Pour honorer la mémoire du Capitaine Sékou Traoré : La 37ème promotion de l’EMIA porte son nom

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Le capitaine feu Sékou Traoré, affectueusement appelé «Bad», parrain de la 37ème promotion de l’EMIA, s’était proposé volontaire pour servir au Nord, avant même qu’il ne soit sorti de l’EMIA, a témoigné le lieutenant-colonel, Issa Kalogo, actuel directeur de l’EMIA d’alors, instructeur du jeune parrain. Il a accepté de faire don de sa modeste personne en demandant d’aller au Nord, pendant que d’autres n’en voulaient pas. Lui et ses hommes sont restés débout sur les remparts, jusqu’à cette date fatidique du 21 janvier 2012.

 Au moment où le repli tactique était devenu la mode, le capitaine Traoré est resté sur le théâtre des opérations et a même secouru certains militaires blessés, en les protégeant contre l’ennemi. Suite à une longue lutte, suivie d’échanges de tirs, les terroristes ont compris qu’il était invulnérable. Alors, ils ont utilisé d’autres moyens pour le neutraliser lâchement. Jeune chef courageux et brave, son attachement à son serment d’officier, son refus de céder une portion du territoire à l’ennemi en engageant le combat avec ses hommes jusqu’à la dernière goutte de sang, ont fait de lui le symbole de l’héroïsme.

Feu capitaine Sékou Traoré était intègre et loyal. Son sens de responsabilité, du devoir et de l’honneur ont fait de lui un homme d’une solide réputation. Cet engagement du capitaine Traoré ne date pas d’aujourd’hui. En effet, depuis élève-officier, il a toujours souhaité servir au Nord. Un jour, il est parti voir l’actuel commandant de l’Ecole Militaire Interarmes, à l’époque, capitaine instructeur, pour lui exprimer sa volonté de servir dans le septentrion, dès sa sortie d’école. Celui-ci lui a répondu d’attendre d’avoir une petite expérience. Dans sa réplique, il avait dit que s’il s’agit d’expérience, il va l’avoir sur le terrain.

Il a été décoré en compagnie de feu Lieutenant Damien Boiteux de la médaille du mérite militaire à titre posthume en janvier 2013. En janvier 2014, des hommages ont été organisés sur la Place d’armes de Kati à l’intention des victimes d’Aguel-hoc, dont le capitaine Sékou Traoré. Des prières ont été également faites à cette occasion pour le repos éternel de l’âme des disparus. Ses camarades de  promotion  ont même organisé un tournoi de football pour lui rendre hommage, à l’occasion du 4ème anniversaire de son décès en 2015.

Rappelons que le capitaine Traoré est né le 14 juillet 1978 à Koutiala, d’Aliou et de Néné Salimata Sow. Après son cycle primaire et secondaire dans sa ville natale, il a fait des études supérieures à la Faculté des Langues, Lettres et Sciences Humaines (FLASH), de 1998 à 2002. Il a été admis à l’EMIA le 1er octobre 2002, au titre du concours direct, d’où il sortira sous-lieutenant en juillet 2005. Avant de passer lieutenant, deux ans plus tard, au compte de l’avancement automatique. Le 1er janvier 2012, il est promis capitaine, soit quelques jours seulement avant sa disparition.

Au titre des stages, il a effectué le stage d’Officier des Opérations  Spéciales à l’Académie d’Infanterie Mécanisée de Shijiazhuang en Chine, du 14 octobre au 27 janvier 2010. Au cours de sa jeune et brillante carrière, il fut affecté, à sa sortie de l’EMIA, à la 624ème CIR, en qualité de chef de section et d’unité qu’il commandera par intérim pendant quelque temps. En 2009, il participera au 2ème séminaire de l’Institut International des Etudes de Droit du Département de la Défense des Etats-Unis à l’intention des unités ayant reçu des équipements ACOTA. Il était déployé au Nord dans le cadre de ‘’l’Opération Djiguitougou’’ au moment du drame d’Aguel-hoc.

 (Source : DIRPA)

Feu capitaine   Sékou    Traoré

Date et lieu de naissance : 14 juillet 1978 à Koutiala

Fils de : Aliou et de Nènè Salimata Sow

Parcours scolaire

De 1985 à 1990 : premier Cycle école du quartier Sogomougou de Koutiala

De 1991 à 1993 : second Cycle du groupe scolaire public de Koutiala

De 1994 à 1997 : le Lycée Danzier Koné de Koutiala

De 1998 à 2002 : Faculté des Langues, Lettres, Sciences du Langage (Ex-Ensup)

Parcours professionnel

– 01/10/2002 : Admis au concours d’entrée  à l’EMIA  (Concours direct)

-01/10/2005 : Nommé sous-lieutenant et affecté à la 624ème CIR.

-15/10/2007 : Nommé Lieutenant (Avancement automatique)

-01/01/2012 : Il passe Capitaine.

-Du 03 au 04/09/2009 : de la 624ème CIR, il est désigné pour participer au deuxième séminaire de l’institut International des études de droit du département de la défense des Etats-Unis à l’intention des unités ayant reçu des équipements ACOTA.

-01/08/2009 : de  la 624ème CIR en qualité de commandant d’unité adjoint, il est mis en route sur Gao pour la relève de l’opération «Djiguitougou»

-01/09/2009 au 30/01/2010 : désigné pour suivre le stage de cours de chef de section des opérations spéciales en Chine.

Notes diverses : Ecoles et Stages

-1999-2000 : Diplôme d’études universitaires générales (Deug) en Allemand Bilingue à la Faculté des Lettres Langues Arts et sciences humaines (Flash)

-2002-2005 : Diplômé de l’Ecole Militaire Inter -Armes

-14/02/2005 : Certificat de maintien de la paix à l’EMP

-18/03/2005 : Certificat du projet de développement des capacités en maintien de la paix et sécurité

-14/09/2009 au 27/01/2010 : Stage de l’officier des opérations spéciales à l’Académie d’Infanterie Mécanisée de Shijiazhuang (chine)

Au titre des décorations : Médaille Commémorative de campagne et la Croix de la valeur Militaire à titre posthume.

En sa qualité de Commandant de Compagnie de la 113ème CN d’Aguel-hoc, il a engagé le combat avec ses hommes jusqu’à épuisement de tous leurs moyens. Ils furent arrêtés et assassinés le 24 janvier 2012. Il constitue un symbole de la lutte contre le terrorisme.

(Source : DIRPA)

 

Rappel historique sur l’attaque de la garnison d’Aguelhok en 2012 :

Un enseignant rescapé parle de sa dernière entrevue avec le capitaine Sékou Traoré

La bravoure, le courage et l’esprit de sacrifice du jeune capitaine Traoré resteront à jamais gravés dans la mémoire collective du peuple malien. Son exemple est une source d’inspiration  pour  les futures  générations. Neuf mois après le drame d’Aguel-Hoc, un enseignant rescapé, Adama Sissoko, ami inséparable et confident du capitaine Sékou Traoré dit Bad, est revenu sur la dernière entrevue qu’il a eue avec celui qui a sacrifié sa vie pour défendre la terre sacrée du Mali.

Sur l’histoire de l’attaque d’Aguelhok, que nous pouvons encore qualifiée de très récente, chacun y va de son commentaire, au-delà des rumeurs qui se propagent comme une traînée de poudre.  Il y a eu deux attaques à Aguelhok, se souvient Monsieur Sissoko : celle du 18 janvier et celle du 24 janvier 2012. Ces attaques ont été commanditées, selon lui, par les éléments déserteurs de l’armée malienne, avec le soutien des éléments d’Aqmi et  d’autres complices des soldats qui ne passeront jamais en cour martiale. En effet, un élément de la Garde nationale, promotion 2007, a été surpris en train de donner la position de l’armée aux bandits armés. La preuve, il avait tenté de saboter les actions des défenseurs d’Aguelhok, en mettant des bâtons dans les tuyaux des armes collectives qui se trouvaient au portail du camp, le jour même de l’attaque du 18 janvier 2012.

Le mercredi, la ville a été attaquée très tôt le matin. Il y a eu des tirs sporadiques. Mais, c’est  aux environs  de  10 h00 que les choses ont pris une tournure inquiétante. Les éléments du capitaine Traoré ont mis en déroute les assaillants. «Dans la nuit du 18 au 19 janvier, moi-même, j’ai personnellement dénombré plus de trente corps, je le dit officiellement», affirme M. Sissoko. Ce que les gens ne savent, poursuit-il, «le capitaine m’a faire savoir que ce jour-là, vers 22 h00, la position des deux principaux cerveaux de l’attaque, à savoir, un certain Abdallah Gamal et Assadeg Ag, un ancien élu à l’Assemblée régionale de Kidal, lui a été donnée par un agent de renseignements basé à Sévaré, un ami à lui. C’est ce renseignement qui lui a permis d’infliger cette lourde défaite aux assaillants, avant de se retrouver à court de munitions».

Par ailleurs, les autorités, à l’époque, lui auraient fait parvenir un message pour le galvaniser afin qu’il tienne la position à tout prix. Après ce contact qui l’avait visiblement requinqué, il fit venir tous ses éléments, mêmes ceux qui sont au niveau des check-points. Au cours de cette réunion, il leur a expliqué la gravité et la complexité de la situation que vit le pays, tout en faisant part de son inquiétude sur la tournure que vont prendre les choses. Parmi les enseignants de l’Institut de Formation, «les permissionnaires sont partis sous nos yeux. Nous étions deux enseignants noirs restés avec les militaires. On avait en tête que les bandits-là ne vont plus revenir. ‘’Bad’’ disait qu’il ne bougerait pas d’un iota, la Patrie ou la mort, et qu’il honorerait son serment d’officier en défendant l’intégrité territoriale et l’unité nationale», narre M. Sissoko.

Avant de poursuivre : «Quand je lui ai dit que je vais rester avec eux parce que nous sommes tous des hommes, il a eu des larmes aux yeux». Et il m’a répondu que «nous ne sommes pas pareils».  Parce que lui, il a fait la formation et que «devant certains événements, tu ne peux pas tenir, parce que ce n’est pas ta vocation ; mais si tu persistes, on est là». Le jour fatidique, le mardi 24 janvier 2012, en pleins combats, «il m’a rencontré, trois heures avant sa mort, vers 16 h00, tout juste au moment où lui et ses hommes s’étaient repliés derrière le campement de notre école où il avait sa cache d’armes personnelle. Il m’a dit : voilà ce que je t’avais dit, tu vois maintenant, néanmoins vous êtes à l’abri, restez sous les tables bancs, ne bougez pas surtout. Si tout va bien, rien ne vous arrivera, je suis avec ces gens-là d’abord».

Après plusieurs minutes de combat,  les tirs devenaient sporadiques et on l’avait informé que le renfort devrait quitter Tessalit pour Aguelhok, chose à laquelle il ne croyait pas. Il s’est battu et est arrivé à tuer plus de sept bandits parmi ceux qui voulaient rentrer dans la cour de l’école. Un obus a même été tiré sur l’école par les mêmes assaillants ; les traces sont toujours visibles. Après leur irruption dans la cour de l’école, en sortant, ils sont venus nous faire sortir un à un sous les bancs et c’est un Garde déserteur tamasheq qui a dit aux autres que nous sommes des militaires et qu’il nous connaît ; que nous étions cachés pour notre sécurité. Ils avaient pratiquement tué tous les militaires, à part huit qui étaient «protégés» contre les balles, dont le capitaine Traoré.

Jusqu’à sa dernière cartouche, le capitaine ne s’est pas rendu ; il a été pourchassé en voiture et bousculé. Il s’est relevé et ils l’ont arrêté, le Touareg  a reconnu que Sékou est un brave militaire et que c’est lui qui a tué leurs éléments. Il a été ramené dans le camp avec les sept autres de ses compagnons et ils les ont mis à plat ventre, et faisaient rouler les véhicules BJ 4×4 sur eux. C’est cette scène qui m’a beaucoup fait mal, surtout quand je voyais le sang couler de sa bouche, avant de mourir. Il me regardait, mais ne pouvait plus parler. C’est moi qui ai fermé ses yeux quand il a rendu l’âme ainsi que les yeux de l’adjudant Sangaré et du caporal Koba.

Je retiens du capitaine Sékou Traoré, l’exemplarité d’un vrai officier qui a respecté son serment. Souvent, il me disait : «Sissoko, nous, nous sommes là pour vous ; c’est nous qui devons mourir d’abord, avant vous».

 

Rassemblés par Cdt Sibiry KONATE

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