Le jeudi 22 mars, à l’aube, le peuple apprend par la télé que le président Amadou Toumani Touré et son pouvoir sont renversés et remplacés par un Comité national de redressement de la démocratie et de restauration de l’Etat. Une mutinerie, commencée la veille à Kati, s’est poursuivie par le bombardement aux canons du palais présidentiel sans défense active à Koulouba, par la prise de contrôle de l’Ortm et de l’aéroport international, par l’enlèvement et la séquestration de plusieurs personnalités, avant de se transformer en v un véritable coup d’Etat. Avec suspension de la Constitution et dissolution des institutions de la République dont l’Assemblée nationale.
Dès son annonce par le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef de file, et ses hommes, le coup d’Etat est condamné à l’unanimité par la communauté internationale et par les forces vives de la nation, républicaines et démocrates. Non pas à cause des nombreux cas de confiscation de biens, saccages et pillages que beaucoup de témoins attribuent aux mutins ou l’arrestation de hautes personnalités, mais tout simplement parce qu’en République du Mali, la Constitution qualifie le coup d’Etat de crime contre le peuple, et également parce que pour le reste du monde, l’époque des prises de pouvoir par la force doit être révolue à jamais. L’histoire ne pouvait donc que s’emballer.
Jeudi, vendredi et samedi, le putsch est condamné de partout. Comme si cela ne suffisait pas, la Cedeao, l’Ua, l’Ue, l’Onu, les Usa, le Canada, la France et bien d’autres suspendent l’aide au développement et exigent le retour à une vie constitutionnelle normale. Ce qui passe par le rétablissement du général ATT dans ses fonctions de président de la République.
Dimanche, les forces vives de la nation comptant trente huit partis politiques dont les plus importants et les organisations de société civile érigent un Front uni pour la sauvegarde de la république et la démocratie. Eux aussi demandent le retour de l’ordre constitutionnel.
Le lendemain lundi en revanche, quelques petits partis politiques s’ajoutent à plus de quarante associations pour apporter leur soutien à la junte à travers un Mouvement populaire du 22 mars (MP 22). La réponse des démocrates ne se fera pas attendre. Dès le lendemain, ils tiennent un meeting à la Bourse du travail et réitèrent leurs revendications de l’avant-veille : le départ des mutins.
Le même jour, à Abidjan, un sommet extraordinaire de la Cedeao se réunit. Les chefs d’Etat décident d’intervenir, par le dialogue ou par la force, pour libérer le Mali du pouvoir kaki.
Vingt-quatre heures plus tard, le mercredi, le MP22 proteste et marche dans les rues de Bamako. C’est ce même jour que certains chefs d’état-major de la sous-région ont choisi pour venir au Mali faire une évaluation complète de la situation (en vue d’une éventuelle intervention armée), transmettre aux mutins les décisions du sommet extraordinaire d’Abidjan, et préparer l’arrivée de six chefs d’Etat
Entre temps, la junte décide de bouger un peu et de mettre en œuvre son propre retour à l’ordre constitutionnel (anormal) en se fendant d’un acte fondamental, une constitution bis.
Jeudi matin, les chefs d’Etat de la Cedeao débarquent à Bamako et rencontrent les nouvelles autorités, discutent avec elles de différents scénarios de sortie de crise.
Le premier est le départ de la junte militaire et le rétablissement d’ATT dans ses fonctions qu’il gardera jusqu’au 08 juin, date officielle de la fin de son mandat. L’élection présidentielle ne pouvant avoir lieu dans les délais requis, la continuité du pouvoir sera assurée par l’intérimaire constitutionnel, le président de l’Assemblée nationale. Le deuxième est également le rétablissement d’ATT dans ses fonctions. Mais il doit démissionner immédiatement pour laisser la place au même intérimaire constitutionnel. Dans les deux cas, ce dernier doit organiser dès que possible les élections auxquelles il ne doit pas se présenter. Ces deux solutions ont des failles : ATT semble ne plus vouloir revenir au pouvoir, quel que soit le scénario et surtout pour deux mois, voire moins ; le président de l’Assemblée nationale est candidat à la présidentielle, investi par son parti et grand favori, il est peu probable qu’il accepte un intérim de quelques mois quand il a l’occasion de faire un mandat complet de cinq ans ; le chef de la junte ne semble pas lâcher de sitôt ce que lui et ses camarades considèrent comme une occasion de redresser la démocratie et de restaurer l’Etat. De plus, le capitaine Sanogo s’est véritablement installé dans ses rôle et responsabilités de chef d’Etat, avec des nominations à la chaîne et un acte fondamental. Les quittera-t-il facilement sans de solides assurances quant à son sort ?
Pour en revenir à ATT, il reste cependant une solution. Ne pouvant être durablement en sécurité ici au Mali, il est possible que la communauté internationale prépare et exécute son exfiltration par les chefs d’Etat de la Cedeao. Un scénario qui ne solutionne pas le problème essentiel : le Cnrdre.
Cheick Tandina
Accueil Armée
“Jeudi matin, les chefs d’Etat de la Cedeao débarquent à Bamako et rencontrent les nouvelles autorités, discutent avec elles de différents scénarios de sortie de crise.” Comment ? Je n’ai pas suivi cet evenement.Est-ce que vous avez vraiment relu ce passage.
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