BAMAKO – Quelques dizaines de soldats malien mécontents de leur traitement ont tiré en l’air lundi au camp militaire de Kati, près de Bamako, blessant un officier proche d’Amadou Sanogo, meneur du coup d’Etat de mars 2012 au Mali, a appris l’AFP de sources militaires.
D’après ces sources, il s’agit de jeunes soldats qui protestent pour ne pas avoir obtenu de promotions contrairement à d’autres putschistes de 2012 basés à Kati, ville-garnison près de Bamako.
Les tirs avaient cessé lundi après-midi au camp de Kati, mais la situation dans la ville demeurait tendue, selon un journaliste de l’AFP sur place, tandis qu’à Bamako, aucune perturbation majeure n’était signalée, selon un autre journaliste de l’AFP.
Des riverains d’une station-service ont toutefois affirmé avoir vu quatre militaires à bord d’un 4×4 obliger le gérant à les servir en carburant, sans payer, et partir en trombe en direction de Kati après avoir bloqué avec des barils et du bois une des routes qui y mène.
Certains Maliens commençaient à exprimer des craintes de troubles, rappelant que le coup d’Etat du 22 mars 2012 qui a renversé le président élu Amadou Toumani Touré avait été précédé d’une mutinerie de soldats en colère.
Lors des incidents à Kati, le directeur de cabinet de Sanogo, le colonel Habib Diallo, a été séquestré et blessé par balle, selon deux militaires.
Des informations contradictions avaient circulé sur son sort, un militaire indiquant qu’il avait été transféré à l’hôpital, un autre affirmant l’inverse tandis qu’un membre de sa famille disait être sans nouvelles de lui.
Mais en début de soirée, l’AFP a pu joindre au téléphone un des soldats mécontents, qui s’est présenté comme le sergent Ousmane Coulibaly. Il a affirmé qu’il retenait toujours avec ses camarades l’officier.
Il a expliqué qu’ils se sont sentis laissés de côté par les membres de l’ex-junte militaires, dont certains ont bénéficié récemment de promotions et d’avancement à des grades supérieurs.
Nous sommes toujours au camp de Kati avec l’+otage+. Tant que Sanogo ne va pas nous donner nos galons, nos primes et nos avancements de salaires, on ne va pas le laisser. Nous attendons un rendez-vous avec lui. Lui, il a eu l’argent, le grade, nous, on a rien eu. Ce n’est pas un problème entre l’Etat et nous, c’est un problème entre Sanogo et nous, a dit le sergent Coulibaly.
Pour un autre militaire malien, haut gradé, ce qui se passe (à Kati), c’est un règlement de comptes entre putschistes, c’est de la cuisine interne.
Depuis août, plusieurs auteurs du coup d’Etat de mars 2012 ou leurs proches ont été promus à des grades supérieurs. Parmi eux, Amadou Sanogo, passé directement du grade de capitale à celui de général de corps d’armée et Moussa Sinko Coulibaly, un de ses proches et actuellement ministre, passé de colonel à général.
Auparavant, Sanogo avait été nommé en août 2012 à la tête d’un comité de réforme de l’armée, fonctions dont il a été déchargé un an plus tard.
Sa promotion avait été critiquée au Mali et à l’étranger – l’organisation Human Rights Watch (HRW) l’a qualifiée de honteuse -, où l’on a souligné que Sanogo n’a jamais combattu dans le nord du Mali contre l’occupation islamiste.
Les putschistes avaient justifié le renversement du président Touré par l’incapacité d’un Etat corrompu à lutter contre la montée des périls en tous genres dans les régions du nord du Mali: groupes jihadistes et criminels, rébellion touareg.
Mais le coup d’Etat avait précipité la prise de ces vastes zones du Mali par les groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda qui les ont occupées pendant neuf mois, avant d’en être chassés par une intervention militaire internationale initiée par la France à partir de janvier 2013.
(©AFP / 30 septembre 2013 21h13)