois : les femmes à la maison et les hommes à la guerre à la conquête du monde. Il emmène ainsi tout le royaume dans une espèce de folie guerrière. Au bout d’un moment, tout le monde le lâche ; il meurt. Le despotisme fou, le fanatisme fou d’une tête d’or disparaît, laissant ainsi la possibilité aux hommes de reconstruire un autre monde.
Pour ainsi dire, les acteurs et comédiens de cette pièce font croire qu’ils dépeignent la crise malienne. Tout le laisse croire, juste dans les accoutrements des comédiens. Cependant, Jean-Claude Fall précise : «Mais ça ne se passe pas qu’au Mali ; ça s’est passé dans beaucoup de pays en Afrique. Ça s’est passé dans beaucoup de pays en Amérique, dans des pays en Europe de l’Est. Ça peut se passer à tout moment partout. Je dis simplement que cette pièce dit attention à ces fausses figures héroïques qui nous entraînent vers le chaos», conclut-il.
Nana HOUMAMA
