Commandante Konaté Bintou Maïga, la militaire qui honore la Malienne : « J’aime l’armée …»

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Rien n’ébranle l’engagement, la détermination du Commandant Konaté Bintou Maïga qui a toujours réussi à défier les hommes pour être major de promotion à se frayer un chemin.

 

Entre Bintou Maïga et l’armée malienne, c’est une histoire d’amour. En 1986, elle fait partie de la vingtaine de jeunes filles qui intègrent les rangs de la grande muette sous le nom de la deuxième promotion du personnel féminin de l’armée. Même si sa vieille mère lui a conseillé d’abandonner les études en sciences exactes terminales pour embrasser la carrière militaire, la jeune Bintou Maïga nourrissait bien déjà l’ambition de le devenir un jour. Pour la première fois, dit-elle, j’ai eu l’amour de la tenue en 1985. « Quand je descendais de l’école vers midi, je voyais les militaires quitter Kati avec des chars pour aller au front dans la guerre entre le Mali et le Burkina. Depuis ce jour, je me suis dit pourquoi ne pas devenir militaire pour aller au front comme ceux-ci ?»

 

En s’engageant dans l’armée, la jeune Bintou Maïga s’est inscrite dans la lignée des femmes qui ont refusé la voie tracée par une société très conservatrice. « J’ai choisi l’armée par vocation. J’aime l’armée. Je pense que les femmes ont leur mot à dire dans la mission sacrée de défense du pays », a déclaré Konaté Bintou Maïga.

 

Pour se retrouver au grade de commandant, elle a gravi tous les échelons. Dans le jargon militaire, on les appelle ‘’sac à dos’’. Par sa bravoure, son courage, sa détermination et son engagement, le parcours de Bintou Maïga peut servir de source d’inspiration pour la nouvelle génération.  Un an après la Formation commune de base, la jeune soldate suit en 1987 les cours de Certificat d’aptitude technique (CAT1) infanterie à Koulikoro où elle sort comme major de promotion. L’année suivante, elle est promue au grade de caporal. En 1989, elle retourne à Koulikoro pour les cours CAT2 toujours en infanterie. Le 1er octobre 1990, elle accède au grade de sergent. Avant de devenir sergent-chef en 1994, elle suit les cours de Certificat interarmes CIA. Encore, elle est major de promotion.

 

Elle honore le Mali au Maroc !

En 1995, le jeune sergent-chef s’envole pour Marrakech au Maroc afin de préparer le brevet élémentaire sur la gestion technique du matériel. Bintou Maïga se singularise et honore le Mali en surclassant les stagiaires de plusieurs nationalités. Elle reçoit les félicitations des autorités royales du Maroc. Du retour au bercail, elle ne chôme pas car elle enchaîne avec le Brevet d’armes n°1 infanterie en 1996. A la fin de la formation, elle est major de promotion. En 1997, les fruits de ce labeur tombent. Elle est promue adjudant. L’année suivante, elle passe avec succès le Brevet d’arme n°2 infanterie. Encore comme major !

 

Mme Konaté Bintou Maïga renforce ses capacités en comptabilité- matières à Markala en 1999, l’année où elle devient adjudante – chef. En juin 2000, elle participe à un atelier de formation régionale ouest africaine des formateurs militaires aux droits et à la protection des enfants avant, pendant et après les conflits à l’école de maintien de la paix de Zambakro en Côte d’Ivoire. A Kati, elle passe le brevet d’armes n°2 matériel, avant de participer à un séminaire de recyclage en administration du personnel de commandement en 2002. Cette même année, elle est sous-lieutenant. Deux après, elle est lieutenant.

 

Une première en Afrique noire !

Rien n’ébranle l’engagement, la détermination de celle qui a toujours réussi à défier les hommes pour être major à se frayer un chemin.  En 2005, elle entre à l’école militaire d’administration de Koulikoro (EMA) avec des jeunes stagiaires venus d’environ 16 pays africains. Bintou Maïga obtient son diplôme d’officier d’administration mais aussi elle entre dans l’histoire car pour la première fois, une femme devient major de promotion de l’Emia. Au-delà du Mali, c’est la première fois qu’une femme devient major d’une école d’officiers en Afrique noire. Elle est capitaine en 2008. Quatre ans après, elle devient commandante.

 

Elle a occupé plusieurs fonctions. De 1987 à 1991, elle est secrétaire au deuxième bureau de l’état-major de l’armée de terre. Entre 1991 et 1992, elle est détachée au service des eaux et forêts de Niono. Elle pose son sac à dos en 1992 à la zone de défense n°1 de Gao où elle fait office de secrétaire. De 1993 à 1994 au moment même où la rébellion battait son plein au nord, Bintou Maïga est détachée au service des Eaux et forêts de Bourem. En 1995, elle retourne à Kati pour servir à la direction du matériel, des hydrocarbures et du transport des armées comme sous-officier comptable matières adjoint.

 

A partir de 2002, elle est détachée au ministère de la Promotion de la femme, de l’enfant et de la famille comme assistante du chef de projet « Sensibilisation des forces armées et de sécurité sur le concept Genre dans les opérations de maintien de paix ». Elle est officier comptable-matières au magasin approvisionnement de l’ECRRA/DGEA Kati de 2003 à 2008. En 2008, elle est nommée trésorière de la DMHTA. Et depuis juillet 2012, elle est Haut fonctionnaire de défense auprès du ministère de la Promotion de la femme.

 

« Mon mari m’a toujours soutenue »

Elle s’est illustrée dans toutes les fonctions occupées par une disponibilité totale et le travail bien fait. « On ne peut pas dire que tout est facile. Il y a des embûches mais je ne regrette rien. Je ne me suis jamais considérée dans les fonctions occupées comme une femme. Toujours, je suis devant. Tout ce que les hommes ont fait, je le fais souvent mieux qu’eux», affirme Commandant Bintou Maïga avec un large sourire. Elle juge positive l’évolution du Genre dans les forces armées et de sécurité. « Ça évolue vraiment », a fait savoir commandant Bintou Maïga.

 

Son foyer n’a jamais été un handicap à sa promotion professionnelle. Elle rend un hommage mérité à son époux. « Mon mari m’a toujours soutenue. Il ne m’a jamais dit, ne fait pas ça », a-t-elle reconnu. Agée de 50 ans, elle est mariée et mère de 3 enfants, dont des jumeaux.   Militaire d’honneur, à cheval sur les principes, elle a eu la médaille commémorative de campagne pour la rébellion de 1994. « Quand je fais quelque chose, je le fais jusque dans mes limites. Et je ne veux pas de complaisance », a précisé celle dont l’intégrité, la modestie, l’humilité et la sociabilité sont des qualités reconnues et saluées au ministère en charge de la promotion féminine. Pour elle, l’essentiel est de donner une bonne image de la femme malienne  indépendante, heureuse de pouvoir exercer une fonction jusqu’alors réservée aux hommes, en accord avec elle-même. De taille moyenne et de teint légèrement noir, Konaté Bintou Maïga se tient droit quand elle marche avec des pas cadencés.

Par  Chiaka Doumbia

 

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