Loin d’être qu’un évènement ludique, depuis 16 ans, Ségou’Art/Festival sur le Niger ne cesse de démontrer que la culture est un excellent pont entre l’économie et le développement. Mieux, il reste un excellent espace d’échanges en vue de trouver des solutions à des questions d’intérêt national et international. Et, dans le cadre de la 16ème édition de Ségou’Art/Festival sur le Niger qui coïncide avec la 14ème édition du Colloque de Ségou, des éminents universitaires du continent, de la diaspora et d’ailleurs ont été conviés pour explorer le thème « Migrations et identité ».
Le Jeudi 6 février 2020, pour la première journée du Colloque de Ségou sur le thème « Migrations et Identités », le centre Culturel Kôrè de Ségou a refusé du monde.
« ‘’Migrations et Identités’’ est un thème qui ouvre la réflexion sur la question de la migration. Comment trouver des solutions pratiques pour éclairer les décisions des gouvernants et de la société civile », a indiqué Mamou Daffé. Convaincu que la migration perçue par beaucoup de nos concitoyens comme la solution toute trouvée à nos difficultés, pourrait être une cause de certaines difficultés, le Directeur de la Fondation du Festival sur le Niger a salué toutes les éminences qui ont décidé de faire le déplacement de Ségou, en cette période cruciale pour notre pays, au nom du panafricanisme, pour qu’ensemble la réflexion soit conduite sur l’impact des migrations sur nos identités.
En sa qualité de parrain du Colloque de Ségou, Amadou Koita, ministre des maliens de l’extérieur, a estimé que le choix de la thématique démontre une fois de plus que ce festival n’est pas qu’un évènement ludique, mais aussi et surtout un espace d’échanges et une tribune d’expression des questions d’intérêt national.
Il a estimé que le phénomène migratoire constitue aujourd’hui un enjeu politique, socioculturel et économique majeur pour notre pays. Selon lui, les débats actuels sur les questions migratoires sont assez riches et ambivalentes parce que d’une part il y a une tentative de remise en cause d’un des plus vieux phénomènes qu’est la libre circulation des hommes, phénomène qui pourtant a contribué à la formation de la civilisation universelle et d’autre part la mondialisation qui se veut un processus d’intégration mondiale. « Les migrants constituent incontestablement le véritable vecteur de l’épanouissement culturel du monde. C’est pourquoi, nous saluons le choix de la thématique », a-t-il indiqué.
Avant de rappeler la réflexion d’un penseur. « Notre identité culturelle contribue à notre équilibre. Les personnes pouvant encore ressentir leur propre culture en tirent une force et voient leur moi s’accroître et par là deviennent plus résistants. Celles qui perdent leur identité culturelle en entrant dans un système autre par le bas de l’échelle se sentent dévaluées. Ceci nous fait dire que ce n’est en rien la pauvreté qui crée la misère, mais la perte d’identité culturelle, la perte de l’âme que nous considérons comme un véritable fléau », a-t-il indiqué.
Le Pr Lupwishi Mbuyamba de la République démocratique du Congo, après avoir mis un accent sur la complexité qu’il y a entre les migrations et les identités, a estimé que toutes les tentatives d’assimilation est une sorte de négation de l’identité du migrant. Mais, il a estimé qu’il y a eu et qu’il y a des mouvements de résistance à cette assimilation. Et, même souvent des initiatives de protestations et de survivance des cultures des migrants. « Les identités africaines cherches à s’intégrer dans le pays d’accueil. De telle sorte qu’on assiste à de nouvelles réalités », a-t-il déclaré. Avant d’estimé que les échanges entre les cultures et les civilisations, constituent le côté positif des migrations, car enrichissant pour la civilisation universelle.
Le Pr Mahamadé Savadogo du Burkina Faso, a estimé que le thème « Migrations et Identités », nous amène à nous interroger sur l’éventualité de la perte l’identité lors du phénomène migratoire. Selon lui, le thème ainsi présenté semble attirer notre attention sur la menace de la perte de l’identité à cause de la migration. « Au-delà de l’attachement à l’identité, elle ne cesse jamais d’évoluer et de se transformer au contact de l’identité de l’autre », a-t-il déclaré en substance. Avant d’ajouter que l’identité se transforme à l’échelle de l’individu et à l’échelle de la société. Pour cela, il a indiqué que l’identité construite prend le relais de l’identité reçue de la culture. Il a attiré l’attention de l’assistance sur la relation de conflit et de tension entre le dominé et le dominant. Et, au regard de tout cela, il a estimé que la lutte pour son indépendance et pour sa liberté, permet de forger une identité. « L’enjeu, c’est notre libération et notre indépendance », a-t-il déclaré. En conclusion, il a estimé que l’identité peut se perdre. Mais, selon lui, ce n’est pas fondamentalement la perte de l’identité qui pose problème, mais c’est la perte de son indépendance.
Assane Koné