Marchés d’équipements des FAMA : Les fournisseurs vont bientôt attaquer l’Etat en justice

0

L’avenir politique au Mali : LE CHEMIN DU DIFFICILELes fournisseurs dans les marchés d’équipements de l’armée malienne, dont les contrats ont été annulés par le ministère de la Défense, se disent prêts à porter l’affaire devant les juridictions compétentes. Fondés en cela qu’ils ont respecté à la lettre les clauses contractuelles. Branle-bas de combat.

 

Si la visite du Fonds monétaire internationale n’a pas permis la reprise des activités avec le gouvernement, elle l’a néanmoins poussé à être plus respectueux des textes maliens en matière de passation de marchés. Et si l’incident autour de l’achat de l’avion présidentiel est presque terminé, il n’en est pas de même de la violation de l’article 8 relatif aux passations des marchés publics. Ce qui a d’ailleurs nécessité la modification de ce texte lors du dernier conseil des ministres extraordinaire.

 

Aujourd’hui, pour se tirer d’affaire, le gouvernement a été contraint de faire place à l’achat de l’avion présidentiel dans le budget additionnel avec la complicité des députés. Quant aux marchés d’équipements de l’armée, 11 contrats ont été annulés par le ministre de la Défense sur instruction du Premier ministre Moussa Joseph Mara. Face à cette situation, on assiste à une levée de boucliers de la part des fournisseurs qui entendent attaquer en justice l’Etat malien. D’autant qu’ils affirment ne pas comprendre la décision du ministre de la Défense consistant à annuler leurs contrats avec l’armée. Il faut signaler que ces annulations sont partielles dans certains cas et totales dans d’autres.

 

Leur incompréhension (des fournisseurs) se justifie à leurs yeux par le fait que lesdits marchés ont été conclus depuis plusieurs mois. Et, sans anicroche, car aucune des parties n’a soulevé une quelconque irrégularité, si bien que certains fournisseurs ont commencé à livrer des matériels et s’attendaient à être payés à la fin de l’année. Alors que d’autres ont déjà reçu une partie de leurs sous. L’une des entreprises, pour ne pas dire la plupart d’entre elles, s’est endettée pour exécuter le marché qui lui a été confié. Les entreprises (fournisseurs) ne souhaitent donc pas être les seules à ramasser les pots cassés de la mauvaise gestion du gouvernement malien. En l’espèce, les fournisseurs, s’ils ne se connaissent pas tous, parlent le même langage dans la mesure où ils ont le même problème.

 

De fait, la confusion demeure totale dans cette situation au moment où la commission technique, mise en place pour statuer sur les différents marchés, affiche son désaccord avec le chef du gouvernement qui aurait tordu la main au ministre de la Défense afin d’obtenir l’annulation des marchés en question. Sans en référer à la patronne des Finances, le ministre de l’Economie, Bouaré Fily Sissoko. Qui, selon nos sources, a fait savoir au Premier ministre que l’Etat est seul fautif dans cette affaire et ne devrait par conséquent pas annuler les marchés.

 

Selon Bouaré Fily Sissoko, les responsabilités sont faciles à situer dans la mesure où le Vérificateur général et la section des comptes de la Cour suprême ont déjà fait leur travail. C’est dire que Mme le ministre de l’Economie ne semble pas cautionner l’attitude de Moussa Joseph Mara. Lequel, selon toute vraisemblance, entend régler ses vieux comptes avec l’ancien ministre de la Défense, Soumeylou Boubèye Maïga.

 

Les observations de la commission technique de l’armée

Il nous est revenu que le Premier ministre Moussa Joseph Mara avait fait des observations sur le paquetage proposé aux Fama. En réponse, la commission technique mise en place au ministère de la Défense avait, dans une correspondance en date du 22 septembre 2014, fait comprendre à Moussa Joseph Mara qu’elle avait proposé le changement des tenues et uniformes des Fama afin de mettre fin aux disparités vestimentaires pour atteindre l’harmonisation et le prestige de l’uniforme (dans son plan d’action 2012-2017). L’objectif était d’avoir à court terme une visibilité et une lisibilité dans le port des tenues et uniformes.

 

C’est ainsi que le ministère de la Défense, dans sa vision pratique, à travers la Commission Tenues et Attributs (CTA) qui regroupe tous les représentants de l’armée, a proposé l’adoption de la tenue treillis (travail, servitude), de la tenue Camo (cérémonie, parade) et de la tenue d’opération. Ces propositions étaient motivées par ailleurs par la chute des régions du nord, qui a permis aux groupes armés de s’habiller comme les Fama en s’accaparant des stocks en tenues de l’armée malienne. En somme, ces propositions de la commission technique procèdent du renforcement de l’esprit de corps, et par ricochet, de la cohésion à travers une tenue nationale de combat dans laquelle chaque soldat se reconnaît.

 

Les aspects de l’achat des matériels

Toujours en répondant au Premier ministre Moussa Joseph Mara sur la pertinence de l’achat des matériels, les techniciens lui ont notifié que les matériels ont été commandés au préalable sur la base d’un cahier de charges remis aux fournisseurs ; que les matières choisies ont été faites de concert avec les fournisseurs par rapport à leur qualité et leur résistance, en plus de l’expérience acquise par la commission elle-même au cours des commandes antérieures.

 

La correspondance-réplique en date du 22 septembre explique en outre que les tenues en usage sont celles portées par les forces d’opposition et que les récentes commandes ont bien de similitudes avec la tenue de certaines armées voisines. Or, estime la commission technique, «il faut que le soldat malien soit fier de sa tenue afin de lui ôter le complexe d’infériorité qui pousse même les officiers à porter des tenues étrangères. Nous pouvons affirmer que les FAMA n’ont jamais eu autant de matériels HCCA de qualité».

 

Il faut également dire que la commission n’a rien laissé au hasard, car elle a même testé la résistance des matières et les coloris dans les laboratoires spécialisés en textile. En outre, le ministère de la Défense et des Anciens combattants a déjà réceptionné, à travers une commission de réception, des matériels et des échantillons conformément au cahier de charges.

 

Par ailleurs, si la commission technique a accepté le sac-à-dos, les tenues treillis, Camo, la tenue d’opération, elle a en revanche rejeté le béret rouge jugé non conforme, qui a été déjà remplacé par le fournisseur à 100%. En conséquence, la commission technique estime que les observations sur le paquetage proposé ne sont pas objectives car nullement basées sur une approche technique. C’est ce qui fonde aujourd’hui les fournisseurs à attaquer l’Etat…

 

Sinaly KEITA

Commentaires via Facebook :