Artiste peintre de renommée internationale, Kadioura Coulibaly fait la fierté de l’Afrique culturelle. De ses recherches sur les costumes et accessoires du continent, la technique du bongolan s’enseigne à l’Institut National des Arts (INA) et s’exporte à travers le monde. Les films africains, tels que les rois de Ségou, gagnent de façon vertigineuse en audience et valorisent ce que le continent a de plus cher et plus authentique : La culture.
L’Enquêteur : Bonjour qui est Kandioura Coulibaly ?
Kandioura Coulibaly : Je m’appelle Kandioura Coulibaly. Je suis marié père d’une fille et de plus de 6 enfants adoptifs. Je suis artiste peintre sortant de l’INA. Actuellement en service au Centre National de Cinématographie Malien. Je suis également décorateur et costumier. J’ai travaillé dans beaucoup de grands films du Mali. Je fais beaucoup de recherches sur le bogolan. Je suis le président du groupe BOGOLAN KASOBANI qui a permis au monde de connaitre l’existence du bogolan au Mali. Les recherches ont débuté depuis 1978. Aujourd’hui je me penche sur les accessoires et les tresses.
L’Enquêteur : Vous avez un salon avec un décor particulier. Pouvez-vous nous le décrire à nos lecteurs ?
Kandioura Coulibaly : Ce salon, c’est tout ce qu’il y a comme artisanat. Nos artisans n’ont pas écrit mais ils ont fait. Et chaque objet du salon émet un message. Chaque objet artisanal est fait pour protéger l’homme africain. Donc chaque objet ici est témoin d’une vie.
L’Enquêteur : Vous avez plusieurs cordes à votre arc. Sous quel aspect devrions-nous vous apprécier ?
Kandioura Coulibaly : En général je travaille pour le peuple. C’est à lui de me classer. Je me vois comme un ouvrier de la culture.
L’Enquêteur : Aujourd’hui vous avez plusieurs dons à revendre mais lequel de vos talents vous permet de valoriser d’avantage la culture malienne ?
Kandioura Coulibaly : Bon ! Je suis comme un maillon dans cette chaîne. Par exemple dans le cinéma mon travail me pousse à habiller culturellement le rêve des réalisateurs dans les films. Il me faut faire des recherches pour retrouver les instruments culturels qui se collent à l’époque de l’histoire notamment, les costumes, les accessoires, les décors appropriés. A chaque plan d’un film, c’est comme une exposition d’un tableau du Mali. Donc, moi je m’efforce à faire voyager le pays à travers le monde. Quand on arrive à saisir les valeurs, la culture d’un peuple on s’y attache et on lui voue de l’estime, c’est donc ça, le sens premier de mes recherches.
L’Enquêteur : Pouvez-vous être un peu plus explicite ?
Kandioura Coulibaly : Qu’est ce qui se passe actuellement ? Actuellement le monde est confronté à une lutte culturelle. Où l’autre nous impose sa façon de manger, de s’habiller en détruisant la nôtre. Et quand il arrive à nous déshabiller culturellement, il nous a saisi, il nous a pris, il nous a dominé, il a une force qui fait que nous devenons ses adeptes et nous nous perdons. Aujourd’hui la jeunesse doit refuser cela. Il faut que les médias et les hommes de culture s’investissent à protéger notre culture et mieux, à la pousser vers le monde extérieur. Je crois que nous avons encore la chance de relever le défi car notre culture continue de vivre. Elle n’est pas complètement morte, aussi nous nous devons de la saisir et la retravailler et la connecter au monde. Et c’est ce que j’essaie de faire en travaillant dans les films. C’est le cas du film « les rois de Ségou » qui jouit de la première audience des réalisations africaines sur TV5. Je conclus en disant que dans ce monde moderne, il faut qu’on trouve notre place. Et notre place, n’est rien d’autre que la valorisation de notre culture.
L’Enquêteur : Outre les rois de Ségou quels sont les autres films dans lesquels vous avez apporté votre savoir-faire d’artiste?
Kandioura Coulibaly : Sans fausse modestie, je dirai que c’est grâce à mon travail qu’il a été créé le prix des meilleurs costumes et décors au FESPACO. Sinon ça n’existait pas avant NIJUGU GUIMBA ou « GUIMBA Le Tyran » de Cheick Oumar Sissoko. Et ce film m’a permis d’avoir le premier prix du meilleur costumier et meilleur décor à Ouagadougou. Le prix de meilleur costumier et meilleur décor en Afrique du Sud. Je peux citer entre autres films, TAFE FANGA de Drabo, LA PRISE DE SAMAYANA de SIDY DIABATE. Il y a aussi des films occidentaux dont j’ai assuré le décor. J’ai eu un autre prix à la biennale de la Havane.
L’Enquêteur : Parlez-nous maintenant du talentueux peintre qui est en vous.
Kandioura Coulibaly : J’ai fait beaucoup de tableaux. Je travaille avec le groupe BOGOLAN KASO qui, créé par 6 personnes s’est investi depuis 1978 dans la recherche du bogolan. Et grâce à ses résultats le bogolan est enseigné en l’Institut National des Arts. Nous avons exposé presque dans le monde entier. L’année dernière à pareil moment j’étais à Alabama. Il y a deux ans j’étais à Michigan. J’ai été le décorateur en chef du folklive festival à Washington. J’ai exposé en France, en Allemagne, en Suisse, en Yougoslavie, au Japon et dans beaucoup d’autres pays pour diffuser la technique du bogolan. Que dis-je, de la culture bogolan. Je dirais même que le bogolan est un cheval qui me permet d’aller partout dans le monde parler du Mali. D’aller parler de l’homme noir. Parce que le ‘’bogo’’ c’est l’argile et l’homme est l’argile et l’eau. En plus de cela, je m’investis dans la recherche et la valorisation des perles et les bijoux. Si nous restons dans la profondeur de notre couleur noire et donner la clarté de notre culture au reste du monde, je pense que nous auront gaillardement notre place dans le monde. Pour y arriver il faut que nos dirigeants et tout le monde mettent la main à la patte.
L’Enquêteur : Justement parlant de dirigeants qu’est ce que Kandioura Coulibaly, le soldat de la culture africaine, attend des autorités ?
Kandioura Coulibaly : Je pense que les dirigeants restreignent la richesse du Mali aux ressources minières, au coton, aux industries, en sommes aux biens matériels qui malheureusement sont à partager avec les autres. Alors que notre culture est à nous et nous seuls et c’est cela que nous devrions valoriser. Si on la néglige on devient des chauves souris. On n’est ni avec les oiseaux, on n’est ni avec les animaux. Quand tu vois le budget alloué à la culture au Mali, cela laisse à désirer. On a un ministère de la culture mais personne ne voit ce qu’ils sont entrain de faire pour revaloriser la culture.
L’Enquêteur : Est ce que l’état reconnait l’effort que vous faites pour la valorisation et la promotion de la culture ?
Kandioura Coulibaly : Oui. L’état a reconnu et l’état continue de le reconnaitre car pour moi l’Etat c’est moi, c’est toi, c’est lui, l’Etat c’est tout le monde. La reconnaissance, c’est de faire votre travail de journaliste comme vous êtes entrain de le faire. C’est dire que chacun doit faire son travail comme il se doit. De façon générale, les artistes peintres ne sont pas considérés parce que notre matière première c’est l’image. Or, le Mali est un grand pays d’oralité où l’image n’est pas facile à lire. Ellen’est pas donnée à tout le monde sauf les grands initiés. Et puis, nos leaders sont sensibles à ceux qui les flattent, les griots par exemple qu’à ceux qui dessinent. Tu peux aller dans les bureaux même des ministres, tu verras rarement des tableaux pourtant c’est à eux de mettre l’art en valeur.
Ange De VILLIER
Ce Monsieur Kandjoura est le meilleur costumier du MONDE.
Mais le Mali s en fout des meilleurs.
GORONGO
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