Décidément, l’Accord-cadre signé le 6 avril 2012 garde tout ce qu’il y a de plus pratique. Il est invoqué au besoin pour la matière du Conseil des ministres extraordinaire prévu pour le mardi 12 juin. La bonne question est de savoir : en combien de points ce projet de loi sera-t-il détaillé ?
A ce qu’il semble, le gouvernement actuel cherche toujours un marché du neuf : celui du changement et de la rupture. Il ne tient donc qu’à Cheick Modibo Diarra et à l’ensemble de son équipe gouvernementale d’être les artisans de leur réveil. Une énorme vérité cherche à sortir du puits. Et c’est l’Accord-cadre qui le prévoit. Mais la plate évidence est ici : peut-on continuer à faire avec le CNRDRE ? Pour tout Bamakois, si nous regardons un tant soi peu la margelle du puits, on y voit l’ombre des militaires. La speakerine l’avait demandé l’autre soir au cours du JT de l’ORTM à son invité le ministre Touré, porte-parole du gouvernement. Ce dernier évoquait le Conseil des ministres extraordinaire du mardi prochain et de ce dont il sera question. La présentatrice lui demandait alors, d’une petite voix toute chargée d’émotion, si d’aventure il sera question d’une dissolution pure et simple du CNRDRE dans le projet de loi attendu. Sans se laisser démonter par le « versant abrupt » de la question, le ministre Touré, avec un art consommé de l’esquive, y apportera un parfum sublimable dans sa réponse toute évasive : tout porte à croire donc que le CNRDRE sera enfermé dans une sorte de sarcophage. Pour quoi faire ? Faut-il fermer le ban ? Si ce n’est donc ni une procédure d’interdiction (même temporaire) ni une autodissolution, mais alors avec le projet de loi, comment le gouvernement entend-il briser un mur d’incompréhension ? Nos populations, faut-il le rappeler, sont toujours en quête de repères et nos gouvernants aussi. Nous nous retrouvons dans une transition où tout est encore « en transit », comme dirait l’autre. La question de « l’effacement » du CNRDRE du paysage politique, sinon virtuel, serait perçue comme une faible lueur, un peu comme « du soleil dans de l’eau froide » dans nos flaques d’actualité. Les Bamakois commencent à peine à se retrouver dans des rues visiblement « dégagées » des tenues et autres engins militaires. Si on nous dit que les braves populations vaquent paisiblement à leurs occupations, c’est à cela qu’il faut penser. Le gouvernement avait-il tort d’agir ainsi et de prendre cela pour une insigne faiblesse capable de saborder son autorité ? La réponse est affirmative car c’est le poison du commémorage qui corrompt tout jusqu’aux os. Que n’a-t-on pas dit d’un chef de gouvernement allant prendre ses ordres à Kati ? Cela, nous ne l’avons pas oublié, d’un chef de gouvernement faisant appel à l’Ambassadeur de France à Bamako pour « s’entremettre » dans l’évacuation sanitaire décidé d’un chef de parti, Soumaïla Cissé, à l’aéroport de Bamako Sénou. Que n’a-t-on pas dit ?…Et nous pourrons continuer ainsi alors que son frangin Sidi Sosso Diarra reconnaissait, à travers une presse étrangère, que l’autorité de ce gouvernement était comme « encartée » ? Fallait-il finir par montrer que ce gouvernement de la transition n’était pas « encoconné » dans les petits soins des militaires ? Reconnaissons qu’il y a de cela moins de deux mois que le Capitaine Sanogo et ses gars de Kati étaient de ceux qui faisaient « bouillir la marmite » de la nation. Depuis, on restait dans l’expectative. Le CNRDRE, quant à lui, n’avait plus qu’à tout attendre de la réputation de son président, le Capitaine Sanogo. Qui pouvait-il être certain que son pouvoir a fait long feu ?
La semi génuflexion du gouvernement
Depuis que la crise institutionnelle était ouverte, les politiciens firent montre d’un festival de démagogies quant à l’utilisation du mot nationalisme. Aujourd’hui, c’est comme un nœud coulant qui peut étrangler le pays en attente d’aides. Le ministre Touré peut bien tenter de le dénouer, faute de le trancher, en nous invitant à la réflexion : les demandes d’appui ou autres doivent partir de nos besoins. Il faut d’abord commencer à inventorier ceux-ci, voire ce qu’on n’a pas, ce dont on a besoin. Alors question : va-t-on trop tirer sur cette carte du fait souverain pour prendre congé de nos décisions à prendre ? Voici ce qui risque d’activer la petite troupe des affairistes de tout acabit qui vont s’adosser à la défaite magistrale de volonté de nos gouvernants. Combien faut-il attendre face au dévoiement extrémiste de l’islamisme radical en cours dans les villes occupées au Nord du Mali ? Ce sont les populations qui apprendront le mieux ce qu’il en est de leur quotidien. Le gouvernement élève le ton, disons que c’est déjà ça de gagné. Il sait de qui il tient la légitimité, du moins par le seul acte de nomination du Premier ministre Cheick Modibo Diarra. Le camp d’en face (le front des anti putschistes) a déjà fait entendre sa différence en écrivant au président de la CEDEAO, mais surtout en réclamant la tête de Cheick Modibo Diarra pour un tout autre gouvernement d’union nationale, disent-ils. Cheick Modibo Diarra vient de mettre sa main au panier en convoquant un Conseil de ministre extraordinaire. On notera l’absence du Président Dioncounda Traoré, du ministre d’Etat Sadio Lamine Sow et d’autres ministres en mission. La synthèse qui y sera opérée sera à « l’eau tiède », et on demandera sans doute aux uns et aux autres de relever le défi de la confiance. Ce gouvernement, enfin, met cet ouvrage sur le métier avant d’en venir aux reformes structurelles attendues comme… la loi de programmation militaire. Un an, c’est long pour une parenthèse. Mais le gouvernement ne doit pas douter de son avance qu’il prend ainsi. Cheick Modibo Diarra ne peut biaiser le fonctionnement des institutions en continuant à jouer sur les passions collectives nées après le 22 mars…
S. Koné
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