Personne ne rate, sous aucun prétexte, la fête populaire. Il s’agit en réalité d’une fête traditionnelle vieille de plusieurs décennies, et qui a été transformée en festival.
En plus des ressortissants du village installés ailleurs, les populations des villages et quartiers environnants sont invitées à cette célébration. Ils viennent de Samé, Grinkounbé, Niomyrambougou, Samakoro, Lassa, Sirakoro dounfing, Babougou, Kati, Taliko. L’intérêt de cette fête découle de son organisation à la veille de l’hivernage. C’est une occasion pour implorer les génies afin que l’hivernage soit propice. Le jour de l’événement solennel, dès l’après midi, la place publique décorée aux couleurs nationales était bondée de festivaliers. Partout régnait une atmosphère de gaité : les femmes sont parées dans des tenues uniformes, les organisateurs en T-shirt frappés aux cigles du festival, des officiels et des anciens du village s’installaient sous deux hangars encadrant la place publique. Parmi eux le chef de village de la localité Famolo Coulibaly et celui de Niomyrambougou, Boubacar Diarra. La place publique est devenue noire de monde. La foule était estimée à plus de 2000 personnes. Derrière un paravent en tara se préparaient les porteurs de masques et leurs guides, à l’abri des regards indiscrets. Quand le soleil a commencé à décliner, aux envions de 16h 30, les masques ont commencé à égayer la foule. Le couple Nama, est le premier à se montrer. Il a le pouvoir de chasser les mauvais esprits afin que la fête soit belle. Les autres masques très divers, des homomorphes et des zoomorphes dansèrent ensuite pour le plus grand plaisir des spectateurs : Moriba (nom propre), Djama Djigui (espoir du peuple), Konomani (femme enceinte), Filaniw (jumeaux) ; et N’Tomo (société initiatique), Waraba (lion), Kono (oiseau), Sagadjiguiba (bélier), Djinè Zan et Djinèdew (djin). Chacun dansait sur un rythme particulier accompagné par un chant . Le son du tam-tam et la voix sublime de Mamou Coulibaly, la chanteuse du village, électrisaient la foule et les masques eux-mêmes. Chaque masque joue un rôle spécifique au niveau de la société. Ces figures ésotériques défendent les causes féminines, protègent le village des maladies et des calamités, favorisent la bonne récolte. La sortie des masques « Kono » (l’oiseau) a suscité une grande effervescence dans l’assistance. De temps en temps, quelques danseurs quittent le rang des spectateurs pour se propulser sur la scène. Ils accompagnent et encouragent les masques. Le couple Kono a emporté la palme de la popularité tant les accompagnateurs occasionnels étaient nombreux. Leur vivacité, leur force et leur rigueur ont été très appréciées par les spectateurs. Leurs costumes sont des assemblages de morceaux de tissus truffés de plumes d’oiseau. Le président de l’Association des masques et marionnettes de Koulouninko (AMMK), Adama Bakary Coulibaly, a vivement encouragé les jeunes à sauvegarder ce festival. Les ancêtres ont initié cette activité pour les jeunes. C’est une occasion pour les adultes et les jeunes de se réunir pour implorer les mannes des ancêtres à l’approche de l’hivernage pour avoir une bonne pluie. Tous les jeunes participent à l’organisation matérielle, financière. Ils cotisent tous à partir de 15 ans pour faire face aux dépenses de la manifestation annuelle. Cette contribution symbolise l’engagement des jeunes à pérenniser un esprit de solidarité et de partage dans le village. Durant toute la soirée, l’air du village vibrait de louanges des masques et des marionnettes. Les masques ont toujours eu une place importante dans la société malienne et africaine. Ils représentent les divinités dans la cosmogonie Bambara. Ils servent à déchiffrer l’avenir. Ils protègent la population contre le mal.
A. SOW