Et de deux, de la répression sanglante de militaires, qui s’étaient mutinés en septembre dernier à Kati pour protester contre les multiples avantages accordés à l’ex-capitaine bombardé au grade de général quatre étoiles. Pour les deux affaires précitées, depuis fin octobre, et à trois reprises, Sanogo le rebelle avait été convoqué par le juge d’instruction Yaya Karembé. A la suite de ses refus répétés, un mandat d’amener avait finalement été établi contre lui. Mais il en fallait plus pour faire plier l’ex-chef de la junte.
En effet, l’homme du 22 mars a continué à faire la sourde oreille. Pendant plusieurs semaines, il a osé défier la justice malienne avec tout son orgueil, brandissant pour sa défense la prétendue immunité que lui confère son statut d’ex-chef d’Etat. En choisissant de se braquer, l’homme a fini par braquer la justice, c’est le cas de le dire, et avec elle la nation entière contre lui, si bien que les magistrats semblent avoir voulu lui dire : «Si tu ne veux pas venir de toi-même, on va venir te chercher nous-mêmes, et avec nos moyens». Aux grands maux les grands remèdes, comme on dit.
Et ils ont mis leur menace à exécution : hier, 27 novembre 2013, dans la matinée, la résistance du général a été brisée. Sauf que, pour un mandat d’amener, ce ne sont pas des policiers ou des gendarmes qui sont venus cueillir le hors-la-loi quatre étoiles dans sa résidence à Bamako, mais des militaires. Des militaires armés et décoiffés (serait-ce pour éviter l’amalgame de couleurs ?).
Pendant que certains perquisitionnaient son domicile, d’autres l’embarquaient manu militari dans leur véhicule. Direction : l’une des écoles de gendarmerie de la capitale. Et après deux heures d’interrogatoire, le général Sanogo a été inculpé de «meurtres, d’assassinats et de complicité d’enlèvements». Il a été placé sous mandat de dépôt et a passé sa première nuit en prison, dans un lieu tenu secret. Ainsi paie-t-il le prix de son entêtement.
S’il avait prédit un tel dénouement, peut-être qu’il aurait agi différemment. S’il avait su qu’il finirait ainsi, peut-être qu’il aurait coopéré. Collaboré, cédé et facilité le travail des juges dès le premier jour, avec le secret espoir de bénéficier d’un traitement «présidentiel», qui lui aurait été plus favorable. Mais avec des «si», on pourrait mettre Bamako en bouteille. Et ce qui compte aujourd’hui, c’est que Sanogo paie ainsi sa bravade des juridictions maliennes. Avait-il surestimé sa force, jugée plus grande que celle des nouvelles institutions de ce pays tout juste remis de six mois de chaos ?
A-t-il été mal conseillé ? Avait-il des choses à se reprocher ? Sans doute, mais finalement, peu importe. De toute façon, comme on le dit dans le jargon judiciaire, «nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes». En effet, quels qu’aient été ses raisons, ses motifs, ses convictions, voire ses préjugés, Amadou Sanogo était allé trop loin dans son mépris du droit. Les magistrats ne pouvaient plus alors demeurer inactifs sans donner raison au Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la République (FDR), qui accusait le pouvoir de complaisance envers «l’intouchable». Finalement, la robe du magistrat a triomphé du kaki du général. L’arme a cédé à la toge. La République est sauvé.
A l’heure qu’il est, après avoir été bombardé général quatre étoiles, après avoir gravi les marches de la pyramide militaire à vitesse supersonique, c’est la chute. Une véritable descente aux enfers pour celui qui fut, le temps d’un bref Etat d’exception, un «héros». Aujourd’hui reclus dans un cachot, ses rêves d’une planque dorée dans une lointaine ambassade volent en éclats. Et on ne s’apitoiera pas sur son sort.
Mais soyons prudents. De cette arrestation humiliante à l’établissement des preuves de sa culpabilité dans les faits qui lui sont reprochés, il y a loin.
En attendant, que ceux qui reprochaient à IBK sa connivence avec le général Sanogo et ses hommes reconnaissent désormais leur erreur. IBK est bien l’homme de la situation. Il vient prouver qu’il a tenu ses promesses : en effet, Kati ne fait plus peur à Bamako. Nous l’espérons.
Maëlle Robert
(Stagiaire)
Source: lobservateur.bf
comme s’il ya une justice au mali
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