La chronique de l’Etudiant : sifflons la fin de la recréation

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Bientôt le soleil va disparaitre derrière les montagnes, et ramadan oblige, les radios vont émettre le coup de canon annonçant la rupture du jeûne. Pour ceux qui célèbrent le ramadan. Tout le monde sera sur la même longueur d’onde bientôt. La ville s’agite, les pas sont pressés, les museaux «ramadanesques», les oreilles doublement attentives au fameux et salutaire coup de canon qui tarde à tonner ; l’on n’est pas loin de s’échauffer la bile.

Direction un boui-boui de la capitale. Le serveur est assailli par les commandes, chacun désire être servi à temps. Les esprits s’enfièvrent, l’on agite les idées sur la politique surtout. Le pays ne va pas fort, tout le monde s’inquiète. Deux hommes font irruption, l’un a la cinquantaine bien tassée, l’autre est quadragénaire. Des gouttes de sueur dégoulinent de leur front pour chuter sur le sol battu du boui-boui. « T’as écouté le P.M hier soir à la télé ? Lui, c’est un vrai Bamanan, un sujet qui n’a aucune frousse de regarder le roi dans les yeux et lui cracher la vérité ! Ils nous faut vraiment des hommes de son calibre pour faire avancer les choses », lance le quinquagénaire.

Son interlocuteur l’écoute avec presque une indifférence grave puis répond : «Ecoute, moi, j’en ai vraiment plein le cul de tout ça ! Ce pays ne sera jamais comme les autres. Plus tu y crois, plus il te déçoit et s’acharne à t’oublier. Et tu sais que nul n’est besoin de consulter les astres pour subodorer que ce mandarin ne doit pas démissionner». «N’est-ce-pas man ?», dit-il à l’adresse du serveur qui s’est borné à poser sur lui un regard torve, se gardant de se prononcer sur tout ce qui concerne la politique au grand embarras des ses amis entichés de politique. « Si ces politiques sybarites tiennent mordicus à entrer au gouvernement, à mon sens, qu’on leur fasse une ouverture. Pour saborder toutes ces critiques visqueuses à l’endroit du P.M et son équipe. Il est temps de mettre fin à cette recréation ! », Poursuit le quinquagénaire. » « Je ne sais pas ce qu’ils ont encore à prouver après avoir passé vingt ans à non-gérer le pays. Mais je sais ce qui a aiguisé leur motivation. Le fait est qu’avec le scandale soulevé par l’affaire des faux diplômes, et celles qui se pointent à l’horizon, beaucoup d’entre eux risquent d’être noyés. C’est tout ! »

L’autre,  le quadragénaire, en instance de répondre, s’arrête pile et regarde s’installer une femme, une dame patronnesse dont les lunettes fumées derrières lesquelles dansent de gros yeux, n’ont autre pareil que des rétroviseurs d’un avion. J’allais oublier, un avion n’en a pas c’est pourquoi il ne fait pas marche arrière, pour reprendre un ami artiste. Elle demande un verre de bière qu’on lui sert avec une vitesse infernale. Elle sait aussi qu’elle focalise l’attention ; cigarette au bec, elle tire une bouchée et laisse s’échapper de ses narines un nuage de fumée. Brusquement, l’aîné fait une tape sur l’épaule du quadragénaire pour l’arracher de sa rêvasserie. «Ah ! C’est vrai…tu sais ce qui m’inquiète avec ces politiques, c’est de toujours faire office de chien de meute pour rien. Ils se croient essentiels à ce pays, pensent que sans eux c’est le KO. D’ailleurs, on dit mais est-ce-vrai ? Qu’un diplomate du Nord les a allumés, allant jusqu’à dire que la reconquête des territoires du nord du pays n’est pas leurs oignons, la seule idée qui les fait gambader c’est entrer au gouvernement. Pour quoi faire ?!!»

« T’as tout avantage à contrôler ton vocabulaire. Là tu passes la limite ! Et puis ne transformez pas les choses, le français est clair. C.M.D doit rester  qu’il pleuve ou qu’il neige. Et oublie les propos du diplomate, il a dit tout sauf ce qui a trait au bon sens. Parce que faire le procès des élections qui se sont tenues en 2002 au Mali, c’est aussi s’en prendre au régime d’alors en France dont l’ombre  a plané sur ces élections avec surtout un sentiment paternaliste », intervient la dame patronnesse. « Laisse-moi te dire un truc. L’homme qui conduira ce pays à un lendemain meilleur est dans les limbes. Et il ne sortira pas tant que la haine de l’autre peuple les cœurs. » Puis, avec le sérieux d’un pape, elle porte son sac en bandoulière et file à l’anglaise constatant que tout le monde a l’esprit absorbé par ce qu’elle a dit. « Je veux bien la croire. Déjà quelque chose me dit que même avec un gouvernement d’union nationale, il se trouvera des gens qui continueront à pester contre. Juste pour te dire que le chien ne change jamais sa façon de s’asseoir. Et n’en parle même pas du discours tenu aussi par qui on sait, chacun prêche pour sa paroisse et veut passer pour un petit saint. », conclue l’aîné.

 

      BOUBACAR SANGARE

 

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