Sortie de crise au Mali : Empêcher les militaires de garder les commandes de la transition

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Trois jours après le coup d’État qui a déposé, le mardi 18 août 2020, le président Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK), le visage de la  junte militaire qui a pris le pouvoir à Bamako, commence à se dessiner.

En effet, à la suite du colonel Ismaël Wagué qui assume le porte-parolat des putschistes, le colonel Assimi Goïta, commandant des forces spéciales et pur produit de l’école militaire de Kati, est sorti de l’ombre pour enfiler le costume de chef du Comité national  pour le salut du peuple (CNSP) à l’origine du coup de force. Se voulant rassurant, les hommes en treillis qui assurent ne pas tenir au pouvoir, se sont inscrits dans la logique d’une transition civile, en promettant la tenue d’élections dans les plus brefs délais. La question que tout le monde se pose, est la suivante : quel crédit accorder à ces hommes en uniforme qui ont plus d’une fois, prouvé, au Mali comme ailleurs, qu’ils sont venus balayer la maison pour mieux s’y installer ?

Quoi qu’il en soit, réunis, le 20 août en sommet extraordinaire par visioconférence, les chefs d’État de la CEDEAO se sont voulu fermes sur le coup d’État qui est unanimement condamné par la communauté internationale et ne comptent pas transiger sur le rétablissement de l’ordre constitutionnel.

En plus de jouer sa crédibilité, la CEDEAO veut éviter d’ouvrir la boîte de pandore des changements anticonstitutionnels

C’est ainsi qu’en plus de l’isolement du pays qui se voit fermées toutes les frontières de l’espace régional, il se dessine comme un blocus économique dicté par l’instance sous-régionale qui semble décidée à se donner les moyens de se faire respecter. Et on peut la comprendre parce qu’en plus de jouer sa crédibilité, la CEDEAO veut éviter d’ouvrir la boîte de pandore des changements anticonstitutionnels dans une sous-région à la stabilité davantage fragilisée par les questions sécuritaires en lien avec le terrorisme.   Dès lors, l’on peut se demander si les putschistes qui semblent avoir consommé leur coup et appellent à une reprise de la vie normale tout en multipliant les contacts à l’intérieur aussi bien avec les responsables administratifs que les leaders politiques, pourront tenir face à cette avalanche de sanctions dont l’objectif est visiblement de les contraindre à rendre le plus rapidement possible le pouvoir aux civils. Du même coup, l’on peut se demander si ce coup d’État est la solution au problème posé. Rien n’est moins sûr. Car, l’expérience du coup d’État de 2012 qui a pratiquement jeté le pays en pâture aux djihadistes, devait servir de leçon. En outre, l’opposition malienne, qui a milité dans le M5-RFP pour le départ d’IBK du pouvoir, reste à l’affût et garde une position de prudence pour ne pas se faire « voler sa victoire», même si elle s’est « félicitée du coup d’État ». C’est dire si le Mali n’est pas encore sorti de l’auberge. Et on attend de voir comment va s’ouvrir la Transition. Car, s’il est quasiment une certitude qu’IBK ne reviendra pas au pouvoir,  il n’est pas exclu que d’ici là, des divergences profondes entre les putschistes et ses thuriféraires apparaissent au grand jour. Le plus dur sera donc la mise en marche de cette transition, sans que le choc des ambitions et des intérêts partisans n’entravent le retour progressif à l’ordre constitutionnel normal.

Il faut travailler à sauver le Mali du chaos et surtout, à le remettre sur les rails de la vraie démocratie

C’est pourquoi il faut prendre les militaires au mot, dans leur volonté annoncée d’instaurer une transition civile. Il faut les empêcher de garder les commandes de la transition par des tours de passe-passe dont eux seuls ont le secret. Autrement, la joie des Maliens risque d’être de courte durée et le réveil pourrait être douloureux. On l’a vu au Soudan où, profitant de la grogne populaire, la soldatesque à la solde du président Omar El Béchir, a poussé le dictateur à la sortie pour ensuite confisquer la transition à son profit, au grand dam des contestataires dont les manifestations avaient fortement fragilisé le régime de Khartoum. C’est pourquoi, au-delà des sanctions, il faut travailler à sauver le Mali du chaos et surtout, à le remettre sur les rails de la vraie démocratie. C’est le seul combat qui vaille la peine d’être mené aujourd’hui. Mais la tâche paraît difficile tant que le Mali n’est pas débarrassé de la vieille classe politique qui a montré ses limites. Car, on aura beau changer les hommes, tant que la classe politique ne changera pas de paradigme pour s’inscrire dans la logique d’une gestion du pouvoir axée sur l’intérêt de la Nation au détriment des intérêts personnels, la situation ne changera jamais. Et l’histoire risque de se répéter. Il est temps d’y mettre le holà. C’est tout le mal que l’on souhaite à la CEDEAO qui, malgré ses propres  limites, est bien dans son rôle en cherchant à prévenir les risques d’une contagion sous-régionale avec le cas malien.

Cyrille Coulibaly

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11 COMMENTAIRES

  1. Verite tu sais tres bien que du temps de Boua le ventru IBK les investisseurs etaient partis pour 2 raisons: la corruption generalisee et l’insecurite epidemique. L’allemagne, le FMI, la Banque Mondiale, etc. l’ont clairement qu’avec l’absence de securite et la rande corruption les investisseurs sont partis. Donc nous sommes certains que si la paix revient avec la securite et le pays a demontre un control sur la corruption, en un mot la bonne gouvernance, les investisseurs vont revenir que le pays soit dirige par des militaires ou des militiares/civils. Rappelons que le Mali etait bloque et le “coup d’état” etait la seule solution de sortie de crise. Personne meme ceux qui ont fait le “coup d’état” ne veut faire de “coup d’état” mais avec un president IBK tresincapable, gros nullard, tres faineant et tres incompetent, il n’y avait pas d’autres choix.

  2. Si les Militaires dirigent cette Transition c’est le moindre mal comparé a celui des politiciens qui ont atteint leur limite. Les civils essayeront d’octroyer le fauteuil a leur partisan a la fin de la transition. Aucun responsble de parti politique, aucun ancien ministre partisan ne doit figurer dans le gouvernement de transition. Cette transition doit faire beaucouo de nettoyage de nos textes et aussi la constitution que seule un militaire entouré de bons fonctionnaires non partisans peut conduire sans partie-pris.

    • Ces militaires dont vous minimisez aujourd’hui valent mieux que ceux qui se sont fait élire par le bourrage des urnes, le pillage des ressources du pays , la corruption, etc…. Jamais le Mali n’a connu un President insouciant , incompétent et vaurien comme IBK. De toutes les façons ces militaires patriotes sont venus mettre un terme à la souffrance des maliens . N’en déplaise aux détracteurs qui changent de partis politiques comme des chemises .

  3. Dans certains commentaires,il est aisé de constater que ce sont les partisans d’IBK qui s’expriment.
    “On préfère mille fois ces militaires que vos soit disant civiles qui feront la même chose ou pire qu’Ibk”
    “On en a marre de ces civils fragiles trouillards corrompus des faiblards”
    ON A RAPPORTÉ AUSSI QU’IBK A DIT À CES JEUNES OFFICIERS SUPÉRIEURS DE NE PAS TRAVAILLER AVEC SES OPPOSANTS POLITIQUES.
    Ce n’est pas le Mali qui est invoqué dans ces commentaires,mais une haine contre des personnes qui ne partageaient pas la gestion clanique de l’État par IBK.
    ON OUBLIE FACILEMENT QU’UN MILITAIRE A GÉRÉ CE PAYS PENDANT DIX ANS, QUE SON MINISTRE DE L’INTÉRIEUR AU MÊME MOMENT ÉTAIT UN GÉNÉRAL TRÈS RESPECTÉ.
    Donc,on peut dire que la DÉCENNIE ATT était un régime militaire.
    Pendant l’ère démocratique, ce ne sont pas les civiles seulement qui ont géré le Mali.
    LES MILITAIRES ONT PARTICIPÉ À TOUS LES GOUVERNEMENTS DEPUIS LE 19 NOVEMBRE 1968.
    Ça ne s’est pas arrêté malgré le processus démocratique entamé le 26 MARS 1991.
    LE MALI EST L’UN DES RARES PAYS DÉMOCRATIQUES OÙ LES MILITAIRES CONTINUENT À PARTICIPER À LA GESTION GOUVERNEMENTALE.
    La logique démocratique recommande qu’on ne peut-être ministre qu’élu car un ministre est celui qui connaît d’abord les préoccupations de la population.
    ÉLU veut dire qu’une grande majorité de la population s’est vue en vos propos.
    DES MILLIERS DE MALIENS SONT SORTIS PLUSIEURS FOIS À LA SUITE DE L’APPEL DES MEMBRES DU COMITÉ STRATÉGIQUE DU M5 RFP, ON PENSE QUE LES MILITAIRES QUI ONT PROFITÉ DE CES MANIFESTATIONS POUR DÉPOSER LE PRÉSIDENT SONT PLUS LÉGITIMES.
    Qui connaissait ces militaires avant le 18 août?
    Ils ont même avoué qu’ils ne se sont jamais intéressés à la politique.
    Ce qui prouve qu’ils sont incompétents à gérer l’État.
    Un ancien président burkinabé a avoué qu’après leur coup d’État,ils ont nommé SANKARA premier ministre car il était le seul à s’intéresser à la politique.
    Il avait mûri des IDÉES pour aider son pays.
    Nos jeunes officiers supérieurs discutent politique avec un ancien président d’une grande nation africaine sans se faire accompagner de nos hommes politiques aguerris.
    Ils sont entrain d’aider le Mali?
    LA LOGIQUE DÉMOCRATIQUE VEUT QUE CHAQUE ACTE POSÉ PAR LA TRANSITION DOIT ÊTRE FAIT EN CONCERTATION AVEC LES ANIMATEURS DU M5-RFP PLUS COMPÉTENTS POLITIQUEMENT ET DOTÉS DE LA LÉGITIMITÉ POPULAIRE.
    Un homme politique qui s’enrichit indûment est plus utile qu’un militaire sérieux apolitique.
    Ce qui compte,c’est la compétence de l’homme politique.
    SA COMPÉTENCE POLITIQUE ACQUISE PENDANT PLUSIEURS ANNÉES SUR LE TERRAIN EST PLUS IMPORTANTE QUE SON INCLINAISON À PROFITER DE SA FONCTION POUR S’ENRICHIR.
    Ce sont les IDÉES qui font bouger les lignes,pas l’honnêteté de la personne qui anime la structure étatique.
    L’homme politique au contact de la population ne peut jamais manquer D’IDÉES.
    Vivement la création du conseil transitoire composé majoritairement des animateurs du M5-RFP pour permettre à notre pays d’affronter valablement la communauté internationale.
    Les hauts cadres que la communauté internationale envoie pour discuter au Mali sont des hommes politiques.
    ILS NE SONT PAS DES TRCHNOCRATES.
    Avec nos jeunes officiers supérieurs,le Mali n’est pas valablement représenté car des technocrates font face à des hommes politiques très aguerris.
    OSER LUTTER,C’EST OSER VAINCRE!
    La lutte continue.

    • @Sangare,
      Je ne suis pas un Pro IBK, mais un originaire du Mali qui se soucie de ce pays.
      J’ai travaillé pour de grandes institutions internationales, et connais un rayon de la géo politique et stratégie.
      Pensez-vous que des investisseurs et partenaires vont faire confiance à un pays dirigé par des putschistes? Non, ce temps est révolu.
      Aujourd’hui la Cédéao va densifier ses sections contre le Mali ainsi que la communauté internationale, et ce sont des maliens qui vont en souffrir. Les réalités économiques et de consommation d’aujourd’hui sont différentes de celles d’hier. La pression va perdurer, ça va être un désastre, et au final, ce sont des civils qui vont gérer cette transition.
      Quoi qui se passe, suite aux prochaines élections, le pouvoir va tomber entre les mains d’un homme qui est dans la politique malienne depuis 10-30 ans. Alors soyons réaliste, analyste et regardons la réalité en face.

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  4. ” … Sortie de crise au Mali : Empêcher les militaires de garder les commandes de la transition… ” … ///…

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    Non pas tant que la situation du pays, les conflits, et les Affaires du pays sont bien gérés… ! C’est pas souhaitable en tout cas, s’ils maitrisent la situation, d’empêcher les militaires de garder les commandes.
    Si tout ça est bien géré, pourquoi redonner ( aussi vite ) le Pouvoir à ceux qu’ont pas été capables de bien gérer le pays… ?
    Qui ont tellement mal géré le pays, qu’ils ont mis son existence en péril.

    Vivement le Mali pour nous tous.

  5. On préfère mille fois ces militaires au pouvoir que vos soit disant civiles qui feront la même chose ou pire que ibk.vous rappeler aussi que ces militaires sont des maliens, nos frères, pas des extraterrestres. Alors laissez les gérer tranquillement la transition. Ils plus vertueux que les sales hommes politiques actuels.

  6. Une junte qui n’a pas respecté sa parole donnée aux maliens lors de son premier discours, est-elle digne de confiance?
    Deux jours au pouvoir ont suffit pour qu’ils prennent la mouche. Maintenant ils veulent prendre la transition en otage et s’y installer pendant des années. Qui dit qu’ils ne vont pas vouloir rester, soit disant que leur travail n’est pas fini après 2 ou 3 ans de pouvoir.
    Incompréhensible, des chefs de guerre d’un pays en guerre qui veulent troquer leurs treillis avec des costumes larges pour eux.
    On a vu les Sanogo comment ils ont pillé le pays. On a vu des militaires hauts gradés comme Salif, Moussa Diawara et Dairou Dembélé avec le pouvoir d’IBK. Ils ont fait plus de dégâts que n’importe quelle autre personne. Et pourtant ces putschistes ne sont pas mieux formés que ces gens ou plus diplômés. Alors attention, essayons des civils comme Tam Tam Ly, Igor Diarra, Malick Coulibaly, Kaou Djim, Oumar Mariko, Moussa Mara et 2 militaires + de jeunes maliens bien formés, expérimentés et intègres, autrement le réveil sera très brutal.

    • On en a marre des ces civil fragile trouillard corrompus des faiblards
      Si tu vois le Mali 🇲🇱 tomber aussi bas c’est à cause de ces 30 années de démocratie affairiste
      Moi a mon humble avis je préfère les militaires que tous ces militants du M5 ces préretraités qui Sont juste là pour se mettre plein dans la poche afin d’assurer le restant de leur existence
      Si voix les Bathily Dicko Choguel moutaga tall les mêmes têtes qu’on voit depuis 30ans ces gens aspirent pas confiance
      Donc je demande aux jeunes militaires de ne pas se laisser distraire ni par les M5 ni par la communauté internationale
      Tenez bon on est derrière vous
      Les M5 vous êtes la vieille génération vous avez échoué sur t’ois les plans maintenant laissez ce pays à cette jeune génération décomplexée le changement sera dans si peu

  7. La bonne gouvernance et la loi equitable appliquee a tous. Sinon chaque 10 ans coup d’Etat

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