La fuite en avant

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Soumeylou B Maiga - perspectives - destruction
Soumeylou Boubèye Maïga

Depuis l’arrivée au  pouvoir d’Ibrahim Boubacar Kéïta, l’ORTM s’est spécialisé dans les « Flash spéciaux », plus retentissants les uns que les autres. Le dernier en date, annonçait tard dans la nuit du 27 mai dernier la démission du gouvernement de Soumeylou Boubeye Maïga, et son remplacement par le colonel-major Bah N’Daw. L’ancien ministre de la Défense et des anciens combattants paie ainsi les frais de la déroute de l’armée le 21 mai à Kidal face aux groupes armés.

De sources formelles, SBM aurait anticipé un limogeage quasi infaillible inculqué dans la tête du chef suprême des armées par des manœuvriers tapis dans l’ombre. IBK a donc sacrifié, tel un agneau, Soumeylou Boubeye Maïga en lieu et place du très populiste Moussa Mara. Pourtant, le Premier ministre est indexé aussi bien par la majorité de l’opinion nationale, et l’opposition malienne dans son ensemble que la communauté internationale, comme étant le principal (seul et unique ?) responsable de ce qui s’est passé à Kidal et qui conditionne la situation actuelle du pays.

En sacrifiant son ministre de la défense sur l’autel d’arbitrage partial, le chef de l’Etat opte, ni plus, ni moins, pour la fuite en avant. Une fuite en avant doublement avantageuse, selon les calculs d’IBK: sauver sa peau et celle de son PM d’une part, et noyer dans l’œuf le débat sur Kidal d’autre part.

Pourtant, l’éviction de Soumeylou ne résout ni l’un, ni l’autre et, au contraire, la question fondamentale qui a, semble-t-il, conditionné cette démission reste encore sans réponse : Qui a ordonné l’assaut lancé le 21 mai ?
En effet, c’est l’entêtement de Moussa Mara à aller coûte que coûte à Kidal pour prouver sa bravoure et en tirer tout le bénéfice politique, et à braver les mises en garde et interdictions de la Minusma, qui a plongé le Mali dans cette humiliation suprême. C’est aussi lui, Mara, qui a « déclaré la guerre » aux groupes armés. C’est encore lui, Mara, qui s’est désolidarisé de l’armée après sa défaite en arguant que « la déclaration de guerre n’est pas venue de l’autorité politique ». Conséquence : Moussa Mara a fait perdre au Mali une demi douzaine de commis de l’Etat (avec 6 administrateurs civils égorgés) et une centaine de vaillants soldats (les autorités annoncent une cinquantaine). Trois bavures qui valent, pour le Premier ministre, autant de raisons de démissionner ou d’être démis de ses fonctions par le président de la République. Mais, il n’en a rien été. Au lieu de le limoger, IBK a plutôt couvert de lauriers Moussa Mara, qu’il qualifie de brave dans son message à la nation du 19 mai. Du coup, le chef de l’Etat cautionne les actes posés par son Premier ministre. Et donc, tout aussi responsable que lui.

Cette responsabilité commune d’IBK et de Mara cause au Mali la plus grosse humiliation de son histoire, avec la débandade peu glorieuse de son armée du 21 mai. En plus de cette déconvenue, le Mali perd moult acquis dans le dossier du nord. Entre autres, la présence de l’administration et de services parapublics et privés malien à Kidal d’une part, et d’autre part la présence des forces armées et de sécurité. Aujourd’hui, aucun symbole de l’Etat malien n’est visible à Kidal, une ville entièrement contrôlée par les groupes armés.
Cette situation bouleverse la donne normale et place désormais le Mali en mauvaise posture dans la perspective des futures négociations. Le choix du médiateur (Cedeao, Algérie, Maroc ou Mauritanie), la qualité des interlocuteurs (groupes armés ou désarmés et cantonnés), le lieu des négociations (au Mali ou en dehors du pays) sont autant de paramètres qui risquent d’échapper au contrôle d’IBK. D’où ce grotesque maquillage avec la démission de SBM.

Sékou Tamboura

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5 COMMENTAIRES

  1. Excellente analyse. Mais Mara va degager. Meme s’il dort dans le meme lit que Karim Keita, il va degager inchalla.

  2. Une faute impardonnable!

    En accusant l’armée de tous les pêchés d’israël et en ne s’assumant pas au sommet de notre État, IBK et Mara, veulent se faire passer comme des saints alors qu’ils ne cessent de commettre leur faute impardonnable sur l’affaire de Kidal.

    En effet IBK et Mara ne pouvaient ne pas savoir, lorsqu’ils briquaient la magistrature suprême de ce pays en juillet 2013, que nous traversons une crise sécuritaire et institutionnelle grave qui nécessite une réforme complète de notre armée.

    Sachant cela comme tout autre malien, ils ont quand même promis “l’honneur” et la “dignité” au peuple malien.

    Mais une fois élu président de la république et nommé premier ministre de ce pays, ils se sont adonnés à la promotion de leurs familles et belles familles et au gaspillage des ressources publiques dans des avions, motards, rénovations de maisons privées et passations de marchés publics douteux.

    L’armée n’a jamais reçu d’eux un quelconque moyen aérien pour assurer la suprématie malienne dans les airs à Kidal.

    Et quand on attaque un ennemi enraciné depuis belle lurette sur un territoire donné, on ne peut pas ignorer que le contrôle des airs est le préalable à toute offensive terrestre.

    Mais le matamore Moro Mara en a cure de cette précaution d’usage.

    Il s’en alla à Kidal pour y faire figuration et tromper les esprits les plus tronqués comme quoi il est un héros alors que c’est un héron en fuite entre le gouvernorat de Kidal, le camp Minusma et le camp 2 de Kidal avant de le livrer aux voyous armés du Mnla pour aller dormir à Gao dans son mensonge éhonté.

    Cet individu minuscule au devant des défis majuscules de notre nation ignore totalement le sens des mots “patriotisme” et “dignité” tellement qu’il est bercé dans l’opportunisme farfelu et l’arrivisme béant.

    Nous devrons donc lui dire en face la faute qu’il a commise au nord de notre pays et qui a conduit à l’assassinat lâche de 8 préfets de la république du Mali bien avant l’hécatombe de nos soldats froidement abattus dans la précipitation d’une aventure militaire suicidaire mal préparée à Kidal sans stratégie et sans renseignement.

    Mara must go!

    He must also respond to our justice.

    IBK also after his presidential term must respond to our justice.

    Wa salam!

  3. C’est très facile d’accuser Mara d’être l’instigateur de la situation actuelle. Cependant sa visite nous a permis de comprendre que les gens de MNLA sont de mauvaise volonté et que la communauté internationale ne fait rien pour nous sortir de là. Pour moi le problème se situe seulement au niveau de l’engagement des forces le 21 mai dernier. Certes au cas cette opération avait réussi, c’était vraiment une gloire. Comme c’est un échec, il faut tirer les leçons. Il faudrait trouver des responsables. L’un des premiers responsables ne peut être que le Ministre de la défense.

  4. Encore un bon article , l’analyse s’est fait à froid, M. Tambours comme beaucoup de maliens se ne peuvent plus se faire manipuler comme il y a 20 ans , ce voyage pardon ce désastre n’a rien apporté de bon au Mali , à la limite la seule bonne chose est l’enseignement qu’on pouvait en tirer mais avec cette fuite en avant , ce voyage n’a apporté que des malheurs au Mali, et je me demande bien ce que le Mali peut négocier à part sa reddition . Comme pour le l’avion continuez la pression médiatique jusqu’à ce que Mara jette l’éponge . Dans l’affaire woerth-Bettencourt il a fallu plus de 3 mois à la presse pour mettre Éric woerth dans une situation intenable et le contraindre à démissionner . Pour l’avion vous avez tenu bon et ce n’est pas encore fini , continuez la même chsoe pour l’affaire Mara et ne vous laissez pas distraire par les leurres que le gouvernement va envoyer pour brouiller les pistes.

  5. Personne ne détient le monopole du patriotisme dans ce pays.La vérité fait mal mais elle doit être dite.Le souhait de tous maliens c’est de vivre dans un Mali juste et unis.L’union dans la vérité pas le contraire.Nous ne sommes plus dans le registre des 46 dernières années, donc les faits doivent être relater telle qu’elles sont avec objectivité.La dégradation de la situation du nord est là et elle est perceptible par tout le monde.A qui la faute ? comment ce dossier a été géré par notre président IBK ?analysons les faits avec lucidité pour l’intérêt de l’ensemble du peuple maliens.Nous avons des points de vue différents certes mais nous restons tous des patriotes convaincus.Prions pour le Mali

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