La Fédération Conseil des Mariannes du Mali avec le soutien des amis du Burkina Faso a rénové la place des martyrs de Thiaroye pour un coût de 5 millions de F CFA. Cette action, selon les organisateurs, est un devoir de mémoire et de célébration faite à l’honneur des tirailleurs africains, massacrés pour avoir réclamé leurs droits. La cérémonie a été présidée par le directeur général de la gendarmerie, représentant le ministre de la Défense et des Anciens combattants, le Colonel-major Sambou Minkoro Diakité.
Ce monument situé en plein centre-ville de Bamako a été inauguré en décembre 2001 par le Président Alpha Oumar Konaré. Il rappelle le massacre qui a provoqué une prise de conscience de l’état d’inégalité profonde dans lequel la colonisation maintenait les indigènes. Son souvenir reste vivace dans les années qui suivent et jusqu’à nos jours.
En août 2004, la journée du 23 août est déclarée Journée du tirailleur sénégalais par le Sénégal, qui invite les autres États d’Afrique d’où étaient originaires les tirailleurs. La présente cérémonie a été l’occasion pour un appel aux dons pour l’édification d’un mémorial et la création du Musée national à la mémoire des tirailleurs africains et autres morts pour la France lors des guerres de 1914-1918 et de 1939-1945, pour promouvoir la mémoire, œuvrer contre l’oubli et le sacrifice de ces héros de France venus d’Afrique.
Il faut rappeler que le massacre de Thiaroye est un massacre qui s’est déroulé dans un camp militaire de la périphérie de Dakar au Sénégal le 1er décembre 1944. Les troupes coloniales ont tiré sur des tirailleurs sénégalais qui manifestaient pour le paiement de leurs indemnités et le versement du pécule qui leur était promis depuis des mois. Ils sont morts nombreux, de diverses nationalités pour leurs droits et fusillés à Thiaroye par l’armée coloniale française et leur nombre fait encore mystère. Ils venaient du Dahomey (actuel Bénin), du Soudan Français (actuel Mali), de la Côte d’Ivoire, de l’Oubanguichari (actuelle République Centrafricaine), du Niger, du Tchad, du Gabon et du Togo. Tous Africains noirs, tirailleurs africains et fauchés au seuil de la vie. Leur revendication était autour du versement d’un pécule constitué de leurs arriérés de solde (un quart payable avant embarquement), la prime de démobilisation, le retrait de l’argent économisé sur des livrets d’épargne. Dans son intervention, le représentant de la Fédération conseil des Mariannes du Mali, Harouna Barry, a laissé entendre qu’il reste beaucoup à faire sur le plan mémoriel. « Les condamnés du procès du 6 mars 1945 considérés comme les meneurs, à des peines allant de un à dix ans de prison ont été graciés par le président Auriel en juin 1947, mais pas amitiés », déplore-t-il. A l’entendre, ces derniers avaient été amendés à 1000 francs de l’époque et avaient perdu aussi leurs droits à l’indemnité de démobilisation. « Il y a donc une réparation matérielle aussi à faire », lance-t-il. Pour lui, il s’agit de réparer une injustice et saluer la mémoire d’hommes qui portaient l’uniforme français et sur lesquels les français avaient retourné leurs fusils.
La cérémonie a été également marquée par le dépôt de gerbes de fleurs en la mémoire des fusillés de Thiaroye par le directeur général de la Gendarmerie, représentant le ministre de la Défense et des Anciens combattants. Ce dernier a salué cette initiative de la Fédération conseil des Mariannes du Mali. Cet esprit de sacrifice a fait que nous les héritiers de ces tirailleurs, sommes fiers, dit-il.
Dans son témoignage, un ancien combattant a rebondi dans le même sens en saluant la rénovation de cette place combien importante pour l’histoire de l’Afrique en général et celle du Mali en particulier. « Cette place était laissée à la merci des bandits de Bamako, mais aujourd’hui avec cette rénovation, nous pouvons espérer le début du commencement d’un devoir de mémoire envers les vaillants hommes qui ont donné leur vie pour l’indépendance de l’Afrique », a-t-il conclu.
Ibrahima Ndiaye