Sélectionnée parmi les dix (10) artistes de l’exposition internationale de Ségou’Art 2021, la jeune photographe malienne, Mariam Niaré, s’est invitée dans le cercle restreint des trois meilleurs artistes distingués en décrochant le 2e prix dénommé “Grand prix de la Fondation du Festival sur le Niger”. Avec sa série de 5 toiles surgi d’une photographie d’art “innovante” intitulée “Piégé par mon suceur”, elle subjugue le jury et s’attire les projecteurs.
La série “Albinos” de Mariam Niaré exposée à l’Inter-biennale de la photographie de Bamako en décembre 2020 semblait déjà annoncer les couleurs tant elle avait subjugué les amoureux de l’art, et notamment de la photographie, par sa qualité et son sens engagé pour la cause des personnes des atteintes de l’albinisme. Ces personnes “noires de peau blanche” font l’objet de rejet où de sacrifice rituel dans nos sociétés. Un combat que la jeune artiste mène corps et âme depuis l’aune de sa jeune carrière, à travers ses clichés. Ses séries ” ” Regarde-moi” et “Danaya” en sont de belles illustrations.
D’un père artiste peintre sortant de l’Institut nationale, Mariam Niaré voit le jour en 1997 dans la capitale malienne. Elle est passionnée de photographie depuis sa tendre enfance : “J’avais un petit appareil numérique offert par mon père parce que j’utilisais tout le temps l’appareil photo de son téléphone. Avec ce petit appareil, je m’amusais tout le temps à faire des photos. Je m’intéressais aussi à des magazines de mode qu’avait ma mère où il y’avait des stars magnifiées par une belle photographie. Tout ça m’a donné envie de faire de la photographie”, se remémore la jeune photographe qui bénéficie du soutien de son père dans cette démarche.
Ainsi, après l’obtention de son baccalauréat en 2016, “Mamou”, comme on l’appelle affectueusement, passe avec succès le concours d’entrée au Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasséké Kouyaté de Bamako (Camm-Bfk) où elle s’inscrit naturellement en section multimédia. Elle en ressort trois ans plus tard (2019) avec une licence professionnelle.
Cependant, durant son passage au Camm-Bfk, Mariam participera à de nombreux workshops avec le photographe espagnol Hector Mediavilla. Suivront ensuite beaucoup d’autres formations comme celle en lumière naturelle avec le photographe Français Jean Michel Fickinger.
Cependant, toutes ces formations ne l’empêcheront de partir à la conquête d’autres connaissances dans son domaine. Elle intègre ainsi le collectif Yamarou Photo où elle bénéficiera des ateliers de formation avec des photographes connus comme les Sud-africains Buyaphie Mdledle, Thandile Zwelibanzi et Jabulani Dhlamini, entre autres, en photographie documentaire, conceptuelle, photographie d’art.
La quête de savoir et de nouvelles perspectives dans la photographie conduit Mamou dans d’autres collectifs d’artistes comme Sanou’Art, un collectif de jeunes artistes peintres, sculpteurs, designers, et photographe tous sortis du Camm-Bfk. C’est là que l’idée de la photographie d’art lui est venue. Depuis, elle décide d’explorer cet autre univers innovant de la photographie, se démarquant ainsi de nombreux photographes restés figés dans la photographie de la réalité ressassée, “du déjà-vu”.
Depuis la découverte de cette nouvelle démarche, la jeune dame s’est frayé un chemin sur la scène de la photographie malienne en participant à quelques expositions-phares, notamment en 2020 comme Ségou’Art, Quartier libre (résidence et exposition) 60 Art Independence, Les Rencontres de la photographie de Bamako. Mieux, elle expose à Home Museum du Nigeria après une co-création avec Photolagos 20.
Sa série “Piégé par son suceur”, consacrée par le Grand prix de la Fondation du Festival sur le Niger, est une démarche innovante qui brise un certain mimétisme en alliant l’art et la photographie. Ladite série est composée de cinq photographies et présentent un personnage piégé par ce que l’on peut appeler les “suceurs” dans notre société : ce sont ces marabouts, politiciens, pasteurs, donsos (chasseurs) qui s’adossent à leur position sociale pour manipuler des personnes parfois déboussolées en quête d’un sens à leur vie.
Sur les cinq (5) photographies, trois éléments dominent la scène : le personnage (noir) habillé d’un boxeur rouge (symbole de la souffrance) tente de s’échapper de ses suceurs représentés par un cercle de forme ovale, tout sur un fond noir. “La jeune artiste prouve que la photographie n’est pas seulement une reproduction du réel, mais peut être le fruit d’une construction et d’une mise en scène”, confie le célèbre critique d’art Simon Njami, membre du jury de Ségou’Art 2021.Avec ce prix de la Fondation Festival sur le Niger, Mariam Niaré bénéficie d’une enveloppe de 500.000 francs Cfa et une résidence de quinze (15) jours qui sera suivie d’une exposition à Ségou. Youssouf KONE