Les forces françaises sont en train de boucler une grande opération d’anéantissement des dernières poches de résistance des mouvements islamistes terroristes, notamment Aqmi et Mujao, encore présentes dans la sixième région du Mali. Dans le nord-est de Tombouctou, sur la route du sel menant à Taoudenit, les militaires français, dotés d’un important dispositif matériel et logistique terrestre et aérien, auraient tué au moins une vingtaine d’islamistes et saisi de nombreux matériels, armements de guerre, munitions et explosifs.
Cette partie de l’opération se serait déroulée au cours du week-end dernier. Pour la mener à bien, les forces du Serval aurait eu besoin des Fama, les forces armées du Mali. Mais les militaires maliens n’ont en fait servi que de guides à leurs homologues français. Malgré les sessions de formation et d’entrainement qu’ils ont reçues des instructeurs et formateurs européens, les militaires maliens ne semblent pas être prêts à participer plus activement à une opération d’envergure contre des jihadistes surarmés et surentrainés, qui ne font aucun cas de la vie humaine, qui ne sont pas encore désireux de lâcher leur sanctuaire dans lequel ils s’adonnaient à toutes sortes de trafics juteux. Ces hommes, les militaires maliens ne pourraient pas encore les vaincre seuls.
Déjà qu’ils peinent à venir à bout d’une bande de rebelles terroristes qui les ont cantonnés dans un camp de Kidal, les provoquant et raillant sans cesse. Dans les autres régions non plus, l’armée malienne n’est pas aux premières loges, confinées à jouer le rôle de spectateur, à accompagner le Serval quand le déplacement n’est pas trop dangereux.
De la libération d’une partie du nord à aujourd’hui, la direction de l’information et des relations publiques de l’armée n’a pas encore fait de communiqué sur une mission importante menée pas les Fama. Mais ce dont les populations sont instruites, ce sont les cas d’extorsion d’argent dont certains voyageurs sont victimes au niveau des trop nombreux barrages et check-points tenus par des militaires qui ne perçoivent toujours pas l’ampleur des menaces non encore enrayées, et qui laissent trop souvent passer des islamistes qui lancent des roquettes ou s’amusent à se faire exploser aux portes d’un camp militaire ou à proximité d’un poste de contrôle. Français et Tchadiens trinquent Cependant, les Fama ne sont pas les seuls dont le rôle exact est mal perçu par les populations du nord.
En effet, dans ces régions, on se pose de en plus de questions sur la présence des éléments de la Minusma (Mission des Nations Unies pour la stabilisation du Mali). Dans les localités septentrionales, on les voit beaucoup, trop souvent, roulant des mécaniques, faisant leurs courses dans les marchés, à pied ou en auto. On les voit surtout beaucoup en galante compagnie, et s’ils ne sont pas avec les belles filles et femmes du nord, ils contribuent à fructifier le chiffre d’affaires des tenanciers de bar et des gérants de dépôt de boissons. A part contribuer à développer l’économie locale, les forces de la Minusma sont comme leurs petits copains des FAMa. Tout comme ceux-ci, il leur arrive d’assurer des opérations de police, loin des théâtres des vraies opérations. En raison de leur non participation aux opérations de traque, de ratissage ou de combats, certains les appellent les Minus. Pourtant, on ne peut pas croire que les Français font exprès de ne pas embarquer des militaires africains avec eux lorsqu’ils effectuent des opérations dangereuses.
Dans la région de Kidal, en effet, on a vu les forces du Serval se battre aux côtés des forces tchadiennes. C’est ensemble qu’elles ont traqué les islamistes jusque dans les grottes du Tegharghar. C’est ensemble qu’elles ont mis hors d’état de nuire des chefs jihadistes, dont le tristement célèbre Abou Zeïd d’Aqmi. Aujourd’hui encore, nonobstant la situation cafouilleuse de Kidal où le Mnla a été mis sous protection de la France, point n’est besoin d’un sondage pour savoir que les populations du nord ne placent leur confiance que dans les forces françaises et tchadiennes pour les protéger et éradiquer le terrorisme. Pourquoi ? Parce que ces populations ont compris que les armées africaines, Minus et Fama, sont encore et toujours mal formées, mal entrainées, mal équipées.
Leurs éléments ont surtout mal à la volonté d’aller se faire tuer, n’étant entrés dans le corps que pour échapper au chômage ou parce qu’un parent militaire leur avait prédit une vie tranquille et paisible, loin des crépitements d’armes et des explosions, assurés d’une promotion fulgurante à l’image d’un Amadou Haya Sanogo. Pendant ce temps, ce sont les Français et les Tchadiens qui trinquent à leur place.
Cheick TANDINA