Festival de Cannes, «Timbuktu» nominé pas vainqueur

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Abderrahmane Sissako : "Au Mali, les Touaregs sont à voir comme des victimes"
Abderrahmane Sissako à Paris, le 8 mai. © Vincent Fournier pour J.A.

Donné grand favori pour s’offrir la prestigieuse Palme d’Or avec son film «Timbuktu» au 67ème Festival de Cannes 2014, le réalisateur mauritanien, Abderrahmane Sissako, à la grande surprise du public, a dû se consoler avec le Prix François Chalais. Seul cinéaste africain retenu pour la course à la Palme d’Or, le jury a tranché en faveur du cinéaste turc, Nuri Bilge Ceylan, Palme d’or pour «Winter Sleep». Que s’est-il passé derrière les coulisses ? Sissako a-t-il fait les frais d’une overdose médiatique mal interprétée par le select jury de Cannes ? 

«Timbuktu» ou l’inattendu hara-kiri du jury. Présenté comme le grand favori de cette 67ème édition du Festival de Cannes, le film «Timbuktu», du célèbre réalisateur mauritanien, Abderrahmane Sissako, seul cinéaste africain short-listé dans la compétition de la Palme d’Or, n’a pas au finish été retenu. Le jury présidé par la cinéaste néo-zélandaise Jane Campion a décerné la prestigieuse Palme d’Or 2014 au cinéaste turc, Nuri Bilge Ceylan, qui mettait en jeu son film «Winter Sleep». Aussitôt, après l’annonce de ce sacre, beaucoup de voix se sont élevées à Cannes et dans les milieux connectés du cinéma, ne comprenant pas la décision du jury d’attribuer la Palme d’Or à «Winter Sleep», devant un best film, «Timbuktu», qui fait l’unanimité depuis sa sortie, du Mauritanien Abderrahmane Sissako.

 

La thèse de filer cette prestigieuse distinction à «Winter Sleep» n’est pas plausible, estiment la plupart des initiés. Il n’y avait pas photo entre le récit poignant d’un drame sociopolitique qui se passe au nord du Mali, il y a seulement un an, et les misères d’une vie d’une société turque déchirée par deux lignes, le goût d’une bourgeoisie ostentatoire et la pauvreté qui se clochardise. À l’évidence, les dessous de ce verdict du jury sont pesants. Que s’est-il donc passé entre-temps ?

 

Le verdict s’est-il joué d’avance dans le grand secret du select jury qui a zoomé plus dans les méandres de la société turque que celle de cette partie du Sahel, livrée aux canons et fatwas morbides des groupes rebelles armés qui avaient pour seule intention de dévisager cette symbiose parfaite de vie, d’histoire et de culture transsaharienne. En voyant filer entre les mains ce prix, c’est l’Afrique qui perd la bataille face à un pays d’obédience islamique qui lorgne d’intégrer l’espace européen. «Timbuktu» a-t-il fait les frais de l’overdose médiatique ou de l’orgueil du jury au point de zapper Sissako Abderrahmane ?

 

Pour sauver l’honneur de tout le continent africain, le cinéaste mauritanien s’est vu attribuer le Prix François Chalais (18e édition) du nom du réalisateur et journaliste français. Le jury composé de Mei-Chen Chalais, Sophie Agacinski, René Guitton, Albert Mathieu, Olivier Mazoyer, Bob Swaim et Nicolas Henry a décidé de décerner ce Prix au film «Timbuktu» pour le combat humaniste porté par son réalisateur, le Mauritanien Abderrahman Sissakoe.
PAR ISMAEL AIDARA, RÉDACTEUR EN CHEF DÉLÉGUÉ (  Les Afriques ) 

 

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