A l’issue d’une rencontre entre le président français François Hollande et le vice-président américain Joe Biden au palais de l’Elysée, le 4 février dernier, la France et les Etats-Unis sont convenus de la nécessité de mettre en place aussi rapidement que possible au Mali une force de maintien de la paix placée sous l’autorité de l’ONU.
Cette idée est diversement appréciée par les autorités nationales et leaders politiques ainsi que des acteurs de la société civile.
Le ministre malien de la Défense et des Anciens combattants, le général Yamoussa Camara, a déclaré lundi dernier que “le déploiement d’une mission de maintien de la paix de l’ONU au Mali n’était pas prévu au départ, parce qu’on ne savait pas le volume exact des forces d’opposition (groupes armés islamistes et terroristes, ndlr)”.
“Je ne dévoile pas un secret, ça m’étonnerait qu’avec le déploiement de tous les moyens dont disposent les pays de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (CEDEAO), malgré leur bonne volonté, on n’aurait pu atteindre aussi rapidement les objectifs qu’on devrait atteindre sans l’ implication d’une puissance peut-être comme la France”, a-t-il indiqué.
Le général Camara a toutefois déclaré qu’il “ne voit pas d’ inconvénient au déploiement d’une mission de maintien de la paix de l’ONU dans son pays”, disant qu’il “n’a pas d’objection particulière à cela car il y a seulement un changement de nom (…) “.
Il a aussi souligné la nécessité d’accorder à l’armée malienne et à la Misma “les moyens en appui renseignement et appui aérien”.
La même approche est partagée par l’ancien ministre malien des Affaires étrangères et président du parti PARENA, Tiébilé Dramé, expert des questions de sécurité dans le Sahel, qui a déclaré appuyer “totalement l’idée d’une mission de maintien de la paix de l’ONU au Mali qui sera mise en place quand l’actuelle coalition franco-africaine aura parachevé le travail en cours, à savoir la destruction de l’arsenal de guerre et la logistique des groupes jihadistes”.
“Au vu de la gravité de la situation et de l’importance des enjeux, seuls un financement à partir du budget régulier de l’ONU et un soutien logistique conséquent permettront de faire face à l’ instabilité résiduelle à laquelle nous serons confrontés pendant un moment” et “une nouvelle résolution est donc la bienvenue pour mettre tous les contingents africains sous drapeau onusien”, a-t- il affirmé à Xinhua.
Evoquant les conséquences d’un tel déploiement dans son pays, M. Dramé a indiqué que “les conséquences immédiates seront un meilleur confort logistique et une plus grande cohérence entre les différents bataillons africains qui seront sous le même commandement”. En plus, a-t-il dit, “la lutte contre l’insécurité sera renforcée. Bien entendu, le mandat doit éviter toute ambiguïté”.
M. Dramé a fait savoir qu’il “ne s’agira pas d’interposition entre les forces de libération et celles des groupes d’occupation”.
“La nouvelle mission sera déployée dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et les forces du mal et que c’est la coalition africaine actuelle qui changera de casque. Les casques seront bleus”, a-t-il ajouté.
La mission onusienne comportera, “sans doute, des volets Assistance Electorale” et Monitoring des droits de l’homme, toutes choses qui vont dans le sens de la Feuille de Route de la Transition, a conclu M. Dramé.
Cependant, tout en reconnaissant la nécessité d’intensifier les efforts visant à boucler et à sécuriser le financement national et international de la Misma, l’ancien Premier ministre malien Soumana Sako et ses camarades, réunis au sein d’un regroupement dénommé l’ADPS, “s’opposent à toute idée de transformation de ladite force en force de maintien de la paix sous l’égide et le contrôle politique et militaire de l’ONU”.
Justifiant sa position dans une déclaration déposée mardi à Xinhua, l’Alliance des démocrates patriotes pour la sortie de crise (ADPS) estime que “les Nations Unies ont démontré leur incapacité notoire à bien appréhender la nature réelle du problème du nord du Mali et à y trouver une solution appropriée”.
Le même regroupement pointe du doigt “l’expérience des Nations unies en la matière sur le continent africain, notamment en République Démocratique du Congo, qui est plutôt catastrophique”.
M. Sako et ses camarades “rappellent au gouvernement malien et à tous les partenaires bilatéraux et multilatéraux du Mali qu’en tout état de cause, ils tiennent à ce que le contrôle politique des opérations militaires et sécuritaires n’échappe pas aux autorités nationales légitimes de notre pays”.
“Une force onusienne dite de maintien de la paix, encadrée par une mission lourde du genre MONUC/MNUSCO, n’engloutirait-elle pas inutilement des sommes énormes alors même qu’une infime fraction desdites sommes suffirait à enclencher un processus de développement durable bénéficiant à toutes les communautés du nord du Mali?”, entre autres interrogations de M. Sako et ses camarades.
A l’image des responsables de l’ADPS, d’autres maliens notamment des députés, historiens s’interrogent sur le contenu qui sera donné à cette mission de maintien de la paix de l’ONU au Mali.
Pour l’instant, le président de la République par intérim du Mali et chef suprême des armées, Dioncounda Traoré, ne s’est pas prononcé sur le déploiement d’une telle mission dans son pays.
French.news.cn 2013-02-14 22:09:20