Démission du président IBK : Kati a l’honneur sa réputation, et après…

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«Kati ne fera plus peur à Bamako». Cette assurance a été donnée par le président de la République, en son temps. Et IBK, aura tenu promesse jusqu’au 18 Aout 2020, date à laquelle il sera obligé de rendre le tablier, suite à l’insurrection de militaires ayant sonné la révolte à Kati avant de rejoindre Bamako. C’est le début d’un coup, dont avaient été victimes auparavant quatre des cinq présidents que le Mali a connus depuis l’indépendance. Il commence par des arrestations de tout l’état-major de l’armée au ministère de la Défense, des chefs état-major des armées, Gal Abdoulaye Coulibaly, de la sécurité d’état, de l’ancien ministre de sécurité et de la protection civile, Gal Salif Traoré. D’autres arrestations ont été planifiées, notamment celles des ministres de tous les ministres du mini-gouvernement, excepté les ministres des Affaires étrangères et celui de l’administration territoriale. En effet, après 20 jours, sans avoir eu le temps de constituer leurs cabinets respectifs ni même perçus leur premier salaire, les décrets de nomination des nouveaux ministres – notamment Bemba Keita de la Sécurité, Dahirou Dembélé de la Défense, Me Kassoum Tapo de la justice et Abdoulaye Daffé de l’Economie et des Finances ont été arrêtés. Le président très contesté de l’Assemblée Nationale, Moussa Timbiné, connaîtra lui aussi le même sort. Et la série sera plus tard couronnée, en fin de journée, par l’arrestation du président IBK et de son Premier ministre à Sébénicoro. Ils sont conduits manu-militari au camp de Kati, quartier général des juntes militaires maliennes. Bilan « zéro mort, zéro blessés », selon l’annonce faite par les putschistes réunis au sein du Comité Nationale pour le Salut du Peuple. Un coup de Poker, même si l’hôpital Gabriel Touré dit avoir accueilli une demi-douzaine de personnes atteintes par des balles qui ont succombé à leurs blessures. Plusieurs heures après la démission du président, la junte sorte du bois et lève le voile sur l’identité de son chef. Il s’agit Colonel Assimi Goïta, un officier supérieur de 38 ans sorti de l’école militaire de Kati. Il était au moment des émeutes chef des Forces Spéciales à Mopti. À ses côtés les colonels Malick Diaw, chef de la 3è division militaire de Kati, Modibo Koné, chef du Groupement de la Garde à Mopti et de Sadio Camara, qui revient à peine d’une formation en Russie. Y figure également le colonel Ismaël Wagué, chef d’état-major de l’armée de l’Air, qui semble être le plus élégant pour jouer le rôle de porte-parole.

«L’ambition est comme l’eau. Quand elle coule, elle prend de la force», a-t-on coutume de dire. Dans la foulée, de nombreuses mesures et déclarations – dont la fermeture des frontières et l’instauration du couvre-feu – la junte a changé de langage en indiquant que la transition peut être gérée par «un militaire tout comme un civile». Comme quoi, les « sauveurs» de la République n’écartent pas de confier la gestion de celle-ci à un des leurs. Une éventualité partagée par une large majorité de Maliens mais qui risque d’être difficilement acceptée par une communauté internationale qui accentue les pressions pour le retour à l’ordre constitutionnel, quoique le CNSP ait pris soin de faire dissoudre l’Assemblée nationale par le président avant que ce dernier ne démissionne à son tour mais en maintenant la constitution de 1992 et les autres institutions en vigueur.

IBK démissionne et après….

Après l’arrestation d’IBK «pour mauvaise gouvernance» suivie de sa contrainte à la démission, la situation sécuritaire du pays suscite de nombreuses interrogations quant à la possibilité de revivre 2012. Il y a 8 ans, en effet, des militaires annonçaient avoir renversé le régime du président Amadou Toumani Touré, l’accusant d’ «incompétences» dans la lutte contre la rébellion et les groupes islamistes dans le Nord.  Ce coup d’État, après avoir désorganisé l’armée malienne éprouvée sur le terrain suite à l’effondrement de la hiérarchie militaire – ainsi qu’à l’abandon des positions par les commandos parachutistes – a profité aux groupes djihadistes, notamment, les mouvements islamistes armés Ansar Dine, Aqmi et Mujao, pour s’installer dans le nord du pays. Et au Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) proclamer son «l’indépendance ». Retranchée au Sud avec comme ligne de démarcation, Konna, de combattants islamistes lourdement armés lanceront plus tard un assaut pour la conquête du reste du Mali. Il aura fallu une intervention in extremis de la France à travers l’Opération «Serval», pour sauver le Mali du joug de la charia. Malgré l’opération reconquête du Nord, Kidal n’est toujours par de retour dans les girons maliens. Et quoique le Mali ne soit pas aussi inquiété depuis le changement brusque des décideurs, rien ne garantit que les hostilités ne reprendront du côté du MNLA, locomotive principal devenu la CMA (Coordination du mouvement de l’Azawad). Et pour cause, l’accord d’Alger étant entre parenthèse depuis qu’un certains DNI en a exigé la relecture, les responsables de la CMA n’ont pas manqué de rappeler, à travers un communiqué dès le lendemain du putsch, leur attachement à son application intégrale. Comme quoi, Bamako et Kidal pourraient en découdre à nouveau, après la mésaventure de l’ex-premier ministre Moussa Mara.

Par-delà la CMA, les islamistes qui rêvent d’un Mali Islamisé peuvent récidivent en tentant leurs chances. Or, contrairement à ce qui avait été annoncé, il semble que la chaine de commandement ne saurait rester indemne après l’arrestation du chef d’Etat-major des armées et la disparition du patron de la sécurité d’Etat.

L’organisation des élections générales…

Applaudi par la rue à Bamako et dans plusieurs capitales régionales par tous ceux qui, sous la bannière du M5-RFP, avaient réclamé deux mois durant la démission d’IBK et de son régime, le CNSP d’Assimi Goïta et compagnons s’engage à organiser à la vitesse de l’éclair une triple joute électorale et installer un nouveau président élu, le 25 mai 2021. Cette annonce suscite l’inquiétude à plus d’un titre. Il faut dire qu’aucun budget n’a été prévu pour la tenue de telles élections au Mali qui, frappé par la crise du Covid-19 et les mouvements de contestation sociale, se trouve déjà dans une situation économique critique. Pour ne rien arranger, la Cédéao a, de son côté, fermement condamné le coup d’État et annoncé mercredi le gel des échanges financiers entre ses 15 membres et le Mali. Autre sujet d’inquiétude et non des moindres, la situation sécuritaire du pays. En effet, l’une des sources de la contestation des derrières législatives est l’insécurité, qui n’a pas permis à l’Etat d’organiser des élections libres sur l’ensemble du territoire. Conséquences : les candidats en compétition n’ont pu bénéficier des mêmes chances. La même insécurité régnant, le nouveau pouvoir aura à gérer les mêmes problèmes, à moins que la communauté Internationale ne s’engage à ses côtés. L’insécurité n’est pourtant pas le seul obstacle. L’organisation d’une élection suppose et nécessite la disponibilité d’une manne financière manifestement imprévue dans le budget de 2021. Il faut donc attendre le miracle du côté de Kati, qui compte également appliquer l’article 39 des enseignants.

Quid de l’embargo de la Cedeao ?

Réclamé avec exigence par le M5-RFP, cautionné par la majorité présidentielle par un silence coupable qui ne dit pas nom et visiblement lâché par France d’Emmanuel Macron, IBK a fini par capituler, en quittant ses fonctions de président de la république du Mali, depuis le Camp de Kati.

Condamné à l’unanimité par la communauté internationale, la Cedeao a exigé des putschistes le rétablissement du président démissionnaire dans ses fonctions. Tout en excluant pas d’intervenir militairement pour arriver à cette fin, l’organisation sous-régionale a mis sans management le Mali sous embargo. Si les Maliens restent confiants dans leurs forces armées pour contrer la force puissante de la Cedeao, ils restent cependant inquiets des préjudices et conséquences inhérentes à l’embargo dans un pays continental dont l’économie est presque est à terre, à cause de l’insécurité, de la mauvaise gouvernance et de la pandémie à coronavirus. Si le Sénégal et le Niger se soucient des conséquences d’une asphyxie générale du Mali, aux yeux des présidents de la Guinée Conakry et la Cote d’Ivoire en quête de trois mandats controversé, il faut faire comprendre aux militaires que l’heure des coups d’Etat est révolue. Sans attendre leurs pairs, ils ont ordonné la fermeture de leurs frontières avec le Mali, l’arrêt des transactions financières entre autres.

Amidou KEITA

 

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