Intervention militaire de la France au Mali: avant Tessalit, les évacuations des bases françaises

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Dans le sillage de la remise du camp de Tessalit relevant du secteur N°2 du théâtre-Est de l’opération Maliko aux Forces armées maliennes par la Force Barkhane intervenant après l’abandon de l’emprise de Kidal, conformément à l’annonce de réadaptation du dispositif militaire français par le président MACRON, il importe de revisiter un pan de l’histoire souvent tumultueuse des relations militaires avec notre partenaire historique.

20 septembre 1960 : accord sur la gestion des bases militaires
Un accord est intervenu entre la République française et la République soudanaise pour le regroupement des forces terrestres françaises stationnées à Gao, Tombouctou, Sévaré, Ségou, Nioro et Kayes sur la base de Kati.
Ce mouvement est conforme aux accords de coopération franco-maliens signés en juin dernier à Paris. Ces accords prévoyaient notamment le maintien de la base terrestre française de Kati et celui des trois bases aériennes de Bamako, Tessalit et Gao.
Aux termes de la décision franco-malienne, les diverses garnisons françaises terrestres devaient avoir réintégré la base de Kati au 1er octobre 1960. À cette même date, et selon la même décision, l’état-major de la brigade stationnée à Bamako et placée sous le commandement du général Claude Charles sera dissous. Les effectifs fiançais stationnés au Soudan n’étant pas officiellement connus, il n’est pas possible encore de connaître le chiffre total des troupes devant faire mouvement. On sait seulement, de source informée, qu’il est relativement peu important.
On apprend dans les milieux officiels que le gouvernement du Mali vient de demander le détachement, en qualité de conseillers techniques auprès des forces maliennes, de trente officiers et sous-officiers français, et qu’une demande similaire sera faite dans les prochains jours en ce qui concerne des cadres des armes spécialisées.
Concernant la gendarmerie, dont le commandant de groupement, le lieutenant-colonel Marcel Auriol, et ses officiers ont quitté Bamako, on croit savoir que, là aussi, le gouvernement fédéral envisage de faire appel à un certain nombre d’entre ses membres comme conseillers techniques.
Jeudi 22 septembre 1960 : naissance de la République du Mali
Le congrès extraordinaire de l’Union soudanaise a proclamé jeudi que la République soudanaise s’appelait désormais « République du Mali «, et qu’elle se proclamait libre de tous engagements et liens politiques à l’égard de la France. Debout et par acclamation, les congressistes ont constaté que la Fédération du Mali n’existait plus en tant qu’entité territoriale. M. Modibo KEITA a d’autre part annoncé l’instauration d’une économie socialiste planifiée, mais qui n’entraverait par les activités du secteur privé.
La proposition adoptée précise que la « République du Mali « est libre de tous engagements et de liens politiques vis-à-vis de la France.
L’Assemblée soudanaise, convoquée en session extraordinaire, a officiellement entériné les motions du Congrès de l’Union soudanaise, s’employant à renforcer l’indépendance. La totalité des compétences jusque-là détenues par la Communauté a été transférée au gouvernement malien, et les prérogatives du chef de l’État malien ont été confiées à Modibo KEITA.
La situation étant ainsi clarifiée, rien ne s’oppose plus à l’admission de la République soudanaise à l’O.N.U. sous le nom de Mali. Le gouvernement français a d’ailleurs l’intention de parrainer cette candidature auprès de l’Assemblée générale, en même temps que celle de la République du Sénégal.
La décision prise à Bamako de dégager la République du Mali de tout lien politique et de tout engagement envers la France n’implique pas de rupture totale. L’attitude adoptée est analogue à celle des dirigeants ivoiriens et de leurs amis du Conseil de l’Entente.
Le Président Modibo KEITA ne pouvait évidemment pas défendre des positions se situant en deçà de celles qui avaient été adoptées il y a trois mois par M. Houphouët-BOIGNY. D’autre part, dans l’atmosphère enfiévrée qui règne à Bamako depuis un mois le leader soudanais ne pouvait pas manquer, ne fût-ce que par concession vis-à-vis des éléments extrémistes de son parti, de se montrer très ferme dans ses propos.
Mais, pour continuer à bénéficier de l’assistance technique française, les pères fondateurs du Mali nouveau veilleront à ne pas rompre avec Paris. Ayant des problèmes pratiques à résoudre, ne souhaitant pas adopter une ligne de conduite guinéenne, dont ils ont mesuré les conséquences, ils se rallieront à la formule du statu quo. Tout au plus invoqueront-ils la caducité des accords lorsque leur application leur sera défavorable…
Un fait est significatif : au moment même où s’opère le regroupement sur la base de Kati des forces françaises stationnées sur le territoire de la République du Mali ceux qui ont proclamé la République demandent des instructeurs militaires français.

23 septembre 1960 : le télégramme de Modibo à De Gaule
Le Président Modibo KEITA a adressé un télégramme au général de Gaulle pour l’informer des décisions prises par le gouvernement de la République du Mali.
Les observateurs présents à Bamako ont remarqué à l’issue du congrès de l’Union soudanaise que les motions qui demandaient la rupture des relations diplomatiques avec la France et l’évacuation des bases militaires cédées à la France n’ont pas été retenues, à l’initiative de Jean-Marie KONE, vice-président du gouvernement.
L’attention s’est également portée sur un passage du discours de M. Idrissa DIARRA, dans lequel le secrétaire politique de l’Union soudanaise se déclarait «douloureusement peiné en constatant que certains dirigeants africains acceptent délibérément de se faire les auxiliaires de la division en Afrique, et, nous prêtant des sympathies pour telle ou telle idéologie, faisaient exprès de confondre un certain dirigisme économique avec le communisme».
26 septembre 1960 : la France reconnaît le Mali
Prenant acte que la République soudanaise avait pris le nom de République du Mali, le gouvernement français a décidé de reconnaître cette République comme État indépendant et souverain, annonce-t-on au secrétariat d’État chargé des relations avec les États de la Communauté.
Cette reconnaissance a été notifiée au Président Modibo KEITA par Wybaux, consul général de France à Bamako, lequel, en attendant que soit nommé dans cette ville un agent accrédité de chef d’État à chef d’État, ce qui exige une délibération du conseil des ministres, a été désigné en qualité de chargé d’affaires.
2 novembre 1960 : les accords diplomatiques
La République française et la République du Mali ont décidé d’élever leurs représentations diplomatiques au rang d’ambassades. Le gouvernement malien a donné son agrément à la nomination de M. Fernand Wibaux, consul général de France à Bamako, comme chargé d’affaires.
9 novembre 1960 : des accords avec la France
A la suite d’une récente déclaration de M. MESSMER, ministre des armées, sur la défense de l’Afrique, le parti gouvernemental de l’Union soudanaise (R.D.A.) a publié un communiqué spécifiant notamment :
« A) Que la République du Mali n’est liée à la République française par aucun accord, à plus forte raison de défense ;
« B) Que la mise en place de l’armée malienne a été faite dans l’esprit des accords passés entre la France et l’ex-Fédération du Mali, rendus caducs par le seul fait de la République française et dénoncés ensuite par la République du Mali ;
« C) Que les solutions empiriques adoptées par la France et la République du Mali avant de nouvelles discussions pour de futurs accords de coopération, ne sauraient avoir valeur d’accords. «
Rappelons que Pierre MESSMER, parlant au déjeuner de l’Association des journalistes d’outre-mer, avait évoqué en termes généraux le regroupement des forces françaises en Afrique noire en vertu des accords, sans faire état de la situation particulière de la République du Mali.
Le 20 janvier 1961 : la structuration de l’Armée
Le Président Modibo KEITA rappela par « décision politique » le Colonel Pinana DRABO pour jeter, sous le commandement du général SOUMARE, les bases de la nouvelle armée du Mali. Ce jour-là, le tout nouveau Commandant s’attela avec d’autres officiers, dont son frère Kélétigui DRABO, à structurer l’armée du Mali avant que le président ne demande l’évacuation des troupes coloniales, vingt jours plus tard.
Le 20 janvier 1961 : quatre mois après la proclamation solennelle de l’indépendance de la République du Mali le 22 septembre 1960, les députés, réunis en séance plénière de l’Assemblée nationale, adoptent la loi n° 61-26 qui crée le drapeau national du Mali. Celui-ci sera composé de trois bandes verticales et égales de couleur verte, or et rouge.
Trois mois plus tard, le 20 janvier 1961, après avoir été adoubé par l’Assemblée nationale et investi à l’unanimité comme Chef de l’État, le Président Modibo KEITA invite le corps diplomatique accrédité dans son pays et leur tient ce discours sans ambiguïté :
«Je vous remercie de vous être distraites de vos augustes occupations et de vos nombreuses préoccupations pour répondre à mon invitation.
L’importance de la communication exige que je vous la fasse moi-même.
À l’heure qu’il est, l’Ambassade de France en République du Mali est informée par mes soins de la décision de mon parti et de mon gouvernement de voir la France évacuer les bases militaires de Bamako, de Kati, de Gao et de Tessalit, qu’elle occupait du fait des accords franco-maliens signés à Paris le 22 juin 1960, entre elle et la Fédération du Mali et qui deviennent caducs après les événements du 19 au 20 août 1960 et l’acte de reconnaissance par la France du gouvernement du Sénégal, acte qui consacre la dislocation de la Fédération du Mali.
La République du Mali a affirmé sa volonté de coopérer avec la France sur la base de la non-ingérence dans nos affaires intérieures et du respect de notre souveraineté. La décision de mon parti et de mon gouvernement ne met nullement en cause cette volonté. Elle est l’expression de notre conviction qu’à moins d’abandon volontaire de souveraineté de la part d’un État jeune ou d’accords particuliers dans le domaine de la défense, les troupes de l’ex-puissance coloniale ne peuvent stationner sur le territoire de l’ex-colonie aux côtés des troupes du jeune État. D’autre part, le peuple du Mali, l’Union Soudanaise-R.D.A., et le gouvernement de mon pays ont toujours affirmé leur option en faveur de la politique de non-alignement sur l’un ou l’autre des deux blocs. Cette attitude est en contradiction avec la présence, sur son territoire, des troupes d’une puissance étrangère et à laquelle ne le lie aucun accord et qui d’autre part est engagée dans le pacte militaire d’un bloc.
Je prie vos Excellences d’informer vos gouvernements respectifs et d’attirer leur attention sur notre ferme décision de l’évacuation rapide des troupes stationnées en République du Mali.
Je vous remercie. »
Les troupes françaises sont donc priées de plier bagage, telle est la volonté et la position clairement affirmées des nouvelles autorités souveraines de Bamako. Volonté de matérialiser l’indépendance ? Affirmation de la souveraineté ? Ou une manifestation de solidarité sans faille à l’égard du peuple frère algérien qui à travers le FLN avait était passé à la lutte armée contre l’armée coloniale ?
Les historiens diront que l’anticolonialiste, le progressiste et panafricaniste Modibo KEITA n’était pas homme à laisser sur son territoire une armée coloniale continuer de dominer et d’asservir un peuple frère qui lutte pour recouvre sa liberté et sa dignité. Mais ça, c’est une autre histoire.
Continuons et disons simplement comme le président de l’AMEMOK (Association pour la Mémoire de Modibo KEITA), M. Sanounou KEITA que « dans les conditions de l’époque, pour les combattants de l’indépendance, ce fût un acte courageux, téméraire, patriotique et surtout visionnaire de créer dès le 1er octobre 1960 notre armée et d’exiger dès le 20 janvier 1961 l’évacuation des bases militaires maliennes qui étaient occupées par les troupes coloniales».
Mais l’Histoire retiendra que c’est à partir du juin 1961 que l’armée coloniale a commencé son retrait de notre territoire. Ainsi, de juin à septembre 1961, toutes les bases françaises ont été évacuées. La dernière, la Base 162 de Bamako, actuelle Place d’armes du Génie, sera évacuée le 5 septembre 1961.
C’est donc, ce 5 septembre 1961, et non le 20 janvier 1961, que le dernier contingent des militaires français a quitté le sol malien. À cette occasion une cérémonie militaire solennelle a été organisée au cours de laquelle le drapeau malien a été hissé à la place du drapeau français. C’est pour cette raison du reste que l’avenue reliant le Monument de la paix et celui de l’Indépendance sera baptisée, « Avenue du 5 septembre 1961 ».
20 janvier 1961 : volonté de normalisation des rapports
Malgré les incompréhensions de première heure (l’éclatement de la Fédération du Mali, le problème de l’admission du Mali à l’ONU, l’évacuation des bases militaires françaises à la demande du gouvernement de Modibo KEITA) la volonté de normaliser les rapports entre les deux pays était réelle, de part et d’autre. De Gaulle dépêcha auprès de Modibo KEITA André MALRAUX, lequel a défini ainsi les bases de la coopération entre le Mali et la France, le 20 janvier 1961, dans une déclaration au moment de l’évacuation des bases militaires françaises.
Les rapports franco-maliens, qui sont entrés dans une phase de tension depuis le 22 septembre 1960, date à laquelle le Mali décida de rompre tout lien politique avec la France, ont besoin d’être normalisés. Autant la situation des fonctionnaires français détachés au Mali doit faire l’objet d’un examen attentif, autant l’évacuation des bases militaires françaises en territoire malien réclamée par le gouvernement le 20 Janvier 1961 doit faire l’objet d’un suivi de part et d’autre. Au-delà, il y a les relations économiques, et financières, à évaluer le Mali étant devenu indépendant et restant toujours dans la zone franc.
Ces relations peuvent être envisagées au plan bilatéral et au plan multilatéral dans le cadre ouest-africain notamment des pays ayant en usage le franc CFA.
23 janvier 1961 : conditions techniques de l’évacuation des troupes françaises
À Gao où est installée l’une des quatre bases militaires françaises au Mali, on accueille sans aucune la décision du président Modibo Keita de demander à la France d’évacuer toutes ses installations militaires dans l’ex-Soudan. En effet, cette demande était attendue depuis que le gouvernement soudanais devenu malien avait fait connaître en septembre dernier qu’il considérait comme caducs les accords de défense signés entre la France et la Fédération du Mali du fait de l’éclatement de cette dernière et de la reconnaissance du Sénégal par la France.
Les effectifs militaires stationnés à Gao – base aérienne – avaient d’ailleurs été considérablement diminués et une quarantaine d’Européens seulement y sont encore installés.
On affectait cependant sur place de croire officiellement qu’un « modus vivendi « pourrait être trouvé, et, ces derniers jours encore, des travaux avaient été entrepris à la base de Tessalit, située au nord de Gao, à la frontière algérienne.
Les parties s’accordent à dire que des négociations vont s’ouvrir pour fixer les conditions techniques de l’évacuation des troupes françaises demanderont un certain temps. En effet, le Mali souhaite que le départ des militaires français s’effectue sans que ses transports intérieurs en soient affectés. Or l’infrastructure des aéroports de Gao et surtout de Bamako sont pour le moment confiés aux militaires français et il faudra un certain délai pour assurer la relève.
On estime d’autre part que le fait que le président Modibo Keita ait tenu à se réserver les deux portefeuilles de la défense et des affaires étrangères dans les circonstances actuelles est révélateur de la sensibilité du dossier coté malien.
Annonçant la décision malienne à propos des bases françaises, le président Modibo KEITA a d’ailleurs souligné devant le corps diplomatique réuni à cet effet que cette décision « de son parti et de son gouvernement ne mettait nullement en cause la volonté de la République du Mali de coopérer avec la France sur la base de la non-ingérence dans nos affaires intérieures et du respect de notre souveraineté. «
22 mars 1961 : des camions quittent Kati pour Abidjan
Une centaine de camions transportant du matériel militaire ont quitté mercredi 22 mars 1961 la base française de Kati à destination d’Abidjan.
Kati est, avec Gao, Bamako et Tessalit, une des quatre bases militaires françaises existant encore au Mali, dont l’évacuation avait été demandée par le gouvernement malien. Un second convoi, composé de deux jeeps et deux camions transportant une trentaine de chauffeurs militaires, partira de Gao pour Bamako les 8 et 27 avril 1961.
4 avril 1961 : accord complet avec la France
Les négociations « franco-maliennes » (fédération du Mali s’entend) se sont terminées ce matin jeudi 31 mars 1961. Les deux délégations sont parvenues à un accord complet sur les derniers points qui restaient à résoudre. Elles se sont félicitées de l’esprit de compréhension et d’amitié qui a constamment animé les négociations. Cette réunion met le point final aux négociations franco-maliennes. La signature ou le paraphe des accords définitifs « franco-maliens » est intervenu le lundi 4 avril 1961, à 9 h. 30, à l’hôtel Matignon.
Côté du Mali (fédération s’entend) participait notamment aux pourparlers de jeudi matin : Senghor, président de l’Assemblée législative du Mali, qui présidait la délégation malienne ; Modibo KEITA, président du gouvernement fédéral du Mali ; Mamadou DIA, chef du gouvernement sénégalais, vice-président du gouvernement fédéral du Mali, et Lamine-GUEYE, président de l’Assemblée législative du Sénégal.
La Fédération du Mali et la République malgache présenteront leur candidature à l’O.N.U. sous parrainage français. Les deux États auront une représentation diplomatique propre dans certains pays, dont le choix est laissé à leur discrétion. Dans tous les autres cas la République française assurera la défense de leurs intérêts, étant entendu que chacune de nos missions diplomatiques à l’étranger pourra accueillir un national malien (Malien et Sénégalais) sur la demande de son gouvernement.
Les hauts commissaires à Dakar et à Tananarive seront remplacés par un « haut représentant «, titre que portera également le représentant de la Fédération du Mali à Paris.
Sur le plan de la coopération militaire que va-t-il se passer ? Il y aura-t-il «cession» ou «libre disposition» des bases militaires ?
À partir de la signature des « accords franco-maliens », la France disposera d’un Bureau d’aide militaire à Dakar et la Fédération du Mali, qui comprendra une armée de quatre mille à cinq mille hommes, «cède» à l’armée de la Communauté les bases qui lui sont nécessaires, dont Dakar, Tessalit et Bamako.
Mais cet accord ne sera jamais mis en œuvre en raison de la rupture entre le Mali et le Sénégal.
11 avril 1961 : l’évacuation des bases françaises se poursuit
Dans un discours qu’il a prononcé à Gao, au cours d’un voyage d’inspection dans la boucle du Niger, le président Modibo Keita a déclaré le mardi 11 avril 1961 : «l’évacuation des bases françaises au Mali a commencé et elle est même assez avancée.
Notre demande n’est pas fondée sur une hostilité à l’égard de la France, mais il est inconcevable qu’un pays indépendant ait sur son sol une armée étrangère destinée à mater les velléités de lutte pour l’indépendance… Je pense que les dirigeants et les officiers français comprendront notre position et feront en sorte que cette évacuation soit opérée rapidement et sans difficulté aucune pour conserver la confiance réciproque entre les deux pays et permettre au Mali de coopérer avec la France comme avec tous les autres pays. «
2 mai 1961 : Modibo reçoit un émissaire de Gaule
Maintenant qu’un accord est trouvé sur la défunte Fédération, il faut à présent chercher à normaliser les relations entre les deux pays.
C’est dans ce cadre qu’André Malraux, ministre d’État chargé des affaires culturelles, arrive le mardi 2 mai 1961 à Bamako, où il est envoyé en mission par le général de Gaulle afin de rencontrer Modibo KEITA, et lui transmettre un message de sa part.
Si aucune information filtré de la rencontre sur l’objet de cette mission officielle, l’on s’accorde à dire dans les milieux parisiens que celle-ci avait pour but de passer en revue l’ensemble des relations franco-maliennes. Dans ce cadre général, André Malraux qui avait l’estime et le respect du président Modibo Keïta étudierait les conditions dans lesquelles pourrait s’exercer l’aide technique au Mali.
Le ministre a donné mardi à Bamako une réception à laquelle assistaient de nombreuses personnalités du Mali, dont Madeira Keita, ministre de l’Intérieur et de l’information, ainsi que le corps diplomatique et des représentants de la colonie française de Bamako
L’ambassade de France a publié un communiqué précisant que l’entretien entre le chef de l’État malien et le ministre d’État avait été très cordial et que le message personnel du général de Gaulle concernait, selon des indications officieuses, l’ensemble des relations franco-maliennes et l’avenir de ces relations.
8 mai 1961 : l’envoyé personnel de Modibo à l’Élysée
Le général de Gaulle a reçu lundi après-midi 8 mai 1961, à l’Élysée, le Dr Seydou Badian KOUYATE, ministre de l’Économie rurale, envoyé personnel de Modibo KEITA. Le Dr Kouyaté a remis au chef de l’État français un message personnel du président de la République du Mali. Ce document répond à la lettre personnelle que le général de Gaulle que le président Modibo Keita avait reçu la semaine dernière à travers André Malraux, ministre d’État français chargé des affaires culturelles.
7 juin 1961 : la base de Kati évacuée
Concomitamment à ces négociations, Kati, la plus importante base militaire française au Mali, a été complètement évacuée mercredi 7 juin 1961. Elle comprenait un matériel considérable et un personnel essentiellement constitué par des troupes appartenant à l’infanterie de marine. Matériel et personnel ont été évacués sur Dakar et Bobo-Dioulasso.
Le communiqué officiel du secrétariat d’État français à la défense et à la sécurité annonçant la fin de l’évacuation précise que les bâtiments et les installations diverses que comprenait cette base ont été entièrement transférés au gouvernement du Mali à compter de cette date.
Restent en cours d’évacuation les bases aériennes de Bamako, Tessalit et Gao.
13 juillet 1961 : évacuation de la base de Tessalit
La base aérienne de Tessalit, située sur les confins sahariens, à la frontière nord du Mali, a été entièrement évacuée par les forces françaises, conformément à la demande malienne, et remise au secrétariat d’État malien à la défense.
Le communiqué malien annonçant cette évacuation indique que celle-ci s’est déroulée dans de bonnes conditions.
1er septembre 1961 : évacuation de la base de Bamako
Le gouvernement malien a annoncé officiellement que «l’évacuation du territoire malien par les forces françaises est entrée dans sa phase finale».
Un train spécial a transporté de Bamako à Dakar 812 tonnes de matériel militaire. Ce matériel est évacué vers la base aérienne de Bel-Air, au Sénégal. D’autres matériels militaires sont évacués par avions et cargos. Ces matériels proviennent de la dernière base française restant au Mali, qui est la base aérienne de Bamako.
Les trois autres bases françaises qui restaient au Mali lors de la demande d’évacuation des bases formulée par notre pays ont déjà été évacuées au cours des derniers mois.
5 septembre 1961 : fin de l’évacuation des bases françaises dans notre pays
Les forces françaises ont terminé mardi l’évacuation du territoire malien. Le dernier détachement français a quitté, en effet, la base aérienne de Bamako, qui était la dernière base militaire à être encore occupée par l’armée française.
Le départ de l’armée française de la base de Bamako termine ce cycle d’évacuation, met fin également à la période de soixante-dix-huit années d’occupation militaire totale française de notre pays.
A cette occasion, Mamadou Diakité, secrétaire d’État malien à la défense et à la sécurité, a déclaré notamment que si le début de l’évacuation des bases françaises du Mali avait donné lieu à quelques difficultés, cette évacuation s’était déroulée de façon satisfaisante. Toutes choses qui, dit-il, « laissent bien augurer des relations futures entre la France et le Mali «.
Rappelons que l’évacuation des bases françaises avait été officiellement demandée par le Mail le 20 janvier 1961 par Modibo Keïta. Quatre bases françaises restaient alors au Mail. Trois d’entre elles, comme celles de Kati, Tessalit et Gao, furent évacuées respectivement les 8 juin, 6 Juillet et 2 août. Le départ de l’armée française de la base de Bamako termine ce cycle d’évacuation, met fin également à la période de soixante-dix-huit années qui s’est «coulée depuis l’occupation militaire française de l’ancienne colonie du Soudan.

21 mai 1962 : signature de plusieurs accords à Moscou
Le président Modibo Keita est arrivé ce lundi matin 21 mai 1962 à Moscou pour une visite officielle d’une dizaine de jours, la première que le chef du jeune État africain entreprenne dans les pays de l’Est. Accueilli à l’aéroport par M. Khrouchtchev lui-même, retour de Bulgarie, et conduit aussitôt à sa résidence du Kremlin, comme tous les chefs d’État, le président Modibo Keita a eu avec le chef du gouvernement et les autres dirigeants soviétiques plusieurs entretiens. Il a entrepris ensuite un voyage en province qui l’a conduit notamment à Sotchi, à Tachkent et à Leningrad. Après son départ de Moscou, le 31 mai 1962, le Président Modibo Keïta s’est rendu à Prague puis en Allemagne fédérale.
Les relations soviéto-maliennes ont été établies il y a un peu plus d’un an. Ouvertes en fait par les accords militaires conclus à Moscou en février 1961, elles avaient abouti notamment à la fourniture de matériel, elles prirent leur départ officiel en mars de la même année, avec l’arrivée dans la capitale soviétique Madeira Keita, à l’époque ministre de l’Intérieur et de l’information. Plusieurs accords furent conclus à l’issue de cette visite, notamment un traité de coopération militaire, économique et technique assorti d’un crédit de 40 millions de roubles, ainsi qu’un accord d’échanges culturels. Peu après, le premier ambassadeur du Mali, M. Mamadou Keita, prenait son poste à Moscou.

Source : archives Info-Matin

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