Mercredi dernier, des heures après que les Maliens aient vu les images disparaître des écrans de leurs téléviseurs par des éléments en rupture, un message inquiétant est apparu quelques instants après que les écrans aient cessé d’être noirs. Une phrase, celle qui venait pour sceller leur destin. ‘’Dans un instant, une déclaration des militaires’’. En d’autre temps, ils auraient aimé lire un bandeau en boucle, genre : ‘’ Dans un instant une adresse du chef de l’état ou du gouvernement’’. Ce message fort mal présenté sur l’écran, déclencha une panique, pire une peur bleue. Les plus avisés conclurent immédiatement à l’annonce imminente d’un coup d’état, en tout cas, d’une funeste information.
L’attente dura des heures et des heures. Des heures et des heures d’angoisse, de questionnements troubles, de déchirements intérieurs profonds, de ressentiments et de colères mal contenus, impossible à contenir. Et c’est aux environs de 4 heures du matin, que l’image de la honte déchira les écrans de téléviseurs de tous ceux qui ont eu la force de résister en gardant les yeux bien ouverts. Le groupe de putschistes avec à sa tête le Capitaine Amadou Haya Sanogo livra un audacieux message lu par le porte – parole en la personne du lieutenant Amadou Konaré. Le contenu malheureusement n’était pas pour nous faire plaisir encore moins nous honorer. Il nous renvoyait à 20 ans en arrière. Le 26 Mars 91. Mon Dieu, bon Dieu, quel funeste destin pour notre pays ? Nous vivions nos difficultés avant l’attaque du 17 janvier mais la tête haute et le regard fier et altier même avec nos soldats héroïquement tombés sur le champ de l’honneur, mais nous étions à mille lieux de nous dire, que ce sont des soldats qui, normalement devraient se trouver aux fronts, choisiraient de retourner le peu d’armements contre notre pays, nous livrant à l’hilarité générale, à la merci de l’ennemi qui trouva l’occasion de se frotter les mains. Pire, dérouler à la face du monde ce qu’ils ont envie de faire en attendant que nous ne terminions avec nos atermoiements, nos contradictions.
Le messager du CNRDRE égrènera un long chapelet croyant sans doute recevoir applaudissement et défilés de soutiens à l’acte qui venait d’être posé. Que non ! Nous sommes devenus aphones non pas que nous avons peur, puisque nous sommes descendus dans les rues avant cette triste aube, mais parce que, la colère face à ce qui venait de nous arriver n’a aucune mesure avec la déception que sur l’heure, nous avons ressenti. D’un iota cette colère mêlée à la déception n’a faibli et ne faiblira que, si demain, le Capitaine Amadou Haya Sanogo reconnaîtra nos institutions qui, d’un trait de Bic rouge, il pense rayer. Que non, nous gardons au plus profond de nous-mêmes cette loi fondamentale, ces institutions sorties des entrailles d’une lutte qui a fait des centaines et des centaines de morts et de blessés.
Un coup d’état, ce n’est pas ce que nous voulons, ce n’est pas ce que nous cherchons pour notre pays et ce n’est pas ce que nous accepterons. Que le capitaine Sanogo et les vaillants officiers et sous-officiers qui l’accompagnent se le disent maintenant et tout de suite. Nous n’accepterons avec qui que ce soit, ce qui vient d’arriver à notre pays. Mais voyant en l’homme, le Capitaine Amadou Haya Sanogo, beaucoup de bons sens, nous nous disons qu’il n’y à point d’inquiétude à se faire, qu’il reculera jusqu’à sa base.
Sory de Moti