La junte militaire face aux populations: Une tâche de salut public

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Le coup d'État militaire du 22 mars dernier a tenté de mettre fin à dix ans de règne du président Amadou Toumani Touré. © Riad Abada / Sipa

On réfléchissait depuis, d’un côté comme de l’autre, en termes d’urgence. Quand la CEDEAO ne ménageait pas ses efforts (de médiation), les jeunes militaires en faisaient autant de leur peine. De l’intérêt du Mali, un nouveau chapitre vient de s’ouvrir. Un accord- cadre destiné, à terme, à rendre le pouvoir aux civils a été signé entre la CEDEAO et la junte. Ce même jour où nous devrons assister, sur un site Internet, à la déclaration d’indépendance dite de l’Azawad.

Le vendredi 6 Avril ne fut peut-être pas un jour « poissonneux », mais il aura été celui de toutes les surprises. On s’interrogeait sur le sort de la maison Mali, et tout le monde s’en étaient retournés vers ses dieux du foyer. Le « blocus » imposé par la CEDEAO contre le pays était vu incontinent (c’est-à-dire à cause de son manque de modération et pour tout dire, qui n’a pas été chaste en venant violer nos petites habitudes de débrouillardise). Nos compatriotes n’escomptaient rien de cette « punition collective » de notre organisation communautaire et on en était à compter les points pour la junte militaire. Une semaine, dirons-nous, pour en arriver à cet accord à l’arraché ( ?). L’incongruité des trois jours de délai donné dans un premier temps par l’exécutif de la CEDEAO devait laisser la place à une décision politique de première main. Du haut des airs, les Chefs d’Etat ouest-africains ont dû penser, depuis le tarmac de Bamako-Sénou, à l’insolence mal venue des putschistes. Il leur faudra tout le doigté de leur aîné dans le métier des armes, Blaise Compaoré. En bon revenant des campagnes militaires, l’ex-Capitaine des commandos du camp de Pô (Burkina- Faso) saura les accompagner et les appuyer de ses conseils. Non, un affront, une gifle ne méritait pas les orgues de Staline comme réponse de la CEDEAO. Seulement voilà, comme relais du chapitre VIII onusien, avec le problème de gel des avoirs, on se demandait bien si l’organisation sous-régionale, en tant que telle, n’empiétait pas sur les plates-bandes de l’UEMOA ? A la manœuvre, nos putschistes de Kati vont se montrer à hauteur d’ambitions.

Une armée démoralisée, mais pas encore démobilisée

Réaliser une union sacrée à partir d’un noyau, dégager un leadership autour des principaux acteurs politiques et sociaux, représenter l’opinion de la majorité de nos compatriotes. Ce qu’on voyait tous les jours sous nos yeux, et à en croire nos oreilles, c’est que les putschistes, malgré les problèmes de l’heure, jouaient la montre. Le Capitaine Sanogo, à la tête de ses hommes, malgré la proclamation, nous allons dire urbi et orbi, se découvrira fin manœuvrier, c’est-à-dire « habile en ressorts », arrivant à se rallier les causes les moins attendues. Comme on dit, il s’est levé sur ces anciennes terres du Soudan, un pharaon galonné qui n’avait pas connu Joseph. La junte signataire n’a pas eu à établir un calendrier fixe du transfert du pouvoir vers les civils. Le temps de la Transition sera celui de l’éteignoir. Remarquer que tout dépend déjà de ce qui sera mis dans les jours qui suivent dans le terme « vacance » de la Présidence de la République. Une fois encore, il sera fait appel au bon cœur du CNRDRE pour ménager une sortie en douceur de l’ancien Chef de l’Etat Amadou Toumani Touré. Faudra-t- il tenir compte des désidératas des nouveaux (mais pas encore anciens) maîtres du pays ? Ira-t-on jusqu’à exiger la démission formelle, sinon écrite, de l’ex-hôte de Koulouba ? L’ombre du 22 Mars demeurera encore une ombre, puisque les nouveaux pouvoirs qui seront intronisés devront chapitrer sur le rôle du CNRDRE. Une loi de programmation militaire sera au cœur du dispositif pour un sentier à suivre. Mais comment pouvaient-ils, nos jeunes officiers, être le plus haut possible dans notre estime ? En partant, ils ont choisi de sortir de la scène et cet adieu aux armes politiques, on y verrait bien le signe d’un engagement total ayant jeté leur rancune à la rivière. N’est-ce pas que quelque chose a changé dans l’ordre kaki depuis les vagissements de la IIIè République ? Malgré les mitraillettes, on a voulu les traiter comme on l’aurait fait avec une assemblée de lilliputiens (vous savez, ces petits hommes…). On s’est ravisé car tout ensemble on a dû chercher la porte de sortie à la crise. A cette désaffection, pourrait-on dire, il y a bien des raisons de circonstances. On pouvait bien s’engager sur leur sort, mais la peur qui venait d’abord était celle du ventre vide. Une menace à peine voilée avec tout ce qui se profile comme alarmes vers des populations sinistrées par le temps des récoltes, l’imprévoyance et la folie guerrière des hommes. L’institution militaire pense encore une fois avec le retour des militaires dans les casernes. La République y trouve là et son compte et sa protection sociale. Qui n’a pas compris que le défunt régime a joué les pires pratiques manœuvrières en concluant avec les rébellions des accords en trompe-l’œil dans le seul but d’avoir des circonstances arrangeantes. C’est là qu’ATT a perdu sur toute la ligne en voulant faire de la « diplomatie autrement… ».

Une proclamation d’indépendance qui fait pschitt… !

Nos yeux étaient humides ce vendredi 6 avril en regardant sur le site internet la proclamation de la déclaration d’indépendance de l’Azawad. Passé ce saisissement, nous reviendrons sur cet espace Azawad pris comme donnée plutôt qu’investi comme un projet. C’est ici que nous laissons échapper nos petites appréhensions (un journaliste le doit-il ?) parce que le fait que nous vivons sous nos yeux, nos petits cartables d’écolier nous ont rappelé cet autre fait d’amputation de milliers de km2 du territoire du Soudan français et de ses populations pour les rattacher à ce qui est actuellement la Mauritanie, du fait de la colonisation : il s’agit des régions de Néma et autres. Un ordre religieux menaçait du nom de Cheick Hamalla. Nous disons donc que cette indépendance est une pratique parce que nos armées se sont retrouvées « submergées par une force mécanique qui lui était supérieure ». Ce faisant, le MNLA, le mouvement Ançardine et leurs acolytes d’AQMI nous font découvrir le politiquement apatride. Ceux des populations qui vivent au Nord sont nos cousins, nos voisins, un peu de notre famille. Nous partageons la même histoire, nous avons les mêmes référents, et sachons le reconnaître dès à présent, le même destin. Jadis, comme on nous le répète, nous nous serions reconnus en Soundiata Keïta, Firhoun…Naguère, nous avons eu Amadou Hampâté Bâ, un Modibo Keïta et un Moussa Traoré. Aujourd’hui avons-nous en mémoire l’action d’un feu Boubacar Sy, feu Adrahamane Touré, Ag Hamani et notre religieux de Nioro, le Chérif Mohamed H. Haïdara dit Bouyé… Nos filiations sont diverses et nous donnent ainsi un large éventail de choix. Ceux qui ont choisi la voie que nous appellerons, non pas indépendance -« Quand on veut être libre, il faut être juste… »-, mais celle du « divisionnisme », se trompent en disant que le Nord était le pestiféré de la République. Ceux qui y habitent ne sont pas d’une citoyenneté au rabais, ils ne sont pas des compléments d’effectifs. Qu’ils en demandent à leurs portefeuilles et à nos tirelires à nous autres au Sud. Il n’y a pas eu d’audit, nous n’avons pas demandé à ce jour d’édit… Que sont- ils devenus leurs droits à travers de multiples projets ? Il faut rendre compte ici, dès maintenant, toujours de cette sensibilité sociale et tolérante inscrite quelque part dans les gènes de ce peuple. Nous devons stigmatiser cette « indépendance de l’Azawad » car elle confond discours et action. Ceux qui le brandissent ne tiennent pas compte ni de l’exigence, ni de la méthode qu’ils emploient. Pour « leur unilatéralisme », ils cherchent à cacher la vérité à ceux qu’ils veulent rassembler sous une bannière. Ceux qui seront appelés incessamment aux affaires sont aux prises avec de gros dossiers. Celui-là, énorme, découle d’un problème de légitimation de la République du Mali. Jusqu’ici, et grâce à des arguments fondateurs, nous venons de traverser 52 ans d’âge sur la rivière de nos espérances de vie commune. Les gars du MNLA, qui ne sont pas encore sur l’autre rive, peuvent-ils se moquer de ceux qui peinent encore à la nage ? Nous gardons nos images d’archives et nous avons nos mains pour reconstruire.

S. Koné

 

 

 

 

 

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2 COMMENTAIRES

  1. Article 121 de la constitution en vigueur : Le fondement de tout pouvoir en République du Mali réside dans la Constitution.
    La forme républicaine de l’Etat ne peut être remise en cause. Le peuple a le droit à la
    désobéissance civile pour la préservation de la forme républicaine de l’Etat.
    Tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible contre le peuple malien.

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