La semaine dernière, une information militaire, du moins rocambolesque, faisant état d’une tentative de déstabilisation des institutions de la République a fait le tour du Mali. Aujourd’hui, ils sont nombreux, les Maliens à se poser la question si les arguments avancés sont convaincants.
Depuis la défaite de notre «vaillante» armée à Kidal le 21 mai dernier, le pouvoir tente de trouver les causes et manœuvre pour camoufler cette énième humiliation.
Désemparées, les plus hautes autorités se sont mises à chercher le responsable qui a donné l’ordre d’attaquer le gouvernorat de Kidal où se trouvent les enfants chouchous des maîtres français, le Mnla.
Le lendemain de la défaite, le Premier ministre Moussa Mara rencontre la presse pour se justifier :«l’ordre d’attaquer Kidal n’émane pas d’une décision politique». Or, l’affrontement entre l’armée régulière et les groupes armés fait suite à une décision politique. Car, selon lui, le Président lui a instruit d’effectuer le déplacement sur Kidal afin de s’assurer du redéploiement de l’administration. C’est à la suite de ce « festival» que les évènements ont eu lieu. Mais finalement, la question a trouvé une réponse. Aux yeux du gouvernement et de la commission défense de l’Assemblée nationale, c’est le ministre de la Défense et des anciens combattants, Soumeylou Boubèye Maïga, qui a donné l’ordre.
Ainsi, il est démis de ses fonctions par le Président IBK. Ce dernier se sentant utilisé comme bouc émissaire improvise un forum des femmes de son parti(Asma) sur le rôle des femmes dans la résolution de la crise. C’était pour lui l’occasion de se défouler. A demi-mot, il a indexé le Premier ministre d’être responsable de la déconfiture de l’armée à Kidal. Mieux, ses critiques n’épargnent pas le président IBK. «Nous ne laisserons personne tirer un quelconque gain politique personnel de la tragédie que nous avons vécue. Si l’on veut se faire voir de tous et se faire entendre par tous, on oublie ce qu’on a dit et ce qu’on a fait. »
Pour permettre au peuple de savoir ce qui s’est passé, il instruit aux députés de son parti de concerter leurs alliés de groupe parlementaire «APM» pour instaurer une commission d’enquête parlementaire sur les faits, afin que le peuple sache celui qui a envoyé les messages via les portables et les coups de fil passés sur le terrain le jour des événements.
Ces propos éclaboussent le sommet de l’Etat. On s’est trompé de cible, imaginent les autorités. Il faut donc trouver autre chose pour dissimuler les événements de Kidal. Faire oublier au peuple cette tragédie. Entre temps, une affaire surgit et fait la une des journaux. Il s’agit d’une «tentative de déstabilisation des institutions de la République». Les journaux ont passé le reste de la semaine à commenter ce sujet.
Selon les informations de sources militaires distillées ça et là, loin d’être un enlèvement comme l’avait précisé un membre de la famille du lieutenant jeudi, il s’agit d’une mise aux arrêts de Mohamed Ouattara et de quelques sous-officiers dans la nuit de mercredi à jeudi 5 juin par les forces spéciales maliennes. On leur reproche de vouloir déstabiliser les institutions de la République et d’atteinte à la sûreté de l’Etat.
Les services de renseignements, alertés par l’affaire, ont remonté par leurs investigations jusqu’au lieutenant Ouattara et au sergent-chef Sylla. Une enquête judiciaire devrait déterminer les autres membres de la conspiration et nous en dire plus, précisent les mêmes sources.
Malgré l’insistance des sources, le peuple continue à se poser la question sur la véracité de cette information. Car, vu ce qui est arrivé à l’aventurier auteur du coup d’Etat du 22 mars 2012, Amadou Haya Sanogo, et vu la présence massives des forces internationales au Mali, il est aujourd’hui difficile pour l’opinion publique d’accorder de crédit à cette affaire de déstabilisation de notre pays.
Oumar KONATE