Mais il y a fort à craindre que le mérite ne s’arrête là car le Festival tarde à prendre son envol. L’une des plus grandes surprises est le faible engouement des populations de Kayes et même de la cité de Médine pour l’évènement. La promotrice, Mme Gueguen Alice Dakouo l’a elle-même reconnu en mentionnant que «les populations n’y adhèrent pas encore». Dans la capitale des Rails, ils sont très nombreux, jusque dans les rangs des notabilités locales à être informés de la tenue du festival par des visiteurs venus de Bamako et d’autres horizons. En faisant une petite comparaison avec le Festival sur le Niger, l’on se rend facilement compte que le fossé est grand par l’expertise et par l’envergure.
Une raison de croire que les grands projets n’ont pas besoin que d’ambition et d’une fabuleuse conception pour être viables. Son succès réside également dans la démarche. Visiblement, cette dernière fait défaut à Mme Gueguen. L’on ne s’étonnera donc pas de ne pas voir un représentant du ministère de tutelle. C’est le chef de la Mission culturelle de Kayes, Guemo Kassogué, qui comblera ce vide à la dernière minute, au nom du département. C’est lui d’ailleurs, à la veille de l’ouverture officielle, qui va esquisser un projet de discours pour le Directeur de Cabinet du Gouvernorat qui devait présider la cérémonie d’ouverture officielle à Médine. Or, c’est aux organisateurs que revient cette tache.
Bref, la cacophonie semble être la véritable invitée d’honneur. Signe que ses ancêtres Bobos des grands évènements n’étaient pas à son rendez-vous, le Gouverneur était également absent en raison d’un séjour à Bamako. Même les autorités religieuses et coutumières n’ont joui d’aucune visibilité. Ont-elles boudé l’évènement ? En tous les cas leur présence n’a pas été signalée au public. «Je viens au festival, pas parce que je suis invité, mais parce que je suis natif de Médine », confie un cadre bien connu à Bamako. Ce dernier dit regretter l’attitude cavalière de la promotrice. Si le Maire de la commune de Hawa Dembaya (pour Médine) Ibrahim Sarr a été présent tout long de l’évènement, celui de la commune urbaine était absent. Alors que la remise des trois véhicules à la Protection civile s’est déroulée chez lui. L’amertume non dissimulée de Mme Gueguen est aussi la preuve que ce n’est pas encore la grande communion. Dans un discours dont les lignes cachaient difficilement sa colère, elle en voulait presque aux populations qui ne se sont toujours pas appropriées l’évènement à hauteur de souhait. En tout cas, pas à son goût. Et comme message pour les éditions à venir, la promotrice souhaite que les populations « comprennent que ce n’est pas un problème de personne» car estime-t-elle, « même si l’évènement s’arrêtait là, les actions sont largement au-delà du festival ».
L’autre preuve de sa frustration est qu’elle a consacré une bonne partie de son allocution à expliquer le succès du festival de Ségou qui, selon elle, est dû à la proximité de cette ville d’avec Bamako. Celui moins important de Kayes-Médine-Tamba se déroulant à plus de 600 Km de la capitale, s‘en trouve, selon elle, pénalisé. Avec tout le potentiel historique dont regorge cette zone connue pour être la porte d’entrée du colon au Soudan et où se côtoient de nombreux vestiges de cette époque, dix ans d’expérience auraient pu projeter ce rendez-vous culturel beaucoup plus loin que là où il se trouve aujourd’hui.
Idrissa DICKO