L’affaire de charnier n’a pas encore fini de livrer tous ses secrets. Le juge d’instruction du dossier, Yaya Karembe, dans sa volonté affichée de faire toute la lumière sur cette affaire vient encore de tirer les vers du nez aux mutins du 30 septembre. Il est parvenu à faire, le dimanche dernier, la découverte macabre de deux fosses communes contenant 5 corps de militaires dont une femme dans la localité de Fanafiè un village situé sur la route de Bemesso dans le cercle de Kati.
En effet, le dimanche dernier, l’implacable juge Yaya Karembé, chargé de l’instruction du dossier dans l’affaire dite des bérets rouge et bérets vert, accompagnée d’une équipe ad hoc s’est rendu à Kati dans le cadre de la poursuite des enquêtes plus approfondies. Ils ont fait la découverte de deux petits charniers contenant cinq corps sans vie de soldats. Le premier charnier découvert à Kati-Farada non loin du poste de péage sur la route de Kayes contenait deux corps. Et un peu plus loin dans la Commune rurale de Kambila située à 2 km de la ville de Kati, les trois autres corps ont été découverts dans une autre fosse à coté des têtes de crocodile.
Ces corps, ainsi déterrés ont été soumis à un examen médical pour déterminer l’identité réelle des victimes. Le hic dans tout ça, est que ces corps ont été découverts avec les mains ligotés et des traces de tortures. En fait, le nombre de charniers ne cesse de s’élargir depuis l’ouverture du dossier dans l’affaire des bérets rouges disparus. Le premier charnier, faut –il le rappeler, avait été découvert dans la nuit du 3 au 4 décembre 2013 à Diago, et le second l’a été le jeudi 12 décembre au cimetière d’Hamdallaye en commune IV. La découverte de ces charniers vient constituer des preuves supplémentaires qui pourraient enfoncer davantage les ex-putschistes. Selon des sources proches du dossier, le juge d’instruction, Yaya Karembé, a été mis au parfum de cette affaire, suite à des dénonciations qui auraient été faites par des militaires détenus dans le cadre de la mutinerie du 30 septembre. D’autres témoignages ont été recueillis auprès des membres influents de l’ex junte au cours de leur audition dans le cadre de l’affaire des bérets rouges disparus. En tout cas, avant que l’identité des victimes ne soit établie, les supputations vont bon train. Certains pensent que c’est peut être les corps des bérets rouge assassinés lors du contre coup d’Etat manqué du 24 avril et d’autres estiment qu’il pourrait s’agir plutôt des corps du Colonel Youssouf Traoré et d’autres soldats qui se sont mutinés le 30 septembre dernier contre le chef de la junte et qui sont toujours portés disparus depuis cette date. Concernant cette mutinerie du 30 septembre, la hiérarchie militaire a procédé à l’épuration dans les rangs des rescapés de ce triste épisode.
Il s’agit en clair de ceux qui ont pu être arrêtés dans le cadre de l’opération Saniya lancée par le ministre de la défense. Une trentaine d’entre eux ont été purement et simplement radiés en trois phases : décembre 2013, 4 février 2014 et 7 février 2014 par le ministre de la Défense pour indiscipline et atteinte à la sureté de l’Etat. Selon des sources bien introduites, d’autres sites seraient cités dans des prochains jours, car les investigations sont en cours en vue de faire toute la lumière sur cette page sombre de l’histoire de notre pays. Il convient de rappeler que cette affaire de charnier a fait crouler tout un mythe érigé par l’ex patron de l’ex junte, Amadou Aya Sanogo et ses affidés. Comme pour donner du tonus à l’adage selon lequel « les mauvais connexions finissent par la félonie et des déchirures ». A force d’audition, le pot aux roses a été découvert : ils ont fini par tout déballer. Ce renversement de situation a fait descendre l’ex chef de la junte militaire le General Amadou Haya Sanogo de son piédestal, inculpé et placé sous mandats de dépôt le 27 novembre 2013. Comme si la malédiction divine s’abat sur lui et ses complices présumés, tout acteur ou complice ayant joué un rôle dans l’exécution de ses sales besognes est dans le collimateur du juge d’instruction Yaya Karembe.
Boubacar SIDIBE
Extrait de la dernière audition de Sanogo par le Juge Karembé.
Karembé. : Capitaine Sanogo, je v…
Sanogo : Stooooooop !… Eh Allaaaaah ! Général, monsieur le juge, Général !… Je suis GE-NE-RAL !… Et 4 étoiles, en plus !…
Juge K : Soit… Je disais donc, Capi-néral-plein-d’étoiles Sanogo, ces récentes découvertes de 2 tombes clandestines à Fanafié viennent singulièrement renforcer les très lourds soupçons qui pèsent déjà sur vous, depuis le charnier de Diago !
Sanogo : Pfff ! Mais Diago c’est pas moi !!! Je me tue à vous le dire depuis le début !… Je n’ai JA-MAIS SU qu’il y avait eu un massacre à Diago ! JA-MAIS !… D’abord, non seulement JE NE SAVAIS PAS mais en plus J’ETAIS PAS AU COURANT, alors !!!… (temps d’hésitation) et même à l’époque où JE N’AVAIS JAMAIS ENTENDU PARLER DE CETTE EXECUTION, JE M’Y ETAIS FORMELLEMENT OPPOSE !… J’avais donné des ordres !… Parfaitement !… (Tic-Tic-Tic régulier du clavier du greffier qui note scrupuleusement…)
Juge K : Bon, si je vous comprends bien, vous auriez interdit cet acte odieux, AVANT même d’en avoir entendu parler…
Sanogo (catégorique): ‘Faitement !…
Juge K. (faussement admiratif) : Très fort de votre part, mon capi-néral !
Sanogo : Ouais ! Je sais ! C’est pour ça j’ai passé Général plein d’étoiles ! Parce que moi, je sais ANTI-PISSER ! C’est très rare chez les bérets verts.
Juge K : … ? Je suppose que vous voulez dire « anticiper », non ?
Sanogo : Même soze !…
Juge K : Bon, je constate quand même que dans le cas de Diago, les victimes étaient des bérets rouges, vos ennemis jurés, et dans le cas de Fanafié, c’était des bérets verts, mais tous témoins gênants susceptibles de parler contre vous ! Dans les 2 cas, des gens que vous aviez personnellement intérêt de faire taire… Et surtout : LE MODE OPERATOIRE EST LE MEME !…
Sanogo :Faux ! Même pas vrai !… Pour Diago comme pour Fanafié, on a OPERE personne ! Wallaye ! C’est pas parce que j’ai comparé moi à un chirurgien pour le Mali un jour que j’étais bourré en europe, qu’il m’accuser maintenant d’avoir opéré ces salauds !… Pardon : ces malheureux !…
Juge K : Non sanogo, le « mode opératoire », c’est la méthode employée ! Dans les cas, victimes assassinées pieds et poings liés, puis dissimulées dans la nature ! Un même mode opératoire signe généralement un même assassin…
Sanogo (exultant) : Ah bon ??? Et bien justement, moi j’en ai aussi foutu dans des puits !… Et comme c’est une opération à la mode différente, c’est bien la preuve que c’est pas moi pour Diago et Fanafié!… Ou bien ?… (Tic-Tic-Tic régulier du clavier du greffier…)
Sanogo (air solennel) : En vérité Monsieur le juge, je vais TOUT vous dire véritément, Wallaye ! Diago et Fanafié, c’est des SUICIDES COLLECTIFS, et je le peux le prouver !…
Juge K : Vraiment ? Alors je vous écoute…
Sanogo (longue inspiration) : D’abord, les 21 salauds de D… les 21 malheureux de Diago, c’était des BERETS ROUGES ! Ca explique tout : Les bérets rouges, avec leur formation commando, on dit qu’ils connaissent TOUTES LES FICELLES du combat ! (clin d’œil appuyé au juge) Et c’est avec cette maîtrise des ficelles-là qu’ils se sont liés les pieds et les poings ! C’est comme qui dirait signé !
Juge K : Mais une fois attachés, comment ont-ils pu se tirer eux-mêmes dans le dos ?
Sanogo : Pfff ! Pour eux, ça, c’est rien du tout ! Avec l’entrainement qu’ils ont… En plus ils sont très SOLIDAIRES ; Des bérets rouges : Ils se seront aidés entre eux, c’est sur !
Juge K : Mais alors, ça n’explique pas les 5 de Fanafiés qui eux étaient de bérets verts…
Sanogo : Attention, chez nous aussi y en a qui sont très solidaires ! L’esprit de Corps, on appelle ça ! Donc, là encore : SUICIDE COLLECTIF ! Point barre !…
Juge K : … ! Et ceux qui ont été retrouvés dans des puits ?…
Sanogo (transpirant) : Des INDIVIDUALISTES, monsieur le juge !….
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